Juifs. Et aujourd’hui Tristes. Par Sarah Cattan

Jours sombres.

Pour les Juifs de France.

Les Français juifs.

Pour tous les tenants de la laïcité.

Les républicains.

Les contempteurs de la haine.

Jour 1.

Qu’il était décidément difficile d’être Juif.

Chver tsu zayn a yd

Jour où il t’arrive d’en avoir un peu… marre d’être Juif. D’être du Peuple dit Elu.

En cause… Les jours sombres que tous nous venions de vivre.

Jours où les Juifs furent tous, qu’ils le voulussent ou pas, rappelés à leur terriiiible condition, Juifs qu’ils étaient.

S’en était suivi un débat que chacun, surtout Juif, saura imaginer : aurait-il fallu y aller, à la manifestation. Il y avait ceux qui restaient furibards contre les autres qui, comme moi, avaient commis un papier titré: Je n’irai pas.

Ceux qui d’évidence disaient donc qu’il s’imposait d’y aller.

Ne fût-ce que pour dire leur fait aux media et aux partis politiques hypocrites qui nous avaient monté, à la va vite, cette grand-messe.

Ceux qui tempêtaient et disaient leur colère : on avait sélectionné les participants

Ceux qui disaient : J’irai quand même

Tous réunis me gâchèrent le peu de léger qui me restait de cette journée. De laquelle j’aurais pu inventer un instant joyeux. Une terrasse. Un panaché. Une clope. Un temps promis à ma jeune ado. Ce grand luxe en somme: un temps pour rien. Pour se voir. Buller. Papoter. Et même faire du shopping : j’avais dit à mon ange que nous irions manger une glace.

Eh bien non ! Car outre que toutes ces engueulades autour de la grand messe avaient fini de me saper un moral déjà un brin limite, ne voilà-t-y pas que L’avocat de Benjamin Weller, le gus accusé d’injures antisémites à l’encontre de Finkielkraut[1], annonça soudainement… qu’il n’y avait aucune raison de poursuivre …l’individu.

 Jour 2 donc.

Ça craint, me dis-je. What ? Le Mulhousien Benjamin Weller, représenté désormais par André Chamy, serait juste un mec… comme Vous et moi ? Tout normal, quoi ? Et ses propos, diffusés et rediffusés qu’ils furent, un Juriste pouvait en somme en dire qu’aucune connotation antisémite n’y figurait?

What ? Double peine ? J’allais donc, d’évidence, ré-écouter les dits propos. Vérifier que je n’avais pas rêvé ?

Le toupet alla loin.

Jour 3.

Ce jour-là en effet, Damien Viguier, le Conseil d’Alain Soral et des membres de l’association Égalité & Réconciliation, déposait à son tour, par le biais d’une missive adressée au Procureur, une plainte suite à ce qu’il appela l’incident de dimanche à Paris entre des Gilets et notre académicien.

Une Plainte, oui.

Car celui-là à son tour montait au créneau pour la cause. D’antisémitisme, qu’il écrivait lui encore, il n’y en avait point. Et dire que le philosophe avait osé proférer que le principal inspirateur des insultes qui lui furent adressées … n’était autre que … le discours soralien.

Et dire encore que dans Libé, deux imprudentes impudentes[2] avaient osé écrire que dans le discours soralo-dieudonnien, et pour les complotistes, le terme « sioniste » se substituait durablement à celui de « juif », l’antisionisme devenant prétexte à une critique générale des juifs.

Et pire encore ! Cet autre papier[3] qui affabulait encore ! Contant que Très mobilisés, les adeptes d’Alain Soral ou de Dieudonné étaient de plus en plus présents dans les défilés, brandissant cet antisioniste révélateur d’un antisémitisme ultra-virulent. Ce que je réfute. Ne sachant toujours pas, pauvre fille, Qui donc sont… les Gilets jaunes… Mais ayant une idée… de ce qu’ils n’étaient pas forcément.

L’avocat de Soral s’en prendre enfin à la radio, à la presse sur internet, et puis aussi à Tweeter, où l’antisémitisme serait devenu une façon de désigner l’ennemi intérieur à la vindicte. Où n’importe quelles infractions, et donc la simple injure, pouvait se voir aggravée, parce qu’elles étaient dirigées envers une personne ou un groupe de personne selon la formule consacrée « à raison de leur origine ou de leur appartenance ou non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ».

