” Les jours redoutables ” Un film qui divise Israël – Alain Chouffan

Un film terrible. A voir, bien sûr, mais difficile à supporter. Chacun l’interprétera à sa manière. Sorti, en Israël, le 26 septembre, ce film “ Les jours redoutables” du réalisateur israélien Yaron Silberman, suscite la polémique et divise les Israéliens.

Le sujet du film est pourtant archi connu : l’assassinat du Premier ministre, Yitzhak Rabin, le 4 novembre 1995. Alors, qu’y a-t-il donc de terrible dans ce film ? Avant tout, la surprise totale : c’est la première fois qu’on fait un film, non pas sur Rabin lui-même, mais sur son… meurtrier ! Fallait oser ! Fallait y penser ! L’idée même d y penser est choquante. On ne voit que le meurtrier ! Il est omniprésent à l’écran. Yehuda Nahari Halevi, d’origine yéménite comme lui, qui joue le rôle du vrai meurtrier, Yigal Amir, né en 1970, et toujours condamné à la prison à vie, s’est tellement identifié à lui, qu’il est pénétré par le personnage. Il a mis des semaines pour y parvenir. Et il est magistral. Ce qui choque, et qui fait polémique, c’est la thèse du film ! Ygal Amir a-t-il commis ce crime sous l’influence des rabbins comme il le dit ? Avec leurs accords ? Le film en tout cas le laisse supposer. Il suffit de lire, à la dernière image du film, ces incroyables lignes : “ Yigal Amir a déclaré qu’il n’aurait pas commis son crime sans l’aval de rabbins qui lui ont donné leur autorisation. Malgré cela, aucun rabbin n’a été poursuivi pour l’assassinat de Rabin ”.

Vous avez bien lu : Yigal Amir a été “ influencé par des rabbins ”. Et un peu plus loin : “ L’assassinat a été précédé d’une campagne d’incitation, à laquelle a notamment participé le chef de l’opposition de l’époque et le Premier ministre actuel – Benjamin Nétanyahou ”. Enfin “ les motivations d’Yigal Amir étaient autant religieuses que politiques ”.

Ces messages n’ont rien de nouveau. ils ont été répétés à profusion depuis le 5 novembre 1995, et exploité politiquement par le camp auquel appartenait Itzhak Rabin. Mais voilà : la thèse selon laquelle les rabbins ont joué un rôle dans l’incitation au meurtre a été INFIRMÉE par le président du tribunal de Tel-Aviv, Edmond Lévy. Voici son jugement retrouvé par Pierre Lurçat, un blogueur qui vit à Jérusalem : “ Ma conclusion est que la démarche que le meurtrier a pu effectuer auprès d’un quelconque rabbin, directement ou indirectement, pour s’assurer que la victime avait le statut de “ Din rodef ”, n’était destinée qu’à obtenir un aval a posteriori à l’action que l’accusé avait déjà décidé de réaliser. D’où la conclusion supplémentaire que la tentative de donner à l’assassinat de Rabin une justification halachique est DÉPLACÉE et constitue un abus cynique et grossier de la hala’ha (loi juive) à des fins étrangères au judaïsme”. Un peu compliqué à comprendre mais c’est toute la question du film. Car il s’agit de savoir si le “Din rodef – l’obligation de tuer un Juif pour l’empêcher de perpétrer un meurtre qu’il s’apprête à commettre – soi-disant appliqué à Rabin par certains rabbins – “justifiait” son exécution au regard de la loi juive. Autrement dit plus simplement : Yigal Amir a-t-il a-t-il inventé un soi-disant appui de rabbins pour justifier son crime ? Puisque la loi juive “autorise” de tuer quelqu’un si ce dernier va perpétrer un crime, en l’occurrence Rabin! Ouahhh ! Faut vraiment chercher loin. Commentaire de Pierre Lurçat : “toute personne en tant soit peu versée dans l’histoire juive sait que les peines de mort mentionnées dans la Torah ne sont quasiment jamais appliquées. Le film repose largement sur cette ambiguïté, qu’il ne contribue pas à lever, préférant l’exploiter au service de sa thèse politique”.

Passionné par l’histoire, le réalisateur a voulu faire de ce film un sujet fort et complexe. Il en a fait un thriller psychologique captivant avec une volonté de faire passer un message politique. Avec la formidable interprétation de Yehuda Nahari, pas étonnant que ce film vient de recevoir le prix Ophir du meilleur film décerné par Israël et sera le candidat à un Oscar. Le film n’est pas encore prévu en France.
Claude Sitbon, mon ami, mémoire des Tunes, m a envoyé sa réaction après avoir vu le film en Israël : « Alain, il y a quelques mois j’ai rencontre mon vieil ami Doudik Zylber un des grands producteurs israéliens ;’ TU SAIS CLAUDE JE PREPARE UN FILM, C’EST JE CROIS LE PLUS BEAU DE MA VIE’ .

J’ai attendu, et il y a quelques jours j’ai vu ce film remarquable ” LES JOURS REDOUTABLES “. Un film que toute la critique israélienne a encensé. Il vient de recevoir le prix Ophir, l’équivalent du César et il va représenter Israël pour les Oscar.

L’idée a été de mettre un acteur dans la peau d’Ygal Amir l’assassin de Rabin je n en dirais pas plus Allez voir ce film ».

En attendant faut attendre qu’il arrive à Paris !

Alain Chouffan

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5 Comments

  1. Ayant suivi tout ça de près.

    A la question simple :
    « Des rabbins ont-ils donné à Yigal Amir une autorisation explicite pour assassiner le premier ministre Itshak Rabin ? ».
    La réponse « technique », judiciaire, est sans doute NON.

    MAIS la question pourrait être formulée ainsi :
    « Yigal Amir, jeune tête brûlée (d’aucuns diraient ‘’idéaliste’’…), a-t-il été indirectement incité et implicitement encouragé à commettre son crime par une ambiance générale en Israël, haineuse à l’égard du premier ministre Rabin et fomentée, sur fond d’accords d’Oslo et de campagne électorale, par une coalition informelle politico-religieuse ».

    La réponse spirituelle, culturelle, religieuse et morale est sans doute OUI.

    • La haine à l’égard de Rabin , c’est certain mais l’incitation au meurtre certainement pas . Un esprit faible comme Ygal Amir a pu croire que pour empêcher Rabin d’aller plus loin avec Arafat il fallait le tuer mais jamais personne sauf lui n’a envisagé de l’éliminer ! Cette idée est simplement un pitch pour un scénario !

      • Avez-vous assisté, en 1995, à un rassemblement électoral sur une place publique de Jérusalem avec Netanyahou, candidat contre Rabin et orateur enflammé, pour haranguer la foule ?

        Moi si. Drôle d’ambiance. Il n’y avait aucun appel explicite au meurtre. Mais…

        Et puis, les cérémonies cabalistiques de certains rabbins… Pratiques occultes avec pour finalité de jeter un sort… Renseignez-vous.

  2. Film malhonnête et qui veut faire croire que certains rabbins ont incité à l’assassinat de Rabin alors que les Juges ont enquêté et tranché par la négative !
    Une façon de dédouaner l’assassin pour jeter l’opprobre sur les religieux.

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