Par L’Étoile de David

Dans un article publié sur « La Règle du Jeu » – ce petit laboratoire d’entre-soi intellectuel où l’on s’auto-congratule entre rabbins médiatiques et éditorialistes de cour –, nous assistons une fois de plus à une belle opération de musellement en bande organisée. Delphine Horvilleur, Haïm Korsia, Joann Sfar et consorts s’inquiètent de la « radicalisation » du débat communautaire. Traduction : ils n’acceptent pas qu’on pense différemment d’eux.
Le problème n’est pas qu’ils s’expriment. Le problème, c’est qu’ils veulent empêcher les autres de le faire.
Et dans ce théâtre d’ombres où chacun rejoue son propre rôle de victime éclairée, « Tribune Juive » devient leur bouc émissaire idéal. Parce que sa Directrice a commis un crime impardonnable : laisser s’exprimer dans « Tribune juive » des voix qu’eux ne valident pas.
La pluralité est leur slogan. Mais pas leur pratique.
Car sous leurs grands discours sur la démocratie, la nuance et le vivre-ensemble, c’est bien une logique d’exclusion qui domine. Une chasse à la pensée libre. Un refus pur et simple du débat.
Quiconque ne pense pas selon leur grammaire morale devient immédiatement un « dangereux radical », un « juif de l’ombre », ou un « traître de galout ». À ce niveau-là, ce n’est plus de l’intellectualisme, c’est une cellule de veille idéologique.
Leurs groupes Facebook sont fermés. Leurs tribunes verrouillées. Leurs entourages soigneusement choisis. Ils n’ouvrent plus les portes. Ils les condamnent.
Le judaïsme n’est pas un club privé
C’est une tradition de controverse
Le judaïsme n’est pas un club privé. C’est une tradition de controverse.
Le peuple juif n’est pas né dans le consensus. Il s’est construit dans la dispute. Dans le respect du désaccord. Dans la possibilité de penser autrement sans être excommunié par le cercle des bien-pensants.
Quand Delphine Horvilleur – qui se targue d’être « franco-israélienne » comme d’autres affichent un pin’s – nous explique doctement ce que doit être « un bon juif », elle oublie une chose : un passeport ne fait pas une légitimité. Et ce n’est pas en s’asseyant sur tous les plateaux de radio qu’on devient garante d’un peuple.
Quant à Haïm Korsia, grand rabbin de France à ses heures, il ferait bien de se souvenir que son rôle n’est pas de sanctifier les mots creux du pouvoir politique, mais de défendre une communauté qui vit, elle, dans l’angoisse quotidienne. Pas avec une voiture de fonction. Mais dans un bus, dans un métro, sous les insultes, sous les regards.
Pendant que leurs tribunes s’indignent d’être critiquées, la République brandit le drapeau palestinien.
Et eux, que font-ils ? Rien. Silence radio.
Quand le président du Parti Socialiste propose de hisser le drapeau palestinien sur les mairies de France, ils restent cois. Quand la haine des Juifs s’installe dans les cortèges, les amphis, les réseaux sociaