Michèle Chabelski et Alfred son neurone

Bon
 Vendredi

    Chabbat
     Chabes

    Dans le  monde d’avant il y avait un lien entre mon  neurone, appelons-le Alfred, mon doigt et mon téléphone…

    J’improvisais, j’innovais, je racontais, je partageais…

J’émouvais, je faisais sourire, pleurer, rire…

J’observais, j’écoutais, puis je racontais…

      L’avenir dessinait des arabesques, tourbillonnait en volutes aériennes, dansait des valses langoureuses  ou des gigues effrénées, le calendrier s’étalait en lettres d’or  devant nos yeux demain, la semaine prochaine, dans deux mois…

    Le temps galopait en m’arrachant au présent, demain c’est l’anniversaire d’Eusébie, dimanche prochain le mariage de Clodomir, la semaine prochaine on se réunit pour Rosh Hoshana, vite, vite, aie, Alfred n’a pas le temps de capitaliser, le temps m’entraîne dans sa course folle, j’aime cette frénésie..

   Et puis l’Autre est devenu l’Ennemi, celui qui pourrait me contaminer et partant…

   On n’ose y penser
  Et on ne pense qu’à ça…

   Si par hasard on bouscule quelqu’un, c’est qu’on n’a pas respecté la distanciation,  le regard devient kalache, on a rayé de son glossaire ce mot qui ensoleille le quotidien, cette échancrure sur la routine, cette trouée de lumière sur l’ombre grise de l’habitude, j’ai cité le projet…

  Ah !! Le projet!!

     Bientôt, très vite, dès que possible, quand tu voudras…

   Ben Alfred s’est peu à peu déshabitué…

       Le cinéma? Bof !
       Le théâtre ? N’y pense pas!
       Une expo? Euh…

          On a troqué le projet contre le test…

Je me suis fait tester

J’ai rendez-vous au Labo

J’attends le résultat…

      Nous étions des morts en sursis, mais nous avions un arsenal de pieds de nez pour lui faire la nique…

   Nous sommes des malades potentiels et Alfred est impuissant à trouver la parade.

   Paraît que les Américains…

   Non, non, c’est les Russes.

    Ah bon?
    Je croyais que les Israéliens…

    Une bile métallique tapisse l’espérance…

        Attention à toi! Vu ton âge… Toutes façons  tu risques d’être reconfinée…

Y a un mec à la télé qu’a dit…

    Alfred est perdu…

      Il s’accroche à la paroi lisse de l’inefficacité, du suicide collectif de la créativité, de l’épouvante de l’inconnu…

  Alfred appelle à l’aide

      Ah oui, mais c’est rien, ça, disent les philosophes.
Nos parents.
Nos grands parents .
La guerre
Les restrictions
La peur…

   Dans les camps…

Alfred se tait…

  Il sait qu’à l’aune de la souffrance,  aujourd’hui on tricote de l’inconnu avec de l’espoir quand même ..

   Allez Alfred!!

     Un masque
Du gel
   Du savon…

     N’exagère pas…

       Le monde marche un peu de traviole aujourd’hui, mais les enfants, l’amitié, l’amour, un ciel étoilé, des mirabelles aux reflets dorés, des malades guéris, les dernières pêches de vigne, des fous rires encore, des peaux douces et des colliers de bras tièdes…

   Oh Alfred!

     La vie, encore…

   Que cette journée embaume votre cuisine de l’odeur des poivrons qu’on grille, des oignons qui caramélisent, du chocolat qui fond au bain marie…

   La vie, quoi…

   Chabbat Chalom
   Git chabes

      Je vous embrasse

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