Louise Gaggini. J’ai pensé aux enfants, aux parents, à nous Juifs pour qui l’enfant reste un miracle

VENDREDI 14 OCTOBRE LOLA EST MORTE, ET DEPUIS JE ME DEMANDE OÙ VONT LES ÂMES DES ENFANTS ASSASSINÉS…
Des hommages honoraient Samuel Paty égorgé deux ans avant.
Le soleil traversait l’humidité du ciel donnant à Paris cette lumière particulière des villes loin de la mer.
Je venais de lire ses mots du désir. 
Mais, ce vendredi-là, sans savoir que Lola était torturée, violée, déchiquetée en somme par des fauves, de ceux qu’on tue d’une balle lorsqu’ils s’approchent trop près des villages pour dévaster les populations, j’étais heureuse du soleil, de Justine passée entre deux cours pour me faire des bisous, manger un dessert trop sucré. 
Je pensais à l’Italie et à mes vacances prochaines. 
Dans le restaurant un client s’est levé, s’est installé au piano et a modulé des variations sur un prélude de Chopin. Un très vieux et élégant monsieur aux cheveux blanc, dont les mains fines et les doigts agiles sur le clavier s’opposaient à son âge. Intemporelles et belles. 
Justine est repartie.
J’ai traîné pour rentrer, nonchalante regardant les boutiques, faisant quelques courses, sans savoir que Lola une petite fille de 12 ans mourait, torturée, souillée, déchiquetée vraiment, dans l’anonymat d’un appartement parisien immergé lui aussi dans la douceur d’un été indien accroché à Paris.  
Le vendredi 14 octobre Lola est morte.
J’ai appris sa mort en regardant des infos qu’en principe je n’écoute plus.  
J’ai pensé à Justine et à tous ces enfants que je vois et entends vers 17 h dans mon quartier. Ils babillent, racontent leur journée d’école ; petits ils revendiquent des pains au chocolat, plus grands ils fument avec des airs de James Dean pour des Lolita déjà sous leur charme. 
Vendredi Lola est morte,
J’ai pensé aux enfants, aux parents, à nous Juifs pour qui l’enfant reste un miracle qui dans l’obscurité du monde trace son petit bonhomme de chemin de lumière pour nous montrer la route à prendre, inconscient du danger qui guette en disant “Regarde maman comment je saute et je cours, Regarde maman je sais faire”, tandis que nous, parents des Solal des Solal, nous les regardons courir et marcher, jouer, rire, heureux de cette joie qu’ils dispensent, magnifiant la vie, leur père, leur mère et ceux qui les entourent.
Vendredi Lola est morte, et malgré moi je me demande “où vont les âmes des enfants assassinés ?”

© Louise Gaggini

Ecrivain, journaliste, mais aussi sculpteur et peintre, pianiste, bref une “artiste plurielle”. Diplômée de lettres, d’Histoire de l’Art et de Conservatoire de musique. Auteur de nombreux dossiers pour la presse et la télévision, dont certains ont été traduits par l’Unesco, des organismes humanitaires et des institutions étrangères à des fins d’éducation et de prévention et d’autres furent diffusés par l’EN, Louise Gaggini est l’auteure d’essais et de romans dont La résultante ou Claire d’Algérie et d’un livre d’art pour l’UNICEF: Les enfants sont la mémoire des hommes. Elle est aussi l’auteure d’essais de société, et expose régulièrement, récemment à New York.
elle a publié son premier roman pour littérature jeunesse en 2001, et son premier roman pour adultes en 2004.

Où la trouver :

http://www.nananews.fr

http://www/louise-gaggini.com

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