Y a 26 lettres dans l’alphabet! Michèle Chabelski

 Moi j’ai pris l’habitude de m’exprimer avec  la totalité des 26 lettres de l’alphabet.


    C’est vrai, j’utilise même parfois les mots quantité, wagon, xénophobe, yéti et zélé.
    Ceci pour vous prouver l’extension de ma  culture linguistique et mon absence de phobie alphabétique.
    J’ai peiné à l’école de la république de la rue de la Jussienne où  j’ai pleuré, la langue entre les dents, des larmes de sang pour barricader les lettres  manuscrites entre les deux petites lignes du cahier à l’aide d’un porte plume saturé d’encre qui n’attendait qu’une seconde d’inattention pour lâcher un gros pâté au milieu de la page.
     Gomme que je te gomme, le pâté avait tôt fait de se transformer en trou et la maîtresse en gorgone déchaînée.    Ça ne rigolait pas tous les jours rue de la Jussienne.


    Mais de gré ou de force je finis tout de même par métaboliser l’ensemble, majuscules, minuscules, cursives et tout le tintouin.
    Vingt six lettres donc et des millions de combinaisons possibles, des milliards peut-être.
    Mais jusqu’à il y a peu, je crois avoir utilisé sans discrimination tout ce stock, et ce dans plusieurs langues, y ajoutant  même de nouveaux signes comme le eszett allemand .  Ce qui nous fait vingt sept sans les accents et les trémas.
    Un sacré patrimoine que ce dur apprentissage transforma en outil bien utile , puisque je crois me souvenir qu’il fut utilisé  sans réserve pendant bien des années.
    Sauf le eszett contre lequel j’avais une dent, eu égard aux historiettes narrées le dimanche à la maison concernant le peuple allemand. A l’époque, « boche, chleu et nazi « constituait un package relativement indifférencié.
    Mais malgré la prévention contre ce peuple et le judaïsme actif qui coulait dans les veines de mes parents, je fus invitée à me laisser charmer par cet idiome et sa culture qui signaient les classes élitistes de l’époque. Les parents avaient fait taire leur rancune et cet apprentissage de l’allemand nous aida à décrypter les secrets que nos parents échangeaient en yiddish..
    Elitiste!
 Wer reitet so spät durch Nacht und Wind?Es ist der Vater mit seinem Kind!
    Le roi des Aulnes!!
      Et prière de ne pas oublier les majuscules aux noms communs!
    Bref, cette auto promotion qui a soufflé un vent salutaire sur mon ego souffreteux n’avait qu’un seul objet.
    Témoigner en tant que dernier acteur vivant sur un enseignement aujourd’hui complètement périmé.
   Car il m’est apparu au terme d’observations pointues que la génération montante n’avait nul besoin d’encombrer son cerveau de toutes ces lettres pré citées.
    Car les mots essentiels qu’ils ont besoin de déchiffrer sont les suivants:
   On   Off    Play   Pause
      Voyez vous 26 lettres là dedans ?
    Certainement pas. 
      On y trouve bien sûr un Y , lettre un peu rare en français mais tout ce qu’il y a de plus anodine en anglais ,et pour le reste, allez, on peut vivre bien des années sans se soucier d’ajouts surnuméraires.
     Mais la France est bonne fille et ses programmes encore très convenus. Aucun ministre de l’Education n’a jugé bon d’éradiquer les lettres inutiles , si bien que les enfants ingèrent bon an mal an  26 lettres, toutes graphies confondues, alors que j’ai démontré avec un rare brio l’inanité de cette formation exigeante.
     C’est vrai , quoi?
    Ah! J’avais oublié ! Il faudrait aussi ajouter les lettres qui constituent le mot M’Bappé et le patrimoine culturel sera exhaustif..
   What else?


   Que cette journée signe le  plaisir d’abriter dans sa mémoire les plumes Sergent Major et les encriers encastrés dans les pupitres en bois de l’école républicaine des années  bonheur…
    Je vous embrasse

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6 Comments

  1. La nostalgie n’est plus ce qu’elle fut.

    Ouai, c’était mieux avant, on connait la rengaine. Sauf qu’à bien y regarder c’est qu’on était plus jeunes, voilà tout.

    En matière de lecture et d’écriture : la vérité pourrait être aux antipodes de celle de (la souvent excellente d’ailleurs) Michèle Chabelski.

    On n’a jamais autant lu et écrit que depuis que la lourdingue et salissante plume sergent major, impitoyable aux erreurs, fût remplacée par claviers et écrans.

    On écrit et on lit quoi, demanderait Michèle ? Ne lui en déplaise, ce que l’on veut.

    La probabilité statistique étant donc que les « générations montantes » promettent bien plus de Proust et de Verlaine que les « descendantes ».

    • Depuis quelque temps on apprécie, en effet , les gens “sachant lire (compréhension) et écrire (clarté du message)”. Ce ne fut pas toujours le cas dans la génération des baby boomers, où seuls les “scientifiques” étaient en court.

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