
Suivi de : Horreurs et exactions attribuées à l’OLP et aux groupes palestiniens au Liban
Le texte de Deleuze est lisible ici : https://shs.cairn.info/revue-d-etudes- palestiniennes-1984-1-page-41?lang=fr
Dans « Grandeur de Yasser Arafat », Gilles Deleuze présente la cause palestinienne comme une accumulation d’injustices historiques continues, allant de la dépossession territoriale à la négation même de l’existence du peuple palestinien. Il affirme que le sionisme aurait transformé la Shoah en « mal absolu » de nature quasi religieuse, servant à justifier une politique de colonisation, d’expulsion et de violence à l’encontre des Palestiniens, assimilée à une forme de génocide « froid » ou indirect.
Deleuze décrit Israël comme un État fondé sur une fiction : celle d’un territoire vide et d’un peuple palestinien inexistant ou interchangeable avec les autres Arabes. Il compare la situation des Palestiniens à celle des Indiens d’Amérique, et la politique israélienne à une reproduction du capitalisme expansionniste américain. Dans ce cadre, Arafat est élevé au rang de figure historique majeure, incarnant à lui seul un peuple privé de territoire, d’État et de reconnaissance, et représentant la dernière possibilité politique face à la double menace de l’écrasement étatique israélien et de l’intégrisme islamiste.
Ce texte est moins une analyse qu’un réquisitoire idéologique. Deleuze y procède par amalgames constants : entre guerre, terrorisme, colonisation, génocide, capitalisme et sionisme, sans distinctions conceptuelles rigoureuses. L’usage inflationniste du terme « génocide » vide ce mot de sa spécificité historique, tout en opérant une inversion morale : le peuple juif, victime du génocide nazi, devient ici agent d’un mal équivalent, voire structurellement reproducteur de celui-ci.
La Shoah est réduite à une « vision mystique » juive, ce qui relève non d’une critique historique mais d’une déligitimation morale du rapport juif à sa propre destruction. Le texte nie systématiquement la conflictualité réelle du contexte (guerres arabes contre Israël, refus répétés de reconnaissance, violence palestinienne, terrorisme de l’OLP), tout en excusant ou esthétisant la violence palestinienne comme simple « résistance ».
Enfin, Deleuze transforme Arafat en héros tragique quasi shakespearien, en faisant l’impasse sur sa responsabilité politique, idéologique et terroriste. Ce faisant, il participe pleinement à une nazification symbolique d’Israël, couplée à une sanctification du camp adverse, typique de l’aveuglement d’une partie de l’intelligentsia française post-1968.
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« La cause palestinienne est d’abord l’ensemble des injustices que ce peuple a subies et ne cesse de subir. Ces injustices sont les actes de violence, mais aussi les illogismes, les faux raisonnements, les fausses garanties qui prétendent les compenser ou les justifier. Arafat n’avait plus qu’un mot pour parler des promesses non tenues, des engagements violés, au moment des massacres de Sabra et Chatilla : shame, shame. »
Le premier paragraphe de Deleuze repose sur une falsification fondatrice : définir la « cause palestinienne » comme une simple somme d’injustices subies est une escroquerie historique. Cette cause ne naît pas d’abord d’une victimité, mais d’un projet politique de destruction d’Israël, structuré dès les années 1920 autour d’un antisionisme radical et explicitement antijuif, dont le Mufti de Jérusalem est la figure centrale, allié des nazis et acteur d’un panarabisme idéologique, non d’une émancipation nationale palestinienne. Deleuze efface volontairement le rôle décisif de l’Égypte de Nasser, du KGB, des régimes arabes et de leurs instrumentalisations cyniques, comme il efface les violences arabes contre les Juifs bien avant 1948, les pogroms des années 1920, l’oppression sous l’Empire ottoman, puis le refus systématique de toute solution politique : plans de partage, projets binat ionaux, compromis territoriaux, tout a été rejeté au nom d’un fanatisme qui ne voulait pas apaiser le conflit mais l’absolutiser. Parler d’« illogismes » et de « fausses garanties » sans dire que ce sont les dirigeants arabes qui ont saboté chaque tentative de règlement relève du roman idéologique. Deleuze reconstruit un mythe : une Palestine homogène, naturellement possédée par un peuple unique, soudain dépossédé par un « sionisme méchant », mythe historiquement faux, juridiquement infondé, politiquement simplificateur. Quant à Arafat, il est sanctifié comme figure morale surgie de l’injustice, alors qu’il n’a jamais été élu par un peuple souverain et qu’il porte une responsabilité directe dans la déstabilisation du Liban et le contexte qui a rendu possibles Sabra et Chatila. L’invocation de « shame, shame » n’est pas une analyse, c’est une mise en scène morale destinée à blanchir un chef terroriste et à inverser les responsabilités. Ce texte n’analyse rien : il accuse, efface, inverse, mythifie. Ce n’est pas de la philosophie, c’est de la propagande antisioniste brute, dans la droite ligne des récits forgés et diffusés par les réseaux idéologiques pro- soviétiques de l’époque.
