Tribune Juive

La prétendue « innocence » des civils de Gaza. Par Dr Isaac Attia*

On entend beaucoup dans le discours public qu’il ne faut pas faire d’amalgame entre le Hamas et la population civile de Gaza. Il faudrait pouvoir distinguer entre les terroristes arabes résidant à Gaza qui font des incursions en Israël pour commettre des attentats contre des civils israéliens, et les parents de ces mêmes terroristes, résidant également à Gaza qui distribuent des bonbons dans les rues pour célébrer les attentats commis par leurs proches. En effet, il ne faudrait pas faire d’amalgame entre assassiner des civils et manger des bonbons en famille. Quelle que soit l’absurdité du déni sur cette question, il est important de peser les mots que l’on emploie, justement afin de ne pas faire d’amalgame et de bien différencier les termes « civils » et « innocents ».

Lorsque l’on parle « d’innocence » concernant les civils de Gaza, il faut d’abord distinguer les deux significations différentes du mot. Sur un plan juridique, cela veut dire « qui n’est pas coupable ». Donc il faudrait savoir si l’on peut dire que les civils de Gaza sont coupables d’actes terroristes ou de complicité de terrorisme ? Sur un plan littéral, cela veut dire « qui n’est pas dangereux, qui n’est pas nocif » (in-nocens). En ce sens il faudrait savoir si les civils de Gaza sont dangereux pour les Juifs même s’ils ne sont pas tous membres du Hamas ?

Dans l’ouvrage que j’ai eu l’honneur de coordonner avec les meilleurs spécialistes de la question (« Le livre noir du palestinisme », Edition Anael, Tel Aviv 2025), il est avéré  que la population civile de Gaza et le Hamas sont étroitement liés. Tout d’abord, sur le plan des organisations sociales et religieuses, les Arabes de Gaza sont depuis longtemps, avant même la création de l’Etat d’Israël, liés aux Frères musulmans. Et c’est la confrérie « palestinienne » des Frères musulmans qui devient officiellement le Hamas en 1987. En ce sens, le Hamas n’est que le prolongement d’une présence dominante de longue date dans la société civile de Gaza. Lorsque l’organisation terroriste OLP est exilée en Tunisie en 1982, le Hamas de Gaza va prendre le relais des activités terroristes avec une forte motivation islamique, et avec le soutien effectif de la population civile. L’intifada de 1988 qui se présente comme un mouvement populaire partant de Gaza va sceller cette alliance entre la population civile de Gaza et l’organisation du Hamas qui est désormais, à la fois, sociale, religieuse et militaire. Avec les élections de janvier 2006 donnant 74 sièges au Hamas contre 45 au Fatah, on voit se renforcer ce lien également sur le plan politique. Dire que les civils de Gaza sont « innocents » de toute collusion avec le Hamas est donc une contre-vérité. Et cela ne s’est pas modifié après les massacres du 7 octobre 2023 puisque tous les sondages continuent de témoigner du soutien de la population civile de Gaza au Hamas.

Concernant l’autre signification d’une prétendue « innocence » des civils de Gaza, à savoir une hypothétique « non nocivité » envers les Juifs, faisant de ces populations des victimes d’un conflit qu’ils ne veulent pas, je vais me rapporter à un ouvrage sorti, en français, en octobre 2025 : « Otage : 491 jours aux mains du Hamas » de Eli Sharabi, Edition Michel Lafon. Ce livre est le témoignage d’un habitant du kibboutz Beeri enlevé le 7 octobre 2023 et libéré le 8 février 2025. Il relate en détails son vécu, ses contacts avec les autres détenus dans les tunnels et avec leurs geôliers. Ce sont les auxiliaires du Hamas et parfois les membres du Hamas qui font l’objet de ce témoignage. Pourtant, les civils de Gaza sont bien présents dans ce récit, et même omniprésents, et leur capacité de nuisance parfois pire que celle des geôliers. Ce témoignage qui ne parle apparemment que du Hamas se trouve être la meilleure démonstration de la non « innocence » des civils de Gaza.

Lorsque Eli Sharabi arrive à Gaza, le 7 octobre, kidnappé par les terroristes du Hamas, il décrit la scène ainsi : « Je suis toujours enveloppé dans la couverture. Une immense agitation règne autour de nous. J’entends des cris d’une foule bruyante, extatique. Soudain des mains commencent à s’agripper. D’innombrables mains. On me précipite dans un océan de gens qui se mettent à me taper sur la tête. Ils crient. Ils se battent pour se saisir de moi. Ils jurent, ils me sifflent. J’ai le cœur qui s’emballe, la bouche sèche. Je peux à peine respirer. C’est fichu pour moi. Les terroristes du Hamas tentent de repousser la foule. Ils doivent employer les grands moyens. Ils arrivent à m’arracher à elle, m’entraînant et, à la dérobée, me font entrer dans une maison » (page 19). 

