Naëm Bestandji. Élections municipales à Bagnolet : un coup digne de “Baron noir”

Édouard Denouel (à gauche) et Tony Di Martino (à droite). Source : page Facebook de “Bagnolet en commun”.

Ex-parisien installé à Bagnolet depuis quelques années, Edouard Denouel fut tête de liste sans étiquette du collectif “Bagnolet en commun” lors du premier tour des élections municipales de 2020. Une liste de gauche soutenue par des racialistes, des indigénistes et des identitaires “Arabes”/musulmans. Parmi eux, figurent les deux identitaires les plus en vue de Bagnolet : Youcef Brakni et Fatima Ouassak.

Youcef Brakni ou l’alliance entre extrême gauche et extrême droite musulmane

Youcef Brakni est l’illustration des liens entre une partie de l’extrême gauche et de l’extrême droite musulmane. Partenaire de route de l’islamisme politique, il n’hésita pas en janvier 2015 à citer le Prophète Mohamed lors d’une séance du conseil municipal, à tenir un meeting politique en 2017 dans une mosquée aux côtés d’un prêcheur ultra conservateur et d’un élu islamiste qui considère l’IVG comme un meurtre et les musulmans progressistes comme des traitres. La légèreté de Youcef Brakni à enfreindre la loi de 1905 n’a d’égal que son relativisme du djihadisme après les attentats de Toulouse, son soutien à Youssef Al-Qaradawi (théologien intégriste antisémite, homophobe et misogyne), son agressivité au conseil municipal de Bagnolet pour défendre le même élu islamiste après ses propos violents contre le droit à l’IVG, son soutien à un parti politique islamiste (1).

Il est un ancien membre du Mouvement Islamique de Libération. Un groupuscule motivé par un islam politique qui veut encourager l’auto-organisation [de la communauté musulmane] et notre autonomie politique et culturelle afin que notre communauté recouvre son droit légitime à disposer d’elle-même loin de toute tutelle. Car seule cette auto-organisation et cette autonomie peuvent assurer l’auto-détermination de notre oumma (communauté musulmane supranationale) (2). Il est aussi un ex militant du Parti des Indigènes de la République qui considère que la République française est un blasphème envers l’islam (“islamophobe”).
La France n’est donc pas la tasse de thé de cet activiste. Le drapeau tricolore lui donne des boutons. “[Sa] vie” est le drapeau algérien, comme exprimé avec fierté sur sa page Facebook.
Après la Palestine, après sa défense de Georges Ibrahim Abdalah, après son soutien à l’islamisme politique, il a trouvé dans l’affaire Adama Traoré le réceptacle idéal pour donner de l’ampleur à sa voix politique populiste d’extrême gauche teintée d’idéaux d’extrême droite.

Fatima Ouassak ou le racisme décomplexé

Fatima Ouassak est l’autre figure. Elle soutient également la liste d’Edouard Denouel par des propos élogieux de près de six minutes filmés et mis en ligne par “Bagnolet en commun”.
Comme Youcef Brakni, elle ne voit aucun problème à la non-mixité raciale dans les conférences “décoloniales”. Elle tient aussi un discours populiste et raciste. Elle n’a pas de mots assez durs pour stigmatiser l’école de la République, utilisée par les Blancs pour maintenir et transmettre leurs privilèges (…). La guerre que mènent les Blancs pour garder leurs privilèges se joue aussi dans les écoles, et ce sont nos enfants qui sont pris pour cible (3). Elle considère que l’école aurait pour objectif de détruire nos liens familiaux pour mieux isoler nos enfants, et les écraser.

Tel est le message “d’amour révolutionnaire” (terme promu par Houria Bouteldja) de cette ex militante des Indigènes de la République. Identitaire musulmane, elle rejoint les islamistes dans leur dégoût de l’islam des Lumières (4).

Ainsi, la haine en bandoulière et le verbe haut, elle apporte son soutien “écologiste” (ses convictions écologistes, comme son identitarisme et son racisme victimaire, sont sincères) à Édouard Denouel qui l’accepte volontiers.

Ces accointances du candidat avec des extrémistes montrent par l’exemple comment les idées racialistes peuvent gravir les échelons de la politique locale.