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« On dit que ce n’est pas un génocide. Et pourtant c’est une histoire qui comporte beaucoup d’Oradour, depuis le début. Le terrorisme sionniste ne s’exerçait pas seulement contre les Anglais, mais sur des villages arabes qui devaient disparaître ; l’Irgoun fut très actif à cet égard (Deir Yasin). D’un bout à l’autre, il s’agira de faire comme si le peuple palestinien, non seulement ne devait plus être, mais n’avait jamais été. »
Le deuxième paragraphe est un saut explicite dans la nazification d’Israël, sans précaution, sans méthode, sans honnêteté intellectuelle. Le « on dit que ce n’est pas un génocide » est déjà une manipulation : il n’existe aucun consensus disant que ce serait un génocide, et une large partie du discours militant affirme au contraire exactement cela. Deleuze installe un faux contradicteur pour mieux le renverser. Puis il bascule dans l’indécent en parlant de « beaucoup d’Oradour ». Oradour, c’est un massacre nazi de civils sans contexte de guerre, sans combat, sans symétrie. Assimiler l’histoire d’Israël à une série d’Oradour, c’est transférer la figure du nazi sur le Juif, inversion morale radicale et gravissime. C’est d’autant plus obscène que l’histoire réelle montre l’inverse : violences et massacres antijuifs bien avant 1948, sous l’Empire ottoman, puis sous l’impulsion du Mufti de Jérusalem, pogroms des années 1920 et 1930, alliance avec le nazisme, appel explicite à l’extermination des Juifs. Deleuze efface cela pour fabriquer un récit où le Juif devient le barbare originel.
L’évocation de l’Irgoun et de Deir Yassin est faite sans aucun contexte : pas de guerre civile, pas de siège de Jérusalem, pas de routes coupées, pas de villages servant de bases à des milices arabes, pas de projet arabe explicite d’anéantissement du futur État juif, pas de cinq armées arabes coalisées, pas de front appelant à « jeter les Juifs à la mer ». Rien. L’Irgoun est présenté comme un terrorisme gratuit, alors qu’il naît dans un contexte de survie, face à des attaques fanatiques répétées et à l’effondrement de toute protection britannique. Deleuze ne fait pas de l’histoire : il désarme volontairement le réel pour produire un effet moral.
Enfin, l’accusation selon laquelle Israël voudrait faire « comme si le peuple palestinien n’avait jamais été » est une projection. Ce sont les dirigeants arabes qui ont nié toute singularité palestinienne pendant des décennies, parlant d’« Arabes de Palestine » et refusant toute construction nationale autonome dès lors qu’elle impliquait la reconnaissance d’Israël. Le texte opère une inversion complète des responsabilités : le refus arabe devient une disparition imposée par Israël ; la guerre d’extermination devient une politique coloniale juive ; la survie devient barbarie. Cette rhétorique n’est pas neutre : qualifier Israël de nazi, c’est légitimer symboliquement sa destruction. Ce n’est pas une métaphore maladroite, c’est une violence idéologique. Ce paragraphe n’éclaire rien, il prépare le terrain moral à l’excuse du meurtre.
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« Les conquérants étaient de ceux qui avaient subi eux-mêmes le plus grand génocide de l’histoire. De ce génocide, les sionistes avaient fait un mal absolu. Mais transformer le plus grand génocide de l’histoire en mal absolu, c’est une vision religieuse et mystique, ce n’est pas une vision historique. Elle n’arrête pas le mal ; au contraire, elle le propage, elle le fait retomber sur d’autres innocents, elle exige une réparation qui fait subir à ces autres une partie de ce que les juifs sont subi (l’expul- sion, la mise en ghetto, la disparition comme peuple). Avec des moyens plus « froids » que le génocide, on veut aboutir au même résultat. »
Ce paragraphe est moralement obscène et intellectuellement malhonnête. Dire que les Juifs sont des « conquérants » est déjà une falsification radicale : cela efface le mandat international de 1920–1922, la continuité de présence juive depuis trois millénaires, l’achat légal de terres, la légitimité juridique reconnue par la SDN, et surtout la situation réelle d’un peuple menacé d’anéantissement. Les Juifs ne « conquièrent » pas : ils survivent. Deleuze les fait surgir de nulle part comme une force étrangère, exactement selon la grammaire antisémite classique. Et il ajoute l’indécence suprême : rappeler qu’ils ont subi le plus grand génocide de l’histoire pour aussitôt leur reprocher de ne pas être moralement désarmés. Le sous-texte est clair : le Juif, parce qu’il a été victime, n’aurait plus le droit de se défendre, de s’organiser, de se battre, de vivre souverain. Toute autodéfense devient suspecte, toute survie devient faute.
Quand Deleuze affirme que les sionistes auraient « fait du génocide un mal absolu », il touche le fond. Ce n’est pas une construction sioniste : c’est un fait anthropologique et historique. La Shoah est le mal absolu non parce que des Juifs l’auraient décrété, mais parce qu’elle constitue une entreprise industrielle, totale, rationnelle, d’extermination d’un peuple pour ce qu’il est. Dire que reconnaître cela serait une « vision religieuse et mystique » relève de la perversion conceptuelle. C’est précisément Deleuze qui sacralise son récit idéologique, en transformant le Palestinien en figure christique sacrificielle et le Juif en prêtre noir du mal. Il accuse les Juifs de religiosité alors qu’il produit lui-même une théologie politique inversée.
L’accusation suivante est encore plus grave : prétendre que le fait de considérer la Shoah comme mal absolu « propage le mal » et le fait retomber sur d’autres innocents. C’est une inversion totale des responsabilités. Ce raisonnement revient à dire que la mémoire du génocide est criminogène, que la victime devient coupable par le seul fait de nommer ce qu’elle a subi. C’est une thèse dangereuse, car elle prépare l’idée que le Juif est responsable de la haine qu’on lui porte, que sa survie même est une violence. On est ici dans une logique accusatoire typiquement antisémite : la victime serait la cause du mal qu’on lui inflige.
