
Le 15 novembre dernier sur une chaîne d’infos, un individu quelque peu exalté, aux idées rances, nous replongeait dans une anglophobie qu’on croyait oubliée depuis 1945.
Ce soir-là, Richard de Seze, directeur à Radio Courtoisie, venait faire la promotion de son livre dont ni le titre ni le contenu n’ont d’autres intérêts que de prouver l’existence d’un wokisme d’extrême droite qui tend à réécrire l’histoire – comme le wokisme originellement de gauche le fait – selon sa propre idéologie.
Ainsi, Richard de Seze n’hésita pas lors de cet entretien à comparer Churchill à Hitler (!), voire à faire passer – toute honte bue – l’homme qui se battit seul jusqu’en 1941 contre le nazisme pour le précurseur du chef du IIIème Reich. La quasi-concomitance de l’intervention de M. de Seze avec le scandale provoqué la veille à Verdun par une messe donnée «en hommage au maréchal Pétain », où ce dernier était qualifié de « premier résistant de France », n’avait beau être que pure coïncidence, il n’empêche que ces deux faits résonnaient comme le symbole d’un mouvement de fond au sein de l’extrême droite.
Je parle évidemment ici de la véritable extrême droite, celle qui veut faire revivre principalement la mémoire de Charles Maurras et de l’Action française.
Venons-en aux propos mêmes de l’auteur de ce livre ; il déclare lors de cette interview que l’« Angleterre est l’ennemie de la France » en regrettant que la tradition de « l’Anglais comme adversaire ne soit plus transmise dans les familles françaises ». Il ajoute : « Quand les Anglais vous disent « oui », ils ont déjà décidé de vous escroquer ». En bon wokiste (d’extrême droite), Richard de Seze veut « déconstruire le mythe du gentleman anglais » (c’est vrai qu’il y avait certainement urgence à le faire…). Le « gentleman anglais» aurait été « une espèce invasive…qui écrase les cultures locales ». Mais, je reviens sur ses attaques les plus folles et les plus ridicules qui furent portées à l’encontre de Sir Winston Churchill qu’il traite de « propagandiste fou de l’eugénisme social le plus radical (…) qui voulait embastiller ceux qu’il considérait comme des débiles dans des camps de concentration » (comme si le souvenir du héros anglais pouvait se résumer à quelques écrits de jeunesse restés lettre morte ! De plus, le terme de « camps de concentration » est une insulte faite à la mémoire de ceux qui périrent dans les camps nazis).
Ajoutant : « Churchill est un raciste qui a lutté contre un autre raciste : Hitler ». Le pire fut peut-être le moment où il tenta même de faire passer l’ancien Premier ministre anglais pour le précurseur d’Hitler ! Richard de Seze traita en effet Churchill de « monstre aux projets eugénistes » qui aurait « justifié l’eugénisme des nazis », osant ajouter : « Il faut rendre à Churchill ce que Hitler lui a pris »… Nous fûmes les témoins d’un révisionnisme historique totalement abject. Étrangement, M. de Seze se trompe totalement de cible puisque ce triste sire oublie de dire que si un Anglais fut en effet une influence pour le nazisme, son nom n’était certainement pas Winston Churchill, mais Houston Stewart Chamberlain (à ne pas confondre avec Neville Chamberlain qui précéda W. Churchill comme Premier ministre britannique, et qui signa les accords scélérats de Munich en 1938 avec Hitler, Daladier et Mussolini).
Le directeur de Radio Courtoisie ne cita jamais ce nom et pourtant H.S Chamberlain fut un théoricien raciste et eugéniste foncièrement antisémite qui fut un des rares auteurs qu’Hitler cita nommément dans Mein Kampf comme le rappelle l’historien Roman Töppel. Ce dernier écrivit que « l’un des « point(s) commun(s) entre Hitler et Chamberlain (fut) l’affirmation selon laquelle les princes sont coupables du déclin des peuples parce qu’ils se seraient jadis alliés avec les Juifs. » Bizarrement, M. de Seze ne cite pas H.S Chamberlain comme source (pourtant bien réelle celle-là !) de l’idéologie eugéniste et raciste (antisémite) du nazisme. Rappelons que la cible numéro un de Chamberlain était les Juifs ; est-ce pour cette raison que ce théoricien raciste (pourtant né anglais) bénéficie d’une certaine clémence ? Je ne saurais l’affirmer bien sûr.