Maintenu prisonnier et caché dans un appartement, pour Eli Sharabi la foule gazaouïe reste une menace et, paradoxalement, ce sont ses geôliers qui veillent à le garder vivant comme monnaie d’échange. « Notre étage n’a pas fini d’être bâti : il reste des ouvertures dans les murs extérieurs. Le Masque et le Nettoyeur (ses geôliers) y tendent des toiles, de peur que quelqu’un nous voie du dehors. J’ai la même inquiétude, vu ce qui s’est passé à notre arrivée. Le Masque, le Nettoyeur et la famille (chez qui il est retenu prisonnier) ne sont pas là seulement pour m’empêcher de m’enfuir ; ils doivent aussi me protéger contre quiconque voudrait me faire du mal » (page 34). Cette menace omniprésente des civils de Gaza est particulièrement accrue lorsque les otages passent d’une cache à une autre, d’un appartement à un autre, d’un tunnel à un autre. « Comme chaque fois qu’on se retrouve à l’extérieur, j’ai peur. Les rues ne sont pas vides. Il y a des gens qui circulent, bien qu’on soit au beau milieu de la nuit. Avec le cessez-le-feu entré en vigueur, l’animation bat son plein. Je crains qu’on nous repère. Je me souviens qu’on a évité de peu de se faire lyncher le 7 octobre. Dans sa rage, la foule enfiévrée a voulu m’étriper et les terroristes du Hamas ont dû se battre pour me dégager. La voiture a des vitres tintées et nos ravisseurs nous ordonnent de garder nos capuches et de baisser la tête, pour rester entièrement cachés. On se serre sur la banquette arrière, et la voiture démarre » (page 189).

Ce déchaînement de haine et de violence de la foule gazaouïe qui n’a rien d’une manifestation pacifique ni d’une preuve « d’innocence », au sens littéral du terme, tous ceux qui ont assisté aux libérations des otages ont pu en être témoins. Eli Sharabi raconte la façon dont il a vécu sa propre libération. « Je savais, parce qu’Ohad m’a prévenu, qu’il y aurait beaucoup de monde. Et pourtant, je suis stupéfait de voir une telle quantité de personnes. Je n’en reviens pas de leur exaltation, de l’excitation dans l’air, de l’appétit de nous voir et de s’approcher de nous. La tension est palpable. Les terroristes du Hamas nous disent de ne pas avoir peur, ils vont nous protéger. Avant qu’on ne sorte de la voiture, ils forment une barrière de sécurité entre nous et la foule déchaînée. Dans ces moments, comme chaque fois qu’on sort des tunnels pour se retrouver dehors, dans la rue, les membres du Hamas sont les « gentils ». Ce sont nos piliers, nos boucliers. Ils sont là pour qu’on se sente en sécurité. On sait que sans eux, absolument tous les spectateurs dans cette foule se jetteraient sur nous pour nous lyncher » (page 208).       

Les images fabriquées et les faux récits de la propagande « pro-palestinienne » que les médias relaient avec complaisance ne tiennent compte ni des données avérées d’une collusion entre le Hamas et la population civile de Gaza (cf. Le livre noir du palestinisme), ni des témoignages de ceux qui sont ressortis miraculeusement vivants après plus de seize mois passés dans cet enfer (cf. Otage : 491 jours aux mains du Hamas). Ayant construit le mythe d’un peuple martyre, ils continuent de propager celui d’une population civile « innocente » et pacifique qui subirait la tyrannie d’une organisation terroriste et islamique qui leur serait étrangère. La vérité c’est que les civils de Gaza ne sont pas « innocents », dans tous les sens du terme ; ils sont bien « coupables » de collusion avec le Hamas et « dangereux » pour l’existence des Juifs.

© Dr Isaac Attia

* Dr. Isaac Attia est Historien et Sémiologue, ancien Enseignant et Chercheur à l’Institut Yad Vashem de Jérusalem, co-auteur et coordinateur du « Livre noir du palestinisme ». Cet ouvrage collectif est préfacé par le Ministre de la Diaspora et de la Lutte contre l’Antisémitisme Amihaï Chikli, et co-écrit par Bat Yéor, Shmuel Trigano, André Darmon, Pierre-André Taguieff, Ephraïm Herrera, Yana Grinshpun, Georges-Elia Sarfati, Richard Darmon, Yves Mamou, Catherine Stora, Yéochoua Sultan, Léon Rozenbaum et Brigitte Ullmo-Bliah. En Israël, le livre est en vente dans toutes les librairies Steimatsky. Pour une conférence dédicace sur le livre : ivriout@gmail.com. Pour commander le livre : lelivrenoirdupalestinisme@gmail.com.

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