Quand Deleuze parle de « réparation » qui ferait subir aux Palestiniens ce que les Juifs ont subi, il franchit un seuil supplémentaire. Les réparations ont été exigées des génocidaires européens, pas des Arabes palestiniens. Israël n’est pas une réparation payée par les Palestiniens, mais un État reconnu par le droit international dans un cadre de décolonisation impériale. Assimiler la naissance d’Israël à une répétition de la Shoah par des « moyens plus froids » revient à affirmer que les Juifs poursuivent le même but que les nazis : la disparition d’un peuple. C’est une accusation monstrueuse, fausse, et profondément violente. Elle nie la réalité la plus élémentaire : Israël n’a jamais eu de projet d’extermination des Arabes, tandis que le Mufti de Jérusalem, allié de Hitler, avait planifié le génocide des Juifs de la Palestine Mandataire, avait explicitement appelé au génocide des Juifs de Palestine.
La phrase finale — « on veut aboutir au même résultat » — est l’aboutissement logique de cette dérive : elle accuse Israël de vouloir faire exactement ce que les nazis ont fait. Ce n’est plus une critique politique, c’est une mise en équivalence morale totale, un appel symbolique à considérer le Juif comme nazi. Et cette équivalence n’est jamais neutre : si le Juif est nazi, alors tout devient permis contre lui. Ce paragraphe n’est pas seulement faux, il est toxique. Il ne décrit pas le réel, il fabrique un mythe accusatoire où le Juif, coupable de sa survie, devient l’ennemi absolu. C’est une pièce majeure de la propagande antisioniste la plus radicale, écrite non sous la contrainte, mais par choix.
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« Les USA et l’Europe devaient réparation aux juifs. Et cette réparation, ils la firent payer par un peuple dont le moins qu’on puisse dire est qu’il n’y était pour rien, singulièrement innocent de tout holocauste et n’en ayant même pas entendu parler. C’est là que le grotesque commence, aussi bien que la violence. Le sionisme, puis l’État d’Israël exigeront que les Palestiniens les reconnaissent en droit. Mais lui, l’État d’Israël, il ne cessera de nier le fait même d’un peuple palestinien. On ne parlerait jamais de Palestiniens, mais d’Arabes de Palestine, comme s’ils s’étaient trouvés là par hasard ou par erreur. Et plus tard, on fera comme si les Palestiniens expulsés venaient du dehors, on ne parlera pas de la première guerre de résistance qu’ils ont menée tout seuls. On en fera les descendants d’Hitler, puisqu’ils ne reconnaissaient pas le droit d’Israël. Mais Israël se réserve le droit de nier leur existence de fait. C’est là que commence une fiction qui devait s’étendre de plus en plus, et peser sur tous ceux qui défendaient la cause palestinienne. Cette fiction, ce pari d’Israël, c’était de faire passer pour antisémites tous ceux qui contesteraient les conditions de fait et les actions de l’État sioniste. Cette opération trouve sa source dans la froide politique d’Israël à l’égard des Palestiniens. »
Ce paragraphe est construit sur une fiction historique totale, répétée jusqu’à saturation pour qu’elle paraisse évidente. Dire que les États-Unis et l’Europe « devaient réparation aux Juifs » et que cette réparation aurait été payée par les Palestiniens est factuellement faux. Le sionisme précède la Shoah de plusieurs décennies. Les premières vagues de peuplement juif datent de la fin du XIXᵉ siècle. Herzl ne parle jamais de « réparation », mais de sécurité, de souveraineté, de fin de la condition minoritaire juive. La Déclaration Balfour n’est pas une compensation morale, c’est un acte impérial britannique dans un contexte de recomposition du Moyen-Orient après la chute ottomane. En 1948, la Shoah n’est ni juridiquement ni culturellement constituée comme conscience universelle : elle le deviendra plus tard. Deleuze projette rétroactivement une grille morale contemporaine sur une histoire qui ne fonctionne pas ainsi.
Affirmer ensuite que cette prétendue réparation aurait été « payée » par un peuple « innocent de tout holocauste » relève de la science-fiction idéologique. Les élites arabes palestiniennes n’étaient pas des spectateurs naïfs : le Mufti de Jérusalem a collaboré avec Hitler, appelé à l’extermination des Juifs, recruté pour la Waffen-SS. Le monde arabe connaissait parfaitement la question juive européenne et s’est majoritairement aligné sur l’Axe par antisémitisme et antisionisme. Dire qu’ils « n’en avaient même pas entendu parler » est un mensonge pur. Deleuze transforme un conflit politique et militaire en fable morale simpliste : des Juifs coupables, des Palestiniens vierges de toute histoire.
Lorsqu’il affirme que le sionisme et Israël exigent une reconnaissance en droit tout en niant le fait palestinien, il inverse une fois de plus la réalité. Ce sont les autorités juives qui ont accepté tous les plans de partage : Peel, ONU 1947, propositions ultérieures. Ce sont les dirigeants arabes qui ont tout refusé, sans consulter les populations locales, préférant la guerre totale à l’existence d’un État juif, même minuscule. Ce refus arabe est la cause directe de l’absence d’État arabe palestinien en 1948. Israël n’a rien « nié » : il a accepté un compromis que le camp arabe a rejeté par idéologie.
La remarque sur l’usage du terme « Arabes de Palestine » est d’un cynisme achevé. Pendant des décennies, ce sont les Arabes eux-mêmes qui ont refusé l’idée d’un peuple palestinien distinct, au nom du panarabisme. Le terme « Palestinien » désignait indifféremment Juifs et Arabes sous le mandat britannique. L’identité nationale palestinienne telle qu’elle est formulée aujourd’hui est une construction tardive, politique, forgée après la défaite arabe de 1967. Deleuze reproche à Israël une négation qui fut d’abord arabe.
