Le Benêt Vertueux – N° 003
Rubrique : Catéchisme républicain & autres pieuses idioties
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« On ne discute pas une décision de justice ! » — Vraiment ?
Par Paul Germon
Où l’on découvre que la soumission à la Loi est souvent le masque de la paresse de l’esprit.
Il y a des phrases qui sentent la poussière du Palais, le formol du catéchisme civique et la servilité mondaine.
« On ne discute pas une décision de justice » en fait partie.
Elle sort d’ordinaire de la bouche d’un politicien pris la main dans le pot de confiture morale,
ou d’un chroniqueur à deux neurones qui confond respect de la loi et soumission de la pensée —
surtout lorsque cette pensée appartient à un bord qui se réjouit du verdict.
Car le vrai miracle judiciaire, pour ces croyants sélectifs,
n’est pas que la justice passe : c’est qu’elle passe dans le bon sens.
Quand le juge confirme leurs certitudes, ils crient à l’État de droit ;
quand il les contredit, ils hurlent au complot.
C’est la justice à géométrie morale : une religion de circonstance.
On ne discute pas ? Mais alors, que reste-t-il de la démocratie ?
Le droit d’appel, le droit de critique, le droit de rire des juges quand ils se prennent pour Moïse sur le mont Sinaï ?
L’Histoire est pleine de verdicts honteux que personne n’aurait osé contester si ce dogme imbécile avait prévalu :
Galilée, Dreyfus, les Justes jugés coupables, les coupables blanchis par connivence.
Le « on ne discute pas » est la liturgie préférée des paresseux de la raison.
Ils psalmodient leur catéchisme républicain comme d’autres récitent le chapelet : sans comprendre, mais avec componction.
C’est la prière des gens qui ont peur de penser, ou peur de déplaire à ceux qui pensent à leur place.
Oui, on exécute une décision de justice, parce qu’un pays sans règles deviendrait une jungle.
Mais on a le devoir de la discuter, parce qu’un pays sans débat devient une étable.
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– « Le mot du Benêt Vertueux »
Les perroquets répètent : « On ne discute pas une décision de justice ».
Les citoyens, eux, la lisent, la questionnent et parfois la corrigent.
Car la justice qu’on adore finit toujours par se croire divine —
et c’est alors que meurt la liberté qu’elle prétend servir.
© Paul Germon
