Pour la fête de mon père, simple marin pêcheur, par Norbert de Stora

Mon père n’était qu’un simple marin pêcheur de descendance calabraise, dans un petit village d’Algérie. Pour toute richesse, il possédait un modeste 2 pointes sans moteur, et quelques filets, hérités de son père. Mais c’était un génie. Et si on ne le disait pas, tout le monde le savait.

Pour ne citer qu’une partie de sa vie, alentour du village était un phare, au pied duquel des rochers acérés servaient d’abris à des barracudas, poissons estimés pour leur chair savoureuse et appelés brochets en langue vernaculaire, à cause de leur morphologie.

Aventureux était de tenter leur capture, sans risque de déchirer la lamparelle, filet ad hoc mais quasi hors de prix en cas de perte. Mais mon père, rien ne l’arrêtait. C’était un jeu d’enfant pour lui, afin de  les encercler, les obligeant dans la direction de la poche, comme s’ils étaient apprivoisés. Il était pourtant le seul du village à tenter un tel défi.

J’étais tout petit, lorsque, entreposés dans notre cuisine, une partie des brochets qui me dépassaient d’une tête, attendaient pour l’aïoli déjà démarré par ma mère, chantonnant la tarentelle.

Je n’avais que 6 ans, mais je m’en souviens encore.

Oui, mon père devait être unique, malgré sa modestie bien connue.

Pressenti comme gérant de lamparo, par un patron de conserverie de sardines, à la tête d’un équipage de marins, c’était pour une bonne raison. La pêche à la lampare exigeait un tas de critères. Le « canote », tiré par le lamparo la nuit, devait être largué, illico presto, dès le banc de sardines repéré. Puis la lampe à carbure ( acétylène) incandescente éblouissait le poisson qu’il fallait encercler de part et d’autre, pour le diriger vers la poche de la lampare. Mais c’était là qu’il fallait avoir l’art de larguer le plomb du filet avec une vitesse V prime. Et c’est à ce moment-là que mon père agissait par sa dextérité qu’il possédait entre tous. Les pêches miraculeuses ne pouvaient se faire qu’à cette condition.

Oui, tout au long de sa vie, mon père a prouvé qu’il était unique.

Après la dite indépendance de notre pays, dans la ville qui l’avait accueillie, il était devenu l’homme de confiance admiré, adulé

Et devinez sa transformation? Non, incroyable. Il fut pressenti pour un poste à la police municipale, en tant qu’auxiliaire, en partie responsable de la zone bleue. Arborant  son képi, le roi n’était pas son cousin.

Il ne parlait pas beaucoup mon père, mais rien qu’en le regardant l’on savait ce qu’il fallait faire.

Dans son ombre, il m’a été facile de devenir un homme.

Je sais qu’il me protège de la haut.

Bonne fête PAPA!

Norbert de Stora 

 

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