Michèle Chabelski a vu « Douleur et Gloire » d’Almodovar ⁩

Bon
Mercredi

Film de Pedro Almodovar

Douleur et Gloire

Avec Antonio Banderas
Penelope Cruz

Il fut baroque, excentrique, flamboyant, exalté, incandescent.

Il est apaisé, sobre, feutré, mesuré, bouleversant.

Almodovar a 70 ans, mal au dos, des migraines, des acouphènes et mal à l’âme.

Salvador Mallo a 70 ans, mal au dos, des migraines, des acouphènes et mal à l’âme.

Salvador est le double d’Almodovar incarné par un Antonio Banderas habité qui lui ressemble comme un jumeau dans ce film autobiographique ou presque.

La scène d’ouverture montre un homme près de se noyer, mais il va retrouver dans un effort de respiration ( inspiration?) ultime le monde des vivants.

Tout est dit ou presque.

Salvador Mallo, un réalisateur sur le retour s’apprête à recevoir l’hommage d’une cinémathèque pour son film « Sabor » tourné des années auparavant, à la suite duquel il s’est brouillé avec son acteur principal, Alberto.
Il va tenter une réconciliation difficile et en gage de confiance offrir à Alberto un manuscrit que ce dernier jouera au théâtre : Addiction.

Et l’addiction est un des thèmes récurrents du fil, car Alberto va initier Salvador à l’héroïne pour tenter de soulager ses douleurs.

Paradoxe, car l’addiction est également le levier du malheur de Salvador. C’est ce qui a brisé son premier amour,Federico, retrouvé dans une scène poignante d’amour,de désir encore brûlant et de regrets qui signe la nostalgie ourlant tout le film.

Car cet opus mosaïque dessine ,par touches pointillistes mêlant habilement le passé et le présent, les déchirures, les remords, les chagrins et les triomphes professionnels.

Douleur et Gloire

Et cette via Dolorosa qu’il parcourt entre pauvreté et richesse, entre
déceptions et amours ,sera en permanence colonisée par une mère adorée omniprésente . Elle finira par le culpabiliser d’un verdict sans appel : mauvais fils.

Mais ce film décrit essentiellement la douleur de l’homme vieillissant dont les maux permanents mutilent la créativité, inhibent l’inspiration, lui faisant découvrir une béance existentielle qui le conduit au bord du précipice.

Ses souvenirs d’enfant brillant, foudroyé de désir à la vue d’un maçon dénudé, saupoudrent la narration linéaire de flash backs qui décryptent la vie de cet homme privé par l’attaque du temps de l’étincelle créatrice qui constituait son ADN..

Mais ce souvenir incandescent signera la rédemption salvatrice de l’artiste revenu miraculeusement au monde de la création.

Douleur et Gloire

Antonio Banderas, habité,donne à son personnage une profondeur bouleversante et Penelope Cruz ranime la beauté sauvage et brûlante d’une Sophia Loren passée de l’Italie à l’Espagne.

Sobriété,sensibilité exacerbée, impudeur délicate dessinent le portrait d’un Almodovar apaisé acceptant enfin de dénuder son coeur, et tétanisé par les
derniers feux d’une vie qui lui a laissé des bleus à l’âme et offert des succès gratifiants.

Douleur et Gloire

Ebréché, Almodovar nous offre ici une variation virtuose sur les vicissitudes de l’âge et l’ombre de la mort qui estropient les possibles si prometteurs de la jeunesse.

En lice pour décrocher la Palme d’Or il peut remporter le trophée s’il ne se fait pas coiffer au poteau par un film kirghize ou tibétain sur la misère des lamas impunément tondus par des braconneurs russes ou chinois.

Que cette journée signe la gaité et l’énergie qui devront se faire un chemin dans la grisaille d’un printemps kidnappé.

Je vous embrasse
Michèle Chabelski

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