L’accusation selon laquelle Israël nierait « l’existence de fait » des Palestiniens est grotesque : 20 % de citoyens arabes en Israël, droits civiques, représentation politique, Cour suprême, hôpitaux, universités. Pendant ce temps, les pays arabes ont maintenu les réfugiés palestiniens dans un statut d’exception permanent, sans droits, sans intégration, utilisés comme arme politique contre Israël. Les massacres de Palestiniens par des régimes arabes — Jordanie, Liban, Syrie — sont totalement absents du texte. Silence total. C’est ce silence qui est obscène.
Enfin, la thèse finale — Israël ferait passer pour antisémites tous ceux qui le critiquent — est une caricature malhonnête. La critique d’Israël existe, y compris en Israël même. Ce qui est dénoncé, ce n’est pas la critique, mais la diabolisation, la délégitimation, la négation du droit à l’existence, la comparaison obsessionnelle au nazisme, l’exigence d’un État juif qui serait le seul au monde à devoir disparaître. Et c’est exactement ce que fait Deleuze, tout en confondant volontairement critique politique et haine idéologique. Cette confusion n’est pas une erreur : c’est une stratégie.
Ce paragraphe ne décrit pas une « fiction israélienne ». Il fabrique une fiction accusatoire dans laquelle Israël est coupable par essence, les Arabes toujours innocents, et l’histoire constamment inversée. Ce n’est pas de la philosophie, c’est un acte d’accusation déguisé, moralement répugnant et historiquement frauduleux.
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« Israël n’a jamais caché son but, dès le début : faire le vide dans le territoire palestinien. Et bien mieux, faire comme si le territoire palestinien était vide, destiné depuis toujours aux sionistes. Il s’agissait bien de colonisation, mais pas au sens européen du XIXe siècle : on n’exploiterait pas les habitants du pays, on les ferait partir. Ceux qui resteraient, on n’en ferait pas une main-d’œuvre dépendant du territoire, mais plutôt une main-d’œuvre volante et détachée, comme si c’étaient des immigrés mis en ghetto. Dès le début, c’est l’achat des terres sous la condition qu’elles soient vides d’occupants, ou vidables. C’est un génocide, mais où l’extermination physique reste subordonnée à l’évacuation géographique : n’étant
que des Arabes en général, les Palestiniens survivants doivent aller se fondre avec les autres Arabes. L’extermination physique, qu’elle soit ou non confiée à des mercenaires, est parfaitement présente. Mais ce n’est pas un génocide, dit-on, puisqu’elle n’est pas le « but final » : en effet, c’est un moyen parmi d’autres. »
Ce paragraphe est un concentré de mensonges historiques, de projections idéologiques et de haine retournée. Affirmer qu’Israël aurait eu « dès le début » pour but de « faire le vide » dans un prétendu « territoire palestinien » est une falsification totale : il n’a jamais existé de territoire palestinien souverain dans toute l’histoire de cette région. La Palestine est une désignation administrative romaine, ottomane puis britannique, jamais un État, jamais un peuple politique constitué. Deleuze parle d’un objet historique inexistant pour accuser un peuple réel. Ce n’est pas une erreur, c’est une fabrication.
Les Juifs qui construisent ce qui deviendra Israël ne viennent pas « faire le vide » : ils s’installent sur des terres achetées légalement, souvent marécageuses, abandonnées, sous-exploitées, délaissées par les pouvoirs ottomans puis arabes. Ils construisent, drainent, cultivent, urbanisent. Ils ne chassent pas : ils bâtissent. Les populations arabes locales ne sont pas expulsées au départ, elles coexistent, parfois pacifiquement, parfois non. La guerre commence quand le camp arabe refuse l’existence même d’un État juif, pas l’inverse.
Quand Deleuze affirme que les sionistes auraient fait « comme si le territoire était vide », il reprend mot pour mot un mythe colonial inversé. Oui, la terre était pauvre, peu peuplée, sous-développée. Oui, il existe un lien historique, archéologique, culturel, linguistique, spirituel entre le peuple juif et cette terre, attesté sur trois mille ans. Effacer cela, c’est faire du Juif un fantôme sans passé, un corps étranger surgissant du néant. C’est exactement la logique antisémite classique : le Juif n’est jamais chez lui, toujours intrus.
L’accusation de « colonisation » est utilisée de manière sélective et malhonnête. Si l’on parle de colonisation, alors les conquêtes arabes doivent être incluses, les migrations arabes récentes aussi, notamment depuis l’Égypte et la Transjordanie. Mais Deleuze ne l’applique qu’aux Juifs. Les Arabes seraient là « naturellement », hors histoire, hors mouvement, hors conquête. Le Juif seul colonise. C’est une lecture raciale du conflit.
Quand il parle de « main-d’œuvre volante », il décrit en réalité des phénomènes migratoires arabes attirés par le développement économique juif. Le travail, les chantiers, les villes nouvelles ont attiré des populations arabes venues d’ailleurs. Les ghettos ? Ils sont le produit direct des régimes arabes, qui ont parqué les réfugiés palestiniens dans des camps, leur ont refusé la citoyenneté, les ont maintenus dans la misère comme arme politique. Faire porter cela à Israël est une inversion obscène.
