Par Michel Dray

Mondanité oblige…le CRIF organise un dîner « de l’espoir » …les otages, eux, crèvent de faim.
Ceux qui me connaissent le savent. D’un naturel méfiant vis-à-vis de toute forme de circonvolution, je préfère dire ma pensée sans la barder de fioritures sémantiques. Cet état d’esprit m’a causé tort plus qu’à mon tour, mais, au final, à perdre en courtisans j’ai souvent gagné en respect. Ceci pour dire que je n’ai aucune sympathie pour Benjamin Netanyahou, que Trump n’est pas ma tasse de thé et que le Hamas est l’un des mouvements terroristes les plus dangereux de la planète. Je préfère regarder les peuples droit dans les yeux que d’entendre benoitement leurs dirigeants gavés de moraline.
Pour autant, je suis un homme de principe. Bien qu’agnostique – « grâce à Dieu » comme disait Mouloudji – je me suis comporté cette semaine non comme un juif célébrant les fêtes de Tichri mais comme un être humain priant pour la libération des otages, et, dans la foulée pour Boualem Sansal et le journaliste Christophe Gleize, otages de la dictature algérienne, pour Cécile Kohler et Jacques Paris, son compagnon, ainsi que pour le jeune Lennart Monterlos, tous trois otages des nazillons ayatolliques ; une manière comme une autre de rappeler que beaucoup d’otages entre les mains des assassins du Hamas sont franco-israéliens, mais rappeler également le peu d’empressement du chef de l’État pour s’occuper de nos concitoyens kidnappés aux quatre coins du monde. Or donc, quelles que soient nos opinions politiques, quelle que soit notre confession – pour peu qu’on ne fréquente aucun intégriste, toute religion confondue naturellement – nous avons durant ces deux dernières années compté les mois et les jours. Aujourd’hui, au sens littéral du terme, nous comptons les heures. Comme je l’ai écrit plus haut, je n’ai aucune affinité politico-culturelle avec Donald Trump. Pourtant, son rôle dans la libération prochaine des otages inspire un certain respect. Peu me chaut que ses actes répondissent à quelque arrière-pensée purement politicienne, ce qui importe c’est leur libération ainsi que la restitution des malheureuses dépouilles, lesquelles resteront à jamais gravées dans notre souvenir tel un indestructible cénotaphe.
Donc comme vous, je suis dans l’attente.
Cependant, il y a encore des hommes et des femmes qui profitent honteusement des situations, même les plus horrifiques. Alors que les quelques dizaines d’otages sont – c’est notre vœu le plus cher – sur le point de recouvrer la civilisation et les civilisés, alors que ces survivants sont décharnés, par le manque évident de nourriture, quelque part à Paris, le CRIF n’a pas trouvé mieux que d’organiser un « dîner » de l’espoir. C’est un peu comme si on organisait un dîner débat pour lutter contre la faim dans le monde… bref vous m’avez compris je pense. À n’en pas douter, au CRIF, tout est bon pour se faire valoir. Tandis que les otages croupissent dans les tunnels de Gaza, des chanteurs, dont pas mal de chevaux sur le retour, chantent devant les caméras et un public qui, bien calé dans son fauteuil, ne tiendrait certainement pas une minute sur un méchant tabouret, les otages, eux, ça fait deux ans qu’ils vivent à même la terre battue.
Comme on le voit je n’ai pas mon clavier – restons moderne – dans le tiroir. Je dis ce que je pense. Au sein de Tribune Juive, certains le savent… Mais si après plusieurs années de silence je reprends langue avec ce journal, c’est parce qu’il y a parfois des combats communs à mener, ce qui n’implique pas forcément des communions d’idées. Le CRIF, qui ne représente rien – une constante chez lui – a une fois de plus dépassé les bornes. Les professionnels de la charity-show-business sont pathétiques et pitoyables, c’est même leur marque de fabrique. Je ne citerai pas de noms, il suffit d’imaginer votre sourire en coin …
Rappelons simplement cette merveilleuse pensée de La Bruyère : « Faire du bruit ne fait pas de bien, faire du bien ne fait pas de bruit »
© Michel Dray
Historien, Ancien chargé de Mission près le Comité Marseille-Méditerranée Provence, Ancien conseiller de Jack Torczyner, vice-Président du Congrès Juif Mondial à New-York (1988), Contributeur à l’ouvrage collectif « Critique de la déraison antisémite » sous la direction de Daniel S. Schiffer

Le CRIF aurait mieux fait de s’installer dans des sukot, et se nourrir frugalement en apercevant les étoiles au travers du feuillage qui tient lieu de toit, en priant pour les otages, qui auront peut-être le bonheur ,en voyant le ciel, l’année prochaine de fêter cet évènement qui nous enseigne qu’un jour nous pouvons nous retrouver, en ayant tout perdu.