I Temponi !
Un lieu magique dans un village de Castagniccia, en Corse : Pietra di Verde.
I temponi : Littéralement on peut le traduire par parois rocheuses, grands rochers.
C’est un lieu de promenade pour les familles, les amoureux, les amis et les gens de passage puisque de toute façon nous le sommes tous.
Le marqueur du village, une sorte de petite frontière sentimentale qui surplombe la vallée d’Alisgiani, somptueuse encoche où pénètre l’âme de la Corse.
Inutile de vous dire que tout le monde y va, surtout le soir en été, pour admirer la vallée, le barrage en contrebas et cette magnifique ouverture vers la mer, au-delà du village de Chiatra où par beau temps, on peut voir l’île de Monte-Cristo et se rappeler Alexandre Dumas et le combat d’Edmond pour la liberté.
En même temps, on peut plonger son regard dans l’immensité de la sombre vallée, interroger ses méandres et se sentir si petit face à ses montagnes, ses masses noires qui rebondissent d’un flanc à l’autre de ce sillon creusé par le temps.
Caressée par l’aura bienveillante de la lune et étourdie par cette présomption de l’univers inscrite dans son ciel étoilé qui abrite depuis toujours une vie corse pure et austère, la nuit a tout recouvert pour que nos yeux se perdent dans l’infini.
Et là, face à cette formidable puissance de la nature, les Corses ont élevé une croix !
Comme toutes les autres croix que les Corses ont dressées près de leurs villages, sur leurs montagnes et dans leurs cœurs, elle fait partie intégrante du paysage.
Depuis que je suis enfant, cet espace et les sensations qu’il procure sont ancrés dans mes souvenirs.
Cette croix pointée vers le ciel au-dessus des montagnes et des vallées comme un rappel bienveillant aux valeurs humanistes et universelles associant ainsi dans le même pas un instant simple et fugace de plaisirs familiaux ou amicaux aux plus hautes valeurs de l’humanité, est posée là, face à une nature sublime qui, dans le même langage, renvoie l’homme à sa nécessaire humilité.
Elle, n’est pas en plus ! Elle est la Corse comme le maquis, la montagne, la mer ou les toits de Lauze en Castagniccia !
Jamais, au grand jamais, il ne nous serait venu à l’idée, à nous, Juifs corses, que ce symbole religieux qui fait partie intégrante de la ligne d’horizon de notre Île devrait être abattu au nom d’une laïcité mal comprise ou seulement être remis en question.
Depuis 1905, elle n’a jamais fait problème. Pourquoi faudrait-il qu’aujourd’hui cela en soit ainsi ? Qu’est-ce qui a changé tout d’un coup ? Que s’est-il passé ces 20 dernières années pour que ce qui était une évidence devienne une provocation qui gêne certaines personnes?
Aujourd’hui elle fait débat pour certains, non pas pour des raisons de laïcité, celle-ci n’est qu’un prétexte, mais pour effacer l’histoire.
Ceux qui aujourd’hui attaquent ce symbole font par ailleurs la promotion des signes religieux d’une autre culture et nous expliquent qu’ils peuvent se multiplier partout dans l’espace public sous prétexte qu’ils sont portés en vêtement par les femmes notamment !
Alors quoi ? Les Chrétiens pourraient se dessiner d’immenses croix sur leurs manteaux ? Ça ça se serait bien et tellement laïque ?
Qu’ils le veuillent ou non, la Corse a une histoire, elle ne vient pas d’émerger des flots !
Ces croix disposées bien souvent à l’entrée et à la sortie d’un village ou sur une montagne ne sont pas là pour conquérir un pays étranger de culture différente mais pour rappeler partout le sacrifice d’un Juif martyrisé et tué par les armées d’occupation romaines dans la ville juive de Jérusalem !
Ça aussi c’est l’histoire, et ces deux histoires convergent en Corse encore plus qu’ailleurs ! Et Cette convergence a un nom : la civilisation judéo-chrétienne.
© Frédéric Joseph Bianchi
Président de l’association TERRA ERETZ CORSICA ISRAËL