Puis vient le mot-clé : génocide. Là, Deleuze franchit le point de non-retour. Il invente un « génocide géographique », un « génocide froid », un génocide sans extermination, sans intention exterminatrice, sans résultat démographique. C’est une escroquerie conceptuelle. La population arabe n’a cessé d’augmenter depuis 1948. Aucun projet d’extermination n’a jamais existé. Employer le mot « génocide » après la Shoah n’est jamais neutre. Deleuze le sait parfaitement. Il sait que ce mot désigne le mal absolu. Il l’emploie pour coller ce mal absolu au Juif.
Dire que « l’extermination physique est parfaitement présente » est un mensonge pur. Il n’existe aucun plan, aucune doctrine, aucun programme israélien visant l’extermination des Arabes. En revanche, il existe des appels explicites arabes à l’extermination des Juifs, depuis le Mufti jusqu’au Hamas. Mais cela, Deleuze l’efface. Toujours la même inversion : le projet génocidaire réel est nié, le projet imaginaire est attribué au Juif.
Ce paragraphe ne critique pas Israël. Il fabrique un monstre moral, un Juif nazi, génocidaire, colonial, froid, rationnel, planificateur. C’est exactement le portrait que dressent les idéologies fanatiques qui, elles, passent à l’acte. Une telle accusation n’est pas abstraite : elle désigne une cible. Elle dit implicitement : face à un tel mal, tout est permis. C’est un texte dangereux, irresponsable, et profondément antisémite. Il n’y a plus ici aucune ambiguïté.
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« La complicité des États-Unis avec Israël ne vient pas seulement de la puissance d’un lobby sioniste. Élias Sanbar a bien montré comment les États-Unis retrouvaient dans Israël un aspect de leur histoire : l’extermination des Indiens, qui, là aussi, ne fut qu’en partie directement physique. Il s’agissait de faire le vide, et comme s’il n’y avait jamais eu d’Indiens, sauf dans des ghettos qui en feraient autant d’immigrés du dedans. A beaucoup d’égards, les Palestiniens sont les nouveaux Indiens, les Indiens d’Israël. »
Ce paragraphe est une fantasmagorie militante, une projection idéologique totale, où l’histoire réelle disparaît au profit d’analogies grossières destinées à frapper moralement. Deleuze commence par recycler le mythe du « lobby sioniste » — vieille matrice complotiste — pour ensuite déplacer la faute sur les États-Unis, accusés de reconnaître en Israël le miroir de leur propre crime fondateur. On est ici dans une logique de culpabilité par analogie, non dans l’analyse. L’Amérique serait criminelle, donc Israël aussi. Le raisonnement ne repose sur aucun fait précis, seulement sur une mise en scène morale.
La comparaison avec les Indiens d’Amérique est historiquement fausse et intellectuellement frauduleuse. Il n’y a pas eu de génocide planifié des Indiens au sens moderne et juridique du terme. Il y a eu des guerres, des déplacements, des maladies, des conflits asymétriques sur plusieurs siècles, dans un contexte d’expansion impériale et de choc de civilisations. Assimiler cela à un projet d’extermination intentionnelle et rationnelle relève de la simplification militante. Deleuze reprend ici la pire vulgate idéologique anti-américaine, pour l’exporter telle quelle sur Israël. Ce n’est pas une analyse comparée, c’est un collage propagandiste.
La phrase clé — « faire le vide » — est répétée comme un mantra. Toujours la même obsession : vider, effacer, exterminer symboliquement. Deleuze ne démontre rien, il martèle. Et toujours la même mécanique : les ghettos, l’effacement, l’immigré du dedans. Or la situation israélo-arabe n’a strictement rien à voir avec celle des peuples amérindiens : pas la même temporalité, pas la même démographie, pas la même logique politique, pas le même droit, pas la même guerre, pas le même résultat. La population palestinienne augmente, se structure politiquement, existe médiatiquement, diplomatiquement, institutionnellement. Rien à voir avec un peuple annihilé.
L’expression « les Palestiniens sont les nouveaux Indiens » est moralement obscène. Elle transforme un conflit politique complexe en fable coloniale manichéenne. Elle retire toute agentivité aux Palestiniens — ils ne sont plus des acteurs politiques, mais des victimes mythologiques — et transforme les Juifs en colonisateurs exterminateurs par essence. C’est une essentialisation raciale du conflit. Le Juif n’est plus un peuple avec une histoire, un droit, une mémoire ; il devient une fonction du mal occidental.
Quant à la référence à Élias Sanbar, elle n’a rien d’innocent. Sanbar est un intellectuel palestinien engagé, diplomate de l’OLP, producteur d’un récit militant cohérent, mais absolument pas un historien neutre. Il appartient à une tradition idéologique qui a précisément pour but de reformater le conflit israélo-palestinien selon les catégories du tiers-mondisme, du colonialisme occidental et de la victimisation absolue. Que Deleuze le cite comme autorité montre qu’il ne cherche pas à comprendre, mais à s’adosser à un récit déjà constitué. Rien d’étonnant : ce texte n’est pas philosophique, il est militant.
Ce paragraphe est peut-être le plus révélateur : Israël n’y est plus un État, ni même un adversaire politique, mais une incarnation du mal occidental absolu, héritier des pires crimes de l’histoire. Cette analogie n’éclaire rien, elle sert une seule fonction : déshumaniser. Et déshumaniser, historiquement, n’est jamais neutre. C’est toujours la dernière étape avant la légitimation de la violence.
Ce n’est plus une critique. C’est une mythologie accusatoire. Et elle est dangereuse.