Le mail qui dénonce des liens entre les racialistes et Édouard Denouel

En dehors de sa candidature aux élections municipales de Bagnolet, Édouard Denouel est cadre de la fonction publique au Sénat. Le 28 mars 2019, inquiet de cette alliance avec des racialistes, le comité “Laïcité République 93” envoya un mail au directeur de cabinet de Gérard Larcher, “à l’attention de Monsieur le Président du Sénat”. Il dénonce un rapprochement avec plusieurs personnes de Bagnolet dont la réputation n’est malheureusement plus à faire. Des noms sont cités : M. Youcef BRAKNI et son épouse Fatima OUASSAK, Brahim Benramdan (proche de M. Edouard DENOUEL, conseiller municipal LFI qui montre une tendresse particulière pour les indigénistes). C’est avec ces personnes que M. DENOUEL a organisé un rassemblement officiellement dédié à la paix après les attentats de Christchurch mais où il énumère micro en main les victimes de « l’Islamophobie », dénonce le comité.
Autour d’eux gravite également le dénommé Jimmy PARAT, ancien élu, candidat aux élections législatives de 2017 pour le parti « Français et Musulman », démis de ses mandats électoraux pour ses déclarations sur l’IVG ou les israeliens comparés à des « sauterelles ». (…) Beaucoup connaissent aussi le tristement célèbre Madjid MESSAOUDENE, Conseiller municipal de St Denis, ou Taha BOUHAFS autre membre de LFI. Nous pourrions aussi vous parler de M. Mehdi MEKLAT, qui s’est distingué par ses tweets sous une fausse identité provoquant un émoi légitime dans le pays et de bien d’autres.

Le comité “Laïcité République 93” motive ses dénonciations ainsi : Tous les éléments d’information qui vous sont livrés (il s’agit d’un échantillon) seront portés publiquement à la connaissance des Bagnoletais dans les prochains mois. Nous estimons qu’ils sont en droit de connaitre plus précisément les personnes qui vont solliciter leur suffrage.
Nous n’hésiterons pas non plus à solliciter l’appui des mouvements et des personnes médiatiquement engagées en faveur de la Laïcité afin qu’ils portent avec nous ce combat pour nous opposer aux ambitions électorales qui selon nous mettent à mal l’unité nationale.
Nous ne manquerons pas de souligner l’incongruité de la situation pour mieux en souligner la gravité : ces idées et cette vision anti-républicaine sont portées par un haut fonctionnaire du Parlement français !

Des captures d’écran, des liens vers des vidéos et un de mes articles ont été joints, pour appuyer les dires de la dénonciation.

Le problème est que l’expéditeur de ce mail, “Laïcité République 93”, n’existe pas. Ou plutôt, il a été créé spécialement pour l’envoi de ce texte. Ce comité est uniquement composé de ses deux créateurs : Tony Di Martino, le maire sortant de Bagnolet, et l’un de ses proches collaborateurs. Ce texte, envoyé au Sénat pour nuire à la campagne électorale d’un opposant, pourrait avoir une autre conséquence. En le destinant à son employeur, cela pourrait aussi entacher la carrière professionnelle d’Édouard Denouel.

Aujourd’hui, les circonstances ont changé. Les résultats du premier tour sont arithmétiquement implacables. Tony Di Martino a obtenu 30,78% des voix. Toute alliance avec le PC (22,18%) est impossible. Quant à EELV (17,62%), le parti a appelé à l’unité pour battre le maire sortant.

En digne incarnation de la série “Baron noir”, Tony Di Martino a donc changé son fusil d’épaule. Il n’a plus le choix. Pour le second tour, il décide de s’allier avec ce qu’il considère être une menace pour la République, afin de pouvoir additionner son score du premier tour avec celui de “Bagnolet en commun” (13,68%). Un an après son courrier anonyme digne de barbouzes, Tony Di Martino intègre sur sa liste celle d’Édouard Denouel, sans que ni lui ni les autres personnes incriminées n’aient eu vent de la dénonciation de mars 2019.

Cette fusion est vécue comme une trahison par le collaborateur du maire, complice de l’envoi du mail : Je considère que ce qui a été fait, je ne dis pas que c’était très propre, mais c’est pas la victoire à tout prix. Denouel a tissé des liens avec tout ce qui se fait de pire dans la ville. S’allier avec lui c’est une compromission. [Tony Di Martino] a passé son temps à dénigrer Denouel, Brakni et ses proches politiques, dont certains se retrouvent aujourd’hui sur sa liste.

