
1) Au Soudan, les effroyables récits des survivants des massacres d’el-Fasher. Par Bastien Massa
Les Forces de soutien rapide ont pris le 26 octobre la dernière grande ville du Darfour qui échappait à leur contrôle. Les récits d’exactions se multiplient, vérifiés par les vidéos tournées par les combattants.
Nous avons marché pendant dix heures, les pieds en sang, griffés par les ronces. La route était, elle, jonchée de cadavres », raconte Amira*, la voix brisée. Le dimanche 26 octobre, entraînant ses quatre enfants, elle fuit el-Fasher pour Korma à quarante kilomètres de là. Le matin même, les Forces de soutien rapide (FSR) dirigées par le général Mohammed Hamdan Dagalo, plus connu sous le nom de Hemedti, avaient commencé à prendre d’assaut la capitale provinciale du Darfour du Nord. Dernier bastion de l’armée soudanaise dans la région, la ville tombe en quelques heures aux mains des FSR.
« Il y avait de nombreux soldats en chemin. Dès qu’ils voyaient un homme, ils le tuaient. Nous avons vu des gens devant nous en tuer deux avec un couteau. Plus loin, un autre groupe, habillé comme les FSR, nous a volé tout ce qu’il nous restait. Maintenant, mon fils se réveille la nuit en tremblant de peur, hanté par ces images », reprend cette travailleuse sociale, contactée au téléphone.
À Tawila, où Amira a finalement trouvé refuge, les récits des habitants d’el-Fasher – eux aussi contactés au téléphone – dressent un tableau infernal. Dans la bouche des rescapés acceptant de témoigner, l’horreur des viols collectifs rivalise avec celle des colonnes de civils fauchées par des miliciens postés le long du talus de 50 kilomètres construit durant le siège pour encercler la ville. « La plupart des gens qui arrivent ont subi des violences. Nous avons recensé 150 cas de violences sexuelles, 1 300 blessures par balle et 750 enfants arrivés à Tawila sans leur famille », liste méthodiquement Adam Rojal, porte-parole des déplacés de Tawila.
2) En Cisjordanie, la récolte des olives emportée par la violence. Par Stanislas Poyet
Les attaques de colons israéliens atteignent un record : 70 % des oliveraies seraient inaccessibles.
Umm Saleh peine à se déplacer entre les oliviers. Il n’est que 9 heures, ce 19 octobre, mais son diabète la fait déjà souffrir. La récolte des olives bat son plein, et ce matin, en compagnie de sa famille, elle arrache patiemment les fruits noirs des branches basses pour les faire tomber sur la bâche étendue autour du tronc. Quand des cris éclatent à l’autre bout du champ, Umm Saleh est incapable de courir. Un petit groupe de colons masqués descend la colline, armés de manches de pioche et de pierres. L’un des assaillants s’approche d’elle, brandit un gourdin et la frappe violemment à la tête. Umm Saleh s’effondre. L’homme lève encore son bras et lui assène un second coup avant de s’éloigner en courant. La scène a été filmée par un journaliste américain venu documenter la récolte. Transportée d’urgence à l’hôpital de Ramallah, Umm Saleh est opérée pour une hémorragie cérébrale.