Tribune Juive

Le Barreau de Tunis célèbre le massacre pour complaire au Président dictateur. Par Paul Germon

On croyait avoir tout vu, tout entendu.

Mais voici que l’Ordre national des avocats de Tunisie, censé défendre le droit et la dignité humaine, célèbre avec componction « le deuxième anniversaire du Déluge d’Al-Aqsa ».

Une « épopée héroïque », dit le communiqué.

Une « résistance vaillante ».

Traduction : le massacre de civils israéliens, de bébés, de vieillards et de jeunes gens enlevés dans leurs kiboutzim devient un épisode glorieux, presque une fête nationale.

Tamponnée, signée, et diffusée fièrement au nom de la profession d’avocat.

Qu’on se le dise : le 7 octobre 2023, selon le Barreau de Tunis, n’a pas été un jour d’horreur mais de renaissance.

Les violeurs, les égorgeurs et les preneurs d’otages deviennent des héros de la liberté.

Et leurs victimes ? Rien. Pas un mot, pas un silence, même pas un frisson d’humanité.

On remercie les « martyrs », on invoque la « profondeur arabe et islamique », on condamne « l’ordre mondial inique » et l’on appelle à « intensifier la résistance » – autrement dit, à recommencer.

Les mêmes bouches qui citaient jadis Voltaire, Bourguiba ou le droit romain récitent aujourd’hui le catéchisme du Hamas.

Sous la robe noire, plus de toge que de conscience.

Sous le sceau du Palais de justice, plus de justice que de haine.

Imaginez un instant le Barreau de Paris saluant les auteurs du Bataclan comme des héros anticoloniaux.

Scandale planétaire, dissolution immédiate, infamie éternelle.

Mais à Tunis, c’est différent : la morale est à géométrie coranique, la compassion sélective, la barbarie folklorique.

Et pourtant – ironie des ironies – ces mêmes avocats plaident souvent, la main sur le cœur, pour les droits de l’homme, contre la censure, pour la démocratie.

Ils oublient simplement que l’homme, le vrai, n’a pas de passeport.

Ils oublient qu’il n’y a pas de droit quand le crime devient fête, ni de justice quand la robe s’agenouille devant le sang.

Le Président qui s’est pris pour la Tunisie

Car derrière cette mascarade se dresse l’ombre épaisse du Président Saïed.

Professeur de droit devenu monarque d’opérette, élu pour présider et non pour régner, il a confisqué tous les pouvoirs comme un étudiant garde un stylo volé.

Les juges tremblent, les députés se taisent, les opposants remplissent les prisons.

Il vient même de condamner à mort un citoyen coupable d’avoir publié sur Facebook les raisons de sa colère.

Oui, à mort.

Les magistrats sont terrorisés, les avocats rampent, et le Barreau de Tunis, autrefois fier, s’est fait le porte-voix du dictateur.

Saïed, lui, s’enflamme contre les Juifs chaque fois que sa politique échoue : « Alla khatar liyoud ! » — c’est la faute des Juifs !.

Le vieil antisémitisme de bazar tient lieu d’idéologie, et les robes noires se pressent pour applaudir.

Ils ont rédigé le texte que le Président voulait lire, conscients ou résignés, peu importe : la peur se camoufle toujours sous le vernis du patriotisme.

L’héroïsme de salon

Plus les pays arabes sont loin du champ de bataille, plus ils se découvrent des ardeurs guerrières.

La haine y pousse comme l’herbe du désert : sans racines mais tenace.

Depuis Tunis, Alger, Doha ou Amman, on célèbre le « Déluge d’Al-Aqsa » comme on regarde un film d’action : confortablement assis, le pop-corn à la main, sur les ruines des autres.

Ils n’ont jamais vu Gaza.

Ils n’ont jamais entendu une sirène ni couru vers un abri.

Mais ils vocifèrent plus fort que tous, exigeant la guerre jusqu’au dernier Gazaoui — ou plutôt jusqu’au dernier Israélien, puisque c’est toujours le sang juif qui les excite.

Ils n’ont rien à craindre, et c’est pourquoi ils osent tout.

Pas de frontières avec Israël, pas de missiles au-dessus des toits, pas de tunnels sous les écoles.

Ils ont leurs cafés, leurs talk-shows, leurs indignations prêtes à l’emploi.

Leur courage se signe au cachet humide d’un communiqué.

Les Tunisiens, eux, sont à deux mille kilomètres du front mais le cœur gonflé d’un héroïsme de salon.

L’Ordre des avocats se prend pour la branche juridique du Hamas, entre deux conférences sur la liberté d’expression.

On dirait des révolutionnaires de plateau, des djihadistes de bureau, des stratèges sans carte.

Depuis des décennies, les capitales arabes distantes se consolent de leurs échecs en exportant la haine.

À défaut de construire, elles brûlent.

À défaut de penser, elles accusent.

C’est une économie morale : pas de progrès, pas de justice, mais toujours un ennemi commun pour meubler le vide.

Et pendant qu’ils gesticulent en robe noire, ceux qui vivent la réalité — Israéliens comme Palestiniens — enterrent leurs morts et cherchent un lendemain.

© Paul Germon

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