Tony Di Martino intègre sur sa liste celle d’Édouard Denouel, sans que ni lui ni les autres personnes incriminées n’aient eu vent de la dénonciation de mars 2019.

Un proche collaborateur du maire déballe tout

Ce retournement politique lui a retourné l’estomac. Il a donc pris une décision radicale en rendant public l’occulte stratagème. Ma démarche est politique, pas personnelle contre le maire. Elle est guidée par l’éthique et le respect des principes républicains. Je ne soutiens aucune liste lors du prochain scrutin. Ce qui se passe là a achevé de me convaincre de passer à autre chose.
Avant de tirer sa révérence, il a souhaité tout déballer. Martino avait envie de préparer un coup bas pour torpiller la candidature de Denouel. Et pour ça, il était prêt à mettre en péril la carrière professionnelle de son adversaire. L’idée m’est venue après tout ce que Martino disait sur eux depuis des mois. Il dénonçait la proximité de Denouel avec ces gens-là. C’est en l’écoutant que j’ai eu l’idée de lui proposer d’envoyer un signalement au Président du Sénat sur la proximité de Denouel avec certains personnages. J’ai rédigé le mail. Il l’a relu. Il l’a amendé. On a choisi le nom “Laïcité République 93” pour entretenir la confusion et laisser à penser que, si un jour ça s’ébruitait, ça venait d’un mouvement laïque, de Marie-Laure Brossier.
Marie-Laure Brossier était sur la liste LREM au premier tour. Faire d’une pierre deux coups si ce mail était rendu public, en portant atteinte à la campagne de LREM, était trop tentant.

“Martino avait envie de préparer un coup bas pour torpiller la candidature de Denouel. Et pour ça, il était prêt à mettre en péril la carrière professionnelle de son adversaire.”

Mais un an plus tard, suite aux résultats du premier tour, “des tractations sont entamées” entre Tony Di Martino et Édouard Denouel. Par leur silence, les racialistes cautionnent. S’ils veulent avoir des postes à responsabilité, comme personne ne veut s’allier avec eux, ils n’ont d’autres choix que d’accepter de s’allier avec Martino et inversement. Leur dénominateur commun est la volonté d’accéder au pouvoir.

Dépité, ce (futur ex) collaborateur du maire analyse la situation ainsi : Ils se réclament du mouvement “décoloniale”. Mais ils profitent allègrement du colonialisme électoral : [Tony Di Martino] leur promet des postes d’adjoint. En échange, ils s’allient avec lui. Chacun a vendu son âme au diable. Ils n’avaient pas le choix. Ils étaient obligés de s’allier. Pour Martino, c’est pas l’intérêt général des bagnoletais qui prime. Ce sont ses intérêts personnels.

Contacté par mail pour lui proposer de réagir, Tony Di Martino n’a pas donné suite à ma sollicitation.

Lorsque les concernés seront informés des manœuvres du maire, leurs ambitions politiques seront-elles plus fortes que le sentiment d’être les dindons de la farce ?

(1) Islamistophilie et sexisme “religieux” à gauche : halte à l’aveuglement, à la complicité (2ème partie)
(2) Charte en 10 points du Mouvement Islamique de Libération
(3) Stage syndical “Au croisement des oppressions – Où en est-on de l’antiracisme à l’école ?” les 18 et 19 décembre 2017 à Saint-Denis
(4) Mohamed Sifaoui (né en 1387, ère de l’Hégire), Abdennour Bidar (né en 1391, ère de l’Hégire), Malek Chebel (né en 1372, ère de l’Hégire)

Naëm Bestandji

Pourquoi suis-je féministe, universaliste et laïque ?

Militant féministe et laïque, j’ai longtemps travaillé dans le domaine socio-culturel auprès des enfants et adolescents des quartiers populaires. J’ai toujours vécu dans l’un d’eux. J’ai constaté sur le terrain et dans mon entourage le développement de l’intégrisme musulman dont les filles sont toujours les premières victimes par le contrôle des corps et des déplacements. Le voile en est la quintessence.
J’use de ma plume aujourd’hui pour partager mon expérience et le fruit de mes recherches.

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