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« L’analyse marxiste indique les deux mouvements complémentaires du capitalisme : s’imposer constamment des limites, à l’intérieur desquelles il aménage et exploite son propre système ; repousser toujours plus loin ces limites, les dépasser pour recommencer en plus grand ou en plus intense sa propre fondation. Repousser les limites, c’était l’acte du capitalisme américain, du rêve américain, repris par Israël et le rêve du Grand Israël sur territoire arabe, sur le dos des Arabes. »
Ce paragraphe est une caricature simpliste et dénuée de toute rigueur. Réduire la dynamique économique américaine à une sorte de course délirante à la démesure, puis plaquer cette vision biaisée sur Israël, relève d’une ignorance crasse. La logique entrepreneuriale américaine est complexe, a permis des avancées technologiques majeures, a sauvé des vies et créé des opportunités, loin de la caricature d’un capitalisme rapace et destructeur. De même, le projet israélien, loin d’être un simple reflet du capitalisme agressif, est avant tout une construction nationale légitime, qui a offert à des millions de personnes un refuge et des conditions de vie meilleures. Présenter Israël comme le « Grand Israël » expansionniste, construit « sur le dos des Arabes », c’est ignorer la réalité historique, les guerres déclenchées contre lui, et la complexité des enjeux territoriaux. Ce discours n’a d’autre but que de diaboliser Israël en l’assimilant à un monstre économique et politique sans nuance ni fondement. C’est une réduction grossière, idéologisée et malhonnête, qui nie les faits et simplifie à l’extrême une histoire et une réalité profondément complexes.
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« Comment le peuple palestinien a su résister et résiste. Comment, de peuple lignager, il est devenu nation armée. Comment il s’est donné un organisme qui ne le représente pas simplement, mais l’incarne, hors territoire et sans État : il y fallait un grand personnage historique qu’on dirait, d’un point de vue occidental, presque sorti de Shakespeare, et ce fut Arafat. Ce n’était pas la première fois dans l’histoire (les Français peuvent penser à la France libre, à cette différence près qu’elle avait au début moins de base populaire). »
Ce passage est un ramassis de délires et d’illusions. D’abord, confondre résistance légitime et volonté d’anéantissement, c’est faire preuve d’une naïveté coupable, voire d’une complicité implicite avec des idéologies violentes. Ensuite, il gomme soigneusement l’absence totale d’unité politique réelle parmi les Arabes de Palestine. Tous ne partagent pas cette posture unifiée contre Israël, loin de là. L’idée même que le peuple palestinien soit devenu une « nation armée » est un contresens grossier : ce groupe reste fragmenté, divisé, sans État ni consensus clair.
Quant à Arafat, parler de lui comme d’un « grand personnage historique » sorti de Shakespeare, c’est littéralement fumer la moquette. L’OLP a été largement imposé de l’extérieur, notamment par le KGB et des puissances arabes, et Arafat n’a jamais été élu démocratiquement par les Palestiniens. Il a surtout incarné ses propres intérêts, tout en alimentant un cycle de violence et de souffrance, y compris au Liban, où il a largement contribué à l’effondrement et à l’horreur. Cette glorification est non seulement déconnectée de la réalité, mais dangereusement aveugle à la complexité et aux tragédies qu’il a provoquées. Un vrai régal pour les amateurs de propagande romantique et déformante.
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« Et ce qui n’est pas non plus pour la première fois dans l’histoire, c’est toutes les occasions où une solution, un élément de solution étaient possibles, que les Israéliens ont délibérément, sciemment détruits. Ils s’en tenaient à leur position religieuse de nier, non pas seulement le droit, mais le fait palestinien. Ils se lavaient de leur propre terrorisme en traitant les Palestiniens de terroristes venus du dehors. Et précisément parce que les Palestiniens n’étaient pas cela, mais un peuple spécifique aussi différent des autres Arabes que les Européens peuvent l’être entre eux, ils ne pouvaient attendre des États arabes eux-mêmes qu’une aide ambiguë, qui se retournait parfois en hostilité et extermination, quand le modèle palestinien devenait pour eux dangereux. Les Palestiniens ont parcouru tous ces cycles infernaux de l’histoire : la faillite des solutions chaque fois qu’elles étaient possibles, les pires retournements d’alliance dont ils faisaient les frais, les promesses les plus solennelles non tenues. Et de tout cela, leur résistance a dû se nourrir. »
Encore une fois, ce passage est une construction unilatérale, complètement déconnectée des faits. Il oublie délibérément les innombrables erreurs, refus et violences des autorités arabes qui ont sciemment torpillé toutes les solutions possibles, y compris les plans de partage successifs. Il tait aussi que l’Accord d’Oslo a été saboté non pas par Israël, mais par des factions palestiniennes et arabes qui ont financé, soutenu, voire orchestré le terrorisme. C’est une réécriture à sens unique qui gomme toute responsabilité palestinienne.
L’accusation d’une « position religieuse » israélienne qui nierait le droit palestinien est un amalgame flou et insidieux. De quelle « position religieuse » parle-t-on ? Israël a toujours accepté la présence arabe, et a proposé des solutions politiques, tandis que certains pays et mouvements arabes, eux, ont explicitement rejeté tout compromis. Cette lecture ignore aussi la dimension politique et pragmatique des conflits, pour tout réduire à une guerre de religion caricaturale.
Il est faux d’affirmer que les Palestiniens sont un peuple « aussi différent des autres Arabes que les Européens peuvent l’être entre eux ». Il n’y a pas de culture palestinienne homogène distincte : il s’agit majoritairement d’Arabes issus de diverses régions et influences, dont l’identité nationale a été construite dans un contexte géopolitique et idéologique souvent artificiel.
La phrase sur « l’aide ambiguë » des États arabes ne fait que survoler superficiellement la réalité : ces États ont souvent trahi, exploité et réprimé les Palestiniens, les utilisant comme chair à canon dans leurs propres luttes de pouvoir. L’auteur refuse de dire clairement que la cause palestinienne a été instrumentalisée et fracturée dès le départ.
Enfin, dépeindre les Palestiniens comme des victimes éternelles, sans unité ni responsabilité, incapables de prendre leur destin en main, est non seulement faux mais profondément condescendant. Cette fiction sert à dédouaner totalement les acteurs palestiniens de toute part d’erreur ou de violence, et à nourrir une posture victimaire simpliste et pathétique. Un texte déconnecté de la réalité, dangereux par sa partialité et son mensonge.
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« Il se peut que l’un des buts des massacres de Sabra et Chatila ait été de déconsidérer Arafat. Il n’avait consenti au départ des combattants, dont la force restait intacte, qu’à condition que la sécurité de leurs familles fût absolument garantie, par les États-Unis et même par Israël. Après les massacres, il n’y avait pas d’autre mot que « shame ». Si la crise qui s’ensuit pour l’OLP avait pour résultat, à plus ou moins long terme, soit une intégration dans un État arabe, soit une dissolution dans l’intégrisme musulman, alors on pourrait dire que le peuple palestinien a effective- ment disparu. Mais ce serait dans de telles conditions que le monde, les États-Unis et même Israël n’auraient pas fini de regretter les occasions perdues, y compris celles qui restent encore possibles aujourd’hui. A la formule orgueilleuse d’Israël : « Nous ne sommes pas un peuple comme les autres », n’a cessé de répondre un cri des Palestiniens, celui qu’invoquait le premier numéro de la Revue des études palestiniennes : nous sommes un peuple comme les autres, nous ne voulons être que cela… »
Ce passage est une caricature grossière, une construction idéologique déconnectée de la réalité historique et politique.
Premièrement, l’idée que les massacres de Sabra et Chatila auraient été orchestrés pour « déconsidérer Arafat » est un contresens total. Ces atrocités sont le fruit d’une vendetta sanglante des phalangistes chrétiens libanais, motivés par une haine profonde et des calculs politiques internes, et non d’un plan machiavélique israélien visant à manipuler la scène palestinienne. Dire le contraire relève soit d’une ignorance coupable, soit d’une volonté manifeste de diaboliser Israël sans nuance.
La proposition selon laquelle la crise de l’OLP mènerait à une disparition effective du peuple palestinien est pure fantasmagorie. Les Palestiniens existent, sous diverses formes, mais surtout la revendication d’une nation unifiée est une construction politique récente, largement alimentée par des acteurs externes et internes à la région. Ce passage oublie de rappeler que les populations dites palestiniennes sont historiquement très imbriquées dans des réalités arabes plus larges, comme celle de la Jordanie, et que cette identité n’est pas universellement acceptée ni revendiquée unanimement.
La phrase sur la « condition » d’Arafat quant à la sécurité des familles des combattants semble hors de propos, confuse et non étayée. Elle paraît plus une tentative de justifier ou humaniser un leader contesté qu’un fait historique solide.
Enfin, ce cliché lourd selon lequel les Palestiniens passeraient leur temps à « crier » leur identité dans une unité homogène est faux, caricatural et réducteur. La majorité des Arabes vivant en Israël ou dans les territoires travaillent, vivent leur vie, et ne se définissent pas forcément par une opposition violente ou exclusive. Ceux qui s’engagent dans la violence ne se limitent pas à des manifestations bruyantes : ils tuent, attaquent, et sont responsables d’actes de terrorisme quotidiens. Pourtant, ce texte les met sur un pied d’égalité avec une prétendue majorité pacifique, sans jamais questionner ni condamner clairement les violences.
Démonstration même d’une lecture idéologique, simpliste, partiale et déconnectée, qui refuse de voir la complexité du terrain, qui gomme les responsabilités des acteurs palestiniens et arabes, et qui cherche à faire d’Israël un coupable unique, permanent et absolu. Une vision manichéenne, dangereuse et débilitante.
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« En menant la guerre terroriste du Liban, Israël a cru supprimer l’OLP et retirer son support au peuple palestinien, déjà privé de sa terre. Et peut-être y a-t-il réussi, puisque dans Tripoli encerclée il n’y a plus que la présence physique d’Arafat parmi les siens, tous dans une sorte de grandeur solitaire. Mais le peuple palestinien ne perdra pas son identité sans susciter à sa place un double terrorisme, d’État et de religion, qui profitera de sa disparition et rendra impossible tout règlement pacifique avec Israël. De la guerre du Liban, Israël lui-même ne sortira pas seulement morale- ment désuni, économiquement désorganisé, il se trouvera devant l’image inversée de sa propre intolérance. Une solution politique, un règlement pacifique n’est possible qu’avec une OLP indépendante, qui n’aura pas disparu dans un État déjà existant, et ne se sera pas perdue dans les divers mouvements islamiques. Une disparition de l’OLP ne serait que la victoire des forces aveugles de guerre, indifférentes à la survie du peuple palestinien. »
Ce paragraphe est une apologie grossière de l’OLP et une attaque caricaturale et biaisée contre Israël, complètement déconnectée des réalités historiques et politiques.
D’abord, la référence à Arafat restant « physiquement » parmi les siens dans Tripoli est un mensonge implicite qui masque la réalité : ce personnage, loin d’être un leader héroïque, a souvent fui ses responsabilités, évitant les combats directs, et a contribué à l’effondrement et à la division des Palestiniens par ses choix et compromissions.
