Tribune Juive

Les Haredim : fardeau ou pilier invisible ? Par David Germon

Enquête sur une réalité bien plus complexe qu’on ne le dit

Dans le débat public israélien, les Haredim sont souvent décrits à travers un prisme binaire :
« Ils ne travaillent pas »,
« Ils refusent l’armée »,
« Ils vivent aux dépens de l’État ».

Ces affirmations frappent fort.
Elles frappent surtout à côté.

Dès qu’on examine les données économiques, sociales et sécuritaires, on découvre une réalité bien plus nuancée — et un enjeu national d’une ampleur rarement discutée avec honnêteté.


🟦 1. Emploi : une société plus active qu’on ne le croit

Les chiffres officiels contredisent le cliché du “Haredi qui ne travaille pas”.

Selon le CBS et des analyses socio-économiques récentes :

Derrière la caricature d’une société fermée, on trouve une mosaïque de professions :
développeurs, comptables, enseignants, agents immobiliers, infirmières, entrepreneurs, avocats, graphistes.

Les défis restent réels — salaires plus bas, productivité masculine limitée — mais la tendance est claire: l’intégration professionnelle progresse.


🟦 2. Contribution fiscale : un angle mort du débat

Même les familles modestes contribuent massivement via :

Les familles nombreuses haredies — très consommatrices — alimentent de fait une part significative des recettes nationales, même lorsque leur revenu imposable est faible.


🟦 3. Aides de l’État : bien moins que ce que l’on imagine

✔️ Allocations familiales

Montants identiques pour tous les citoyens israéliens, sans distinction de secteur.
Une famille nombreuse touche environ 1 150 ₪ par mois.

✔️ Subventions de garderie

Uniquement pour les couples où les deux parents travaillent ou étudient dans un cadre reconnu.

✔️ Bourses de kollel

La part étatique directe tourne autour de 750 ₪ par étudiant, le reste provenant de dons privés.

La réalité est donc éloignée du narratif selon lequel “l’État finance massivement les Haredim”.


🟦 4. Éducation et culture : un coût renversé

Les données du Taub Center révèlent un fait peu discuté :

Le public haredi profite également très peu des budgets universitaires et culturels, alors même qu’il les finance via la TVA.

Ce paradoxe interroge :
👉 les Haredim financent aussi des secteurs qu’ils n’utilisent presque pas, du cinéma aux universités, en passant par les festivals, les infrastructures culturelles et même la Gay Pride.


🟦 5. Responsabilité du leadership : des critiques venues de l’intérieur

Une dimension rarement rapportée concerne les critiques internes exprimées par des responsables communautaires, éducateurs et acteurs sociaux du secteur haredi.

Selon eux :

Ce débat interne, bien réel, est souvent invisible pour le grand public.


🟦 6. Sécurité nationale : la démographie change tout

La croissance du public haredi n’est pas perçue comme une menace par ces acteurs — au contraire :

« C’est une berakha. Mais une berakha qui oblige. »

À mesure qu’une part croissante de la jeunesse juive devient haredie, Israël ne peut plus se permettre que ce segment reste en marge de la défense nationale.

Les enjeux concernent :

Ce n’est plus seulement une question “d’égalité”.
👉 C’est une question de survie sécuritaire.


🟦 7. Tsahal : une participation discrète mais réelle

Contrairement au mythe du “zéro engagement”, plusieurs cadres militaires existent pour accueillir des jeunes haredim :

Parallèlement, de plus en plus de Haredim servent dans :

Les critiques internes reconnaissent que l’armée n’est pas “parfaite” pour un public religieux strict :
pression sociale, défis halakhiques, manque de cadres adaptés.
Mais elles ajoutent :

« Personne n’a le luxe de dire : ce n’est pas confortable. Tout le monde paye un prix dans Tsahal. »


🟦 8. Un changement silencieux : l’émergence des “Haredim modernes”

Un grand sondage national mené entre février et mai 2024 révèle un phénomène majeur :

✔️ l’apparition d’un groupe de “Haredim modernes”, issus de tous les courants (lituaniens, hassidiques, sépharades).
✔️ Ils comprennent l’enjeu national du service.
✔️ Ils expriment un sentiment croissant de responsabilité citoyenne.
✔️ La guerre a créé un rapprochement inédit : aides volontaires aux soldats, assistance aux familles évacuées, solidarité civique.

L’équipe du sondage conclut :

« Le changement durable ne viendra pas seulement de la loi. Il nécessite un travail social, éducatif et culturel profond. »


🟦 Conclusion

Les Haredim ne sont pas un fardeau

Ils sont un acteur central de l’avenir d’Israël.

Les caricatures collapsent face aux faits :

La question n’est donc plus :
“Les Haredim sont-ils un fardeau ?”

Mais plutôt :
👉 Comment Israël peut-il construire un partenariat national durable avec un public qui deviendra bientôt un quart de la population juive ?

© David Germon 
Jerusalem

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