 Et là, notre homme se lâcha : Rien qui interdise l’antisémitisme. Et pour cause. Si l’antisémitisme était un délit le Code pénal devrait nous en donner une définition, conformément au principe du droit nullum crimen sine lege, poursuivait notre juriste. Or, donner la définition d’une notion c’est en circonscrire les éléments. C’est, pour l’État, se fixer des bornes. Il ne s’agit pas de délinquance, mais d’hostilité, et l’on tient à conserver la pleine maîtrise du concept et à pouvoir en user à discrétion. Vous critiquez le système du capitalisme sauvage ? vous êtes antisémite. Vous défendez la Syrie contre l’agression internationale dont elle a fait l’objet ? vous êtes antisémite. Vous ne voulez pas du mariage homosexuel ? vous êtes antisémite. Vous vomissez la théorie du genre et ses conséquences ? vous êtes antisémite. Et maintenant : vous soutenez les Gilets jaunes ? etc. La liste est longue de ceux qui ont été victimes du procédé.

Ainsi, nous prévenait notre homme de loi, un Soral se retrouvait bouc émissaire. Et, par lui et avec lui, tous ses potes de E&R !

Quoi, poursuivait-il, le prétexte du présent battage était dérisoire. Alain Finkielkraut s’était vu traiter de sale sioniste de merde ? De facho. De raciste. De haineux. On lui aurait demandé de quitter la manifestation en des termes directs : Barre-toi. Casse-toi. Rentre chez toi à Tel Aviv.

Eh bien quoi. Tout cela n’était qu’injures, propos diffamatoires, voire violence légère, mais en rien quoi que ce fût de discriminatoire : les vocables d’antisémite et d’antisémitisme auraient donc été utilisés de manière absolument ar-bi-trai-re : Ne voilà-t-il pas, poursuivait-il, que le seul fait de critiquer une personne qui serait juive, ou de critiquer le judaïsme, ou l’État d’Israël suffisait à constituer l’antisémitisme. Plus encore, il semblait même qu’il suffise qu’un juif fût partisan d’une cause, n’importe laquelle, la cause des migrants ou celle des animaux d’élevage, la destruction de l’Irak ou celle de la Libye, la liberté d’avorter ou la propagande de l’homosexualité, pour que quiconque s’y attaquât se heurtât à celui que l’on allait ériger en bouclier humain.

Quant au sionisme, notre homme poursuivait qu’il y avait des antisionistes partout, même à Jérusalem. Et il se posait la question, qu’il disait au Procureur, de savoir si nous étions entrés en … guerre civile.

Ouf. Lui avait fini.

Il y en eut pléthore pour affabuler. Et chanter que tout ça s’était passé Un jour avant le rassemblement contre l’antisémitisme et deux jours avant le dîner du CRIF, faisant que le réseau sioniste se déchaîna.

Que le Système prétendit se saisir de l’affaire Finkielkraut par … opportunité.

C’est alors, bonnes gens, qu’entra en lice l’avocat de Benjamin Weller, lequel reconnaissait certes s’être emporté mais démentait avoir tenu à aucun moment un quelconque propos antisémite.

Mais Qui donc avait pu y voir des insultes d’une violence rare ?!

Jour 4.

Qui donc était ce porte-parole du gouvernement qui dénonça, via un tweet, la haine à l’état brut dans les rues de Paris contre Alain Finkielkraut hué aux cris de sale Juif.​

Qui parla de La bête immonde tapie dans l’anonymat d’une foule.

Venue à la rescousse de l’avocat, l’inénarrable Aude Lancelin, directrice du Média, mettait quiconque au défi de lui faire entendre dans la vidéo la phrase où sale juif aurait été prononcé. Inaudible… qu’elle était, disait la sotte…

Venus encore à la rescousse des haineux, celui qui accusa le porte-parole du gouvernement d’inventer un nouveau mensonge gravissime pour faire monter la haine dans le pays.

Jusqu’au père Le Pen qui ânonna que Finkie aurait monté une opé pour qu’enfin on parlât de lui.

Quand je pense qu’un Maître du barreau se perdit un instant à ce jeu. Peut-être pour un bon mot.

Alors ?

Nombreux expliquèrent bien qu’ils n’étaient pas en mesure de confirmer si cette insulte avait bien été prononcée. Mais qu’en revanche… sale race avait bien été dit.

Alors ?

Ces propos étaient-ils antisémites ?

Dites-moi.

Dites-moi vite. Urgemment.