Dire que « le peuple palestinien ne perdra pas son identité » est un postulat idéologique, faux, car il n’existe pas d’identité palestinienne homogène comparable à l’identité juive millénaire, ce qui explique aussi la fragmentation, les conflits internes, la torture et l’oppression exercées par l’OLP et ses dérivés sur leur propre population.
L’affirmation selon laquelle Israël sortirait « moralement désuni, économiquement désorganisé » est une inversion totale de la réalité. Israël est aujourd’hui un État robuste, économiquement prospère, technologiquement avancé, et politiquement stable malgré ses défis internes. Cette phrase est une pure tentative de victimisation fallacieuse.
L’idée d’une « image inversée de sa propre intolérance » est un cliché antijuif éculé, digne des pires stéréotypes. Israël est l’un des peuples les plus tolérants au monde, notamment par rapport à ses voisins, et cette accusation récurrente est à la fois infondée et profondément malhonnête.
Quant à la prétendue nécessité d’une OLP indépendante pour une paix possible, c’est un non-sens tragique. L’OLP, sous Arafat et ses successeurs, n’a fait que semer le chaos, encourager la violence, et s’opposer systématiquement à toute vraie négociation. Sa disparition politique serait une libération pour la région, pas une victoire des « forces aveugles ».
Ce texte ignore volontairement les responsabilités palestiniennes dans l’échec des processus de paix, la corruption et la répression interne, tout en diabolisant Israël et en légitimant la violence et le terrorisme sous couvert de « résistance ».
Il s’agit d’une propagande destructrice qui nuit autant aux Juifs qu’aux Arabes palestiniens, en perpétuant des cycles de haine, d’inaction, et de souffrance.
Deleuze ne comprend pas que parfois, on peut être responsable de sa propre disparition. Il fait de l’OLP une entité politique respectable. Arafat n’a cessé d’appeler au djihad contre Israël, sans jamais proposer de projet constructif concret. En mentant à l’international et en disant le contraire de ce qu’il pensait et affirmait localement, il a manipulé des naïfs comme Deleuze, qui ont voulu croire à ses mensonges, reprenant ainsi des discours anti-impérialistes, anti-coloniaux, antifascistes, voire nazis, mais toujours au détriment des Juifs — pas seulement en Israël, mais aussi en Occident, où ces discours ont contribué à alimenter la violence contre eux. Sous des airs de bienveillance, ces récits propagent en réalité une haine corrosive envers la seule démocratie véritable de la région, où, rappelons-le, même les Arabes vivent mieux qu’ailleurs dans le monde arabe. Cette ignorance ou cette volonté délibérée de dissimuler ces réalités participe à maintenir le conflit et à empêcher toute paix réelle.
Horreurs et exactions attribuées à l’OLP et aux groupes palestiniens au Liban
– Nicolas Carras

L’OLP et certains groupes palestiniens présents au Liban sont responsables de multiples violences et atrocités qui ont profondément marqué la région. Parmi les exactions les plus notoires figurent les massacres de civils chrétiens, notamment à Damour en janvier 1976, où entre 300 et 500 habitants furent tués de manière barbare — femmes violées, enfants assassinés, certains brûlés vifs dans des églises — dans une opération menée par le Fatah, Saiqa et d’autres factions palestiniennes alliées à des groupes islamo-gauchistes libanais.
D’autres attaques similaires ont visé des villages et quartiers chrétiens du Sud- Liban, s’inscrivant dans un climat de revanche et d’impunité. Par ailleurs, l’OLP utilisait le Sud-Liban comme base pour lancer des roquettes et organiser des incursions contre Israël, provoquant des représailles israéliennes.
En interne, l’OLP n’a pas hésité à réprimer violemment ses opposants, qu’ils soient palestiniens dissidents ou libanais, par des prisons secrètes, assassinats et tortures. La présence armée palestinienne a également contribué à la radicalisation des milices chiites et chrétiennes libanaises, notamment la montée d’Amal, qui a combattu l’OLP avec une extrême brutalité lors de la « guerre des camps » (1985– 1988).
Ces violences et erreurs stratégiques ont mené à l’intervention israélienne de 1982, justifiée en partie par la volonté d’éliminer la menace de l’OLP à Beyrouth.
Au final, ces exactions ont profondément entamé la légitimité de l’OLP, tant auprès des populations libanaises que palestiniennes au Liban, ternissant durablement son image régionale malgré son combat pour la cause palestinienne.
Face à cette histoire lourde de violences, l’aveuglement d’une partie des intellectuels français a été frappant. Au nom d’un tiers-mondisme romantique ou d’un anti-impérialisme abstrait, certains ont idéalisé l’OLP et sa figure tutélaire, Yasser Arafat, jusqu’à en faire un symbole quasi mythique de la « résistance », en passant sous silence les crimes, les dérives autoritaires et les stratégies cyniques. Gilles Deleuze lui-même a pu tenir des propos élogieux sur Arafat (Grandeur de Yasser Arafat*), comme si la cause suffisait à absoudre les moyens. Le paradoxe est d’autant plus fort qu’Arafat a été consacré sur la scène internationale par un prix Nobel de la paix, et célébré en France par de nombreux responsables politiques, médias et milieux culturels. Cette fascination révèle moins la réalité du Proche- Orient que les projections idéologiques occidentales : un besoin de héros, fût-il construit sur un déni des faits, et une difficulté persistante à regarder en face la complexité tragique et les violences internes du camp que l’on prétend défendre.
© Nicolas Carras

Nicolas Carras – Créateur (vidéo – son – photo), artiste, poète

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