N’oublions pas que, lorsqu’en 1941 les partis collaborationnistes français décidèrent de se réunir pour former la Légion des volontaires français contre le bolchévisme (LVF), l’un des buts avoués de cette organisation putride était de lutter contre la « ploutocratie anglo-juive » afin « d’assurer la renaissance française dans le cadre de la nouvelle Europe socialiste » (Le Matin ; 10 octobre 1941). Nous voyons en quoi les propos fielleux anglophobes de M. de Seze peuvent être rapprochés d’une lignée idéologique particulièrement nauséabonde. Insistons sur les termes « ploutocratie anglo-juive (sic)» et « Europe socialiste»…
Ce qui est ironique, c’est que lors de la folie collective qui saisit le monde occidental après la mort du repris de justice américain George Floyd, les wokistes anglais allèrent jeter des pots de peinture sur la statue de Winston Churchill traité de « colonialiste », tout comme le fait M. de Seze.
Un wokisme d’extrême droite existe donc en France, et sur bien des points il rejoint quant à ses cibles le wokisme originel de gauche.
Mon propos n’est pas de dédouaner l’Angleterre de ses fautes criminelles concernant par exemple le blocus militaire mis en place contre les bateaux de réfugiés juifs allemands tentant de se sauver du monstre nazi en essayant d’atteindre la Terre d’Israël, mais de mettre en lumière l’existence d’un wokisme d’extrême droite de type maurassien qui expose des thèses que l’on croyait à jamais tombées dans les oubliettes sinistres de l’histoire.
© Frédéric Sroussi

J’ai rencontré Richard de Sèze, un peu par hasard, il y a quelques années et je découvre cet article. Il me semble qu’aujourd’hui de plus en plus d’individus n’habitent plus leurs idées et ne cherchent qu’à se faire remarquer en brandissant les idées les plus farfelues, les plus provocatrices, en profitant de tous les supports médiatiques à leur disposition. Une consolation : ces individus font du bruit un jour et sont très vite oubliés. D’autres prennent leur place et sont aussi vite oubliés.
Bonjour Monsieur,
Pourquoi il n’y a pas de « wokisme d’extrême droite »…
Vous avez écrit aussi : « …Je parle évidemment ici de la véritable extrême droite, celle qui veut faire revivre principalement la mémoire de Charles Maurras et de l’Action française. … »
La droite, c’est le conservatisme, donc l’extrême droite, serait un conservatisme extrême…
Problème : le conservateur veut préserver un ordre existant, stabiliser, adapter prudemment, maintenir les libertés concrètes, limiter l’État, laisser vivre les corps intermédiaires, se méfie des utopies.
Le réactionnaire veut rétablir un ordre disparu, mobiliser l’État pour imposer une vision totale de la société, reconstruire un passé imaginaire, souvent avec un rapport très volontariste au pouvoir.
Le conservateur est prudent, empirique, réaliste. Le réactionnaire est volontariste, constructiviste, autoritaire.
C’est là que Maurras penche clairement vers… la gauche jacobine, pas vers la droite conservatrice.
Maurras est clairement un utopiste, un utopiste réactionnaire. Ce n’est pas l’utopie progressiste tournée vers l’avenir, mais une utopie projective, qui reconstruit un passé idéalisé, n’existant pas tel qu’il est décrit, et en fait un modèle total. Le “royaume” maurrassien n’a jamais existé !
C’est une fantasmagorie utopique.
Et l’antisémitisme radical de Maurras rend impossible toute filiation avec le conservatisme.
L’antisémitisme n’a jamais été un trait conservateur.
Il ne faut pas confondre réactionnarisme, réactionnarisme extrême, et conservatisme, conservatisme extrême…
Les mots on un sens.
Et ça n’a rien à voir d’un point de vue de la philosophie politique.
Ça n’est pas du conservatisme. Donc ça n’est pas a droite. C’est du réactionnarisme idéologique, avec des mécanismes empruntés à la gauche jacobine et aux utopies politiques modernes.
Et la droite conservatrice réelle a largement rejeté Maurras.
Aron a très bien vu a nature anti-conservatrice de Maurras.
Comme François Furet, historien plus que penseur politique, son analyse du jacobinisme montre que Maurras est une branche du radicalisme révolutionnaire inversé, pas du conservatisme.
A++
Au même titre que l’islamisme, le wokismeet est par essence d’extrême-droite, comme cela a depuis longtemps été démontré par ceux qui en ont compris la nature. Le profond manque d’intelligence politique de notre époque et de nos sociétés se fait de plus en plus cruellement sentir. La France et l’occident ont régressé intellectuellement, c’est indiscutable et les analystes (qui n’analysent rien) les plus bêtes tendent à monopoliser l’espace public. Même le choc du 7 octobre n’a pas provoqué de réveil : c’est tout l’inverse, semble-t-il.