Tribune Juive

Le laxisme judiciaire en France et l’idéologie qui le sous-tend. Par Frédéric Sroussi

« Tu institueras des juges et des policiers dans toutes les villes que l’Éternel, ton Dieu, te donnera, dans chacune de tes tribus ; et ils devront juger le peuple selon la justice […]

C’est la justice, la justice seule que tu dois rechercher.»

(Deutéronome 16:18-20)

Face aux pires crimes et délits perpétrés par des multirécidivistes, face au laxisme absolu de juges qui ont de plus en plus tendance à « faire la loi » plutôt qu’à l’appliquer – empiétant allègrement sur les plates-bandes du pouvoir législatif -, le peuple français considère de plus en plus « son » système judiciaire avec une défiance grandissante. 

La remise en cause des différents pouvoirs par des sociétés occidentales de plus en plus méfiantes à l’égard de ces derniers (qu’ils soient judiciaire, législatif ou exécutif), a eu comme conséquence, non pas de saper ces pouvoirs qui restent puissants, mais plutôt de les mettre en concurrence. L’idée originelle de Montesquieu était pourtant de promouvoir l’interaction de ces trois pouvoirs afin d’aboutir à « l’unité fondamentale de l’État » (Gérard Mairet).

C’est donc cette unité fondamentale que nous avons perdu avec la mise en œuvre de ce que je nomme l’esprit concurrentiel au sein des différents pouvoirs. Mais, le pouvoir judiciaire est devenu le plus dangereux car il n’a jamais à répondre devant le peuple de ses décisions (à la différence des pouvoirs législatif et exécutif). Le péril est d’autant plus grand que les juges eux-mêmes se sentent investis d’une mission (au sens sacré du terme). Lorsque l’on demanda à l’historien Jean-Luc Pouthier (spécialiste du fait religieux contemporain), dans quel cadre l’idée chrétienne de rédemption pouvait encore se trouver à notre époque, il répondit sans hésitation : « Dans le système judiciaire actuel ». C’est la fameuse « deuxième chance » (devenue parfois trentième chance ! ) offerte aux délinquants et aux criminels par ces juges qui se prennent pour Saint Louis rendant la justice sous son chêne (dont la statue se trouve d’ailleurs au Palais de justice de Paris).  

Nietzsche l’avait compris avant tout le monde lorsqu’il écrivit dans Généalogie de la morale que : « (L)’ autosuppression de la justice : on sait de quel beau nom on l’appelle —- la grâce ; elle reste, cela va de soi, le privilège des plus puissants, mieux encore, leur par-delà le droit. » 

Il existe donc bien une laïcisation des valeurs religieuses chez nombre de magistrats qui favorisent leur « idéal » au détriment du droit. Nous pouvons dire que ce n’est plus au « nom du peuple français » que la justice est rendue, mais plutôt au nom d’idéologies (tiers-mondisme, wokisme, progressisme, etc.) dont ces magistrats autocrates et mégalomanes sont les adeptes. Si la source du pouvoir des juges est politique (dans le sens où c’est la Constitution qui le désigne comme tel ¹ ), la politique – au sens de l’adhésion à une idéologie ou un parti – devrait être totalement bannie de toute décision judiciaire. Nous constatons que ce n’est pas le cas. 

Nous en avons déjà esquissé l’idée supra : le problème émane évidemment des juges qui – tel les membres du Syndicat de la magistrature – n’hésitent pas, par exemple, à appeler publiquement à voter pour une coalition d’extrême gauche et de gauche (comme ce fut le cas lors des dernières élections législatives) violant ainsi leur devoir de réserve et l’impartialité de la justice. 

Les magistrats ne sont certes pas les seuls responsables (même s’ils sont les plus coupables) de tous les maux de cette justice qui méprise les victimes en se donnant la mission de sauver les « brebis égarées », surtout quand elles viennent des « banlieues » ; les politiques aussi doivent répondre de ce fiasco social. L’exécutif ne construit pas assez de prisons et les ministres de la justice ne sont pas les derniers à défendre la culture de l’excuse ou à nier la gravité du problème sécuritaire (Taubira, Dupond-Moretti, Belloubet même si les choses ont changé avec Gérald Darmanin). Quant au pouvoir législatif, il a eu tendance à voter des lois qui bénéficient dans le domaine pénal toujours plus à l’accusé, et toujours moins à la victime. 

Dès lors, quid du Contrat social par lequel l’autorité politique assure au peuple la sécurité en échange d’une limitation de sa liberté ? Si le pacte est rompu, le peuple se verra dans l’obligation, pour survivre, de reprendre sa sécurité en main… 

Il existe un débat au sein de la justice entre les juges qui priorisent les droits politiques (sécurité) face à ceux, les  «progressistes», qui avantagent les droits individuels (droits de l’homme). Ce sont les juges qui priorisent les droits politiques qui assurent pourtant « la sauvegarde de la Cité – (de la) sûreté et (de l’) ordre public […]. ² . Ce sont évidemment les « progressistes » qui ont gagné le « match » au sein de la magistrature… 

On le voit, la tendance des juges « activistes », donc des juges de gauche, favorise largement – de par leur idéologie « droit-de-l’hommiste» – les droits individuels au détriment des droits politiques. Ceci pourrait avoir sa nécessité dans une dictature, mais certainement pas dans une démocratie (que les juges tendent à rendre caduque !) où ce parti pris idéologique favorise trop souvent les « droits » d’individus qui ne respectent pas les lois édictées par la volonté générale du peuple souverain.  

© Frédéric Sroussi 

¹  Guy Canivet 

² Pour une théorie des  » cas extrêmes  » ; aux limites du pouvoir juridictionnel, éditions Rue d’Ulm 

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