Car pour la première fois de ma vie, moi aussi, j’eus, à mon tour, de ces tentations … d’exil

D’un ailleurs où je ne porterais plus ce poids

Ce privilège qu’on m’avait vendu

Cette différence

Qu’il m’arrivait, inconsciente, de porter fièrement.

 Ces propos étaient-ils antisémites ?

La Licra répondit que Oui. Et saisit la justice.

Le Président himself évoqua des injures antisémites contre ce fils d’émigrés polonais devenu académicien français.

Une insupportable agression antisémite, estima, de son côté, Olivier Faure, le patron du … Parti socialiste.

Le Parquet de Paris ouvrit une enquête pour Injure publique en raison de l’origine, l’ethnie, la nation, la race ou la religion, par parole, écrit, image ou moyen de communication électronique.

Et un procès, one more.

Avec un présumé coupable.

Qui aimait à se faire appeler Slim ou Souleyman.

Duquel on savait qu’il se serait converti à l’islam et aurait été connu des services de renseignement pour avoir évolué dans la mouvance radicale islamiste en 2014.

Qu’il aurait encore effectué plusieurs actions à l’étranger avec l’Association des Palestiniens de France. Et si l’hebdomadaire Marianne le décrivit comme un aficionados de Dieudonné, ceux que les chaînes en continu aimaient à interviewer ceux qu’elles appelaient les proches le décrivirent comme à l’accoutumée comme un mec gentil serviable bla bla bla

Et un avocat. André Chamy. Connu, lui, pour avoir défendu à titre gracieux l’ancien dirigeant irakien Saddam Hussein et son ministre Tarek Aziz lors de leurs procès devant la justice irakienne.

De là à en faire un facho pro-Iranien, certes non …

Il intervenait depuis plusieurs années comme commentateur sur des médias d’Etat iraniens comme Sahar TV ou Press TV ? Mais Qu’y contait-il ? On ne sait pas.

Pourtant le sieur n’était pas n’importe qui. Fréquemment présenté comme juriste international, il se trouvait aussi être le vice-président de Réseau Voltaire France, une association créée en 2012, après la dissolution de l’association Réseau Voltaire de l’auteur complotiste Thierry Meyssan.

Présidée par Alain Benjamin, proche de Meyssan et de la mouvance dieudonniste, l’association Réseau Voltaire France a notamment pour objet de représenter les intérêts du Réseau Voltaire International, une organisation au financement opaque dont le site internet, voltairenet.org, occupait depuis plus de quinze ans une place de choix en matière de … désinformation, promouvant ad voluntatem toutes sortes de théories du complot.

Peu regardant, notre homme, interviewé par France 3, ne raconta-t-il pas, sans être démenti, qu’Alain Finkielkraut n’avait pas été poursuivi quand il avait dit que les musulmans proliféraient comme des rats.

Ce qui était un faux. Un de plus. Le philosophe n’ayant jamais tenu ces propos mais ayant osé commenter ceux de la journaliste italienne Oriana Fallaci, selon laquelle les fils d’Allah […] se multipliaient comme des rats[4]. Ecrivant qu’Oriana Fallaci mettait les pieds dans le plat, s’efforçait de regarder la réalité en face. Mais allait trop loin : Elle écrit avec des Pataugas. Elle cède à la généralisation[5]. Elle ne résiste pas à la tentation d’enfermer ceux qu’elle appelle les fils d’Allah dans leur essence mauvaise.

J’ai chialé en regardant les images de l’agression d’Alain Finkielkraut ! Je n’ai jamais vu ça ! C’est d’une violence dingue ! Comment ce garcon peut se croire autoriser à dire ça?, s’était insurgé pour sa part Franz-Olivier Giesbert[6]

Rendez-vous au 22 mai. Nous serons au Tribunal.

Sarah Cattan

[1] Le 16 février dernier.

[2] Laure Bretton et Julie Brafman.

[3] Article de Tristan Berteloot.

[4] La Rage et l’Orgueil. Plon. 2002.

[5] Le Point. 24 mai 2002

[6] In Conversations avec Benjamin Petrover. Son édito La chasse aux Juifs est ouverte du 21 février paru dans Le Point avait suscité de nombreuses réactions sur la toile.

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1 Comment

  1. Alors ?
    Ne nous resterait il qu’a revendiquer la Haine des authentiques ennemis historiques de l Humanité qu ont toujours été chrétiens et musulmans ?
    Est ce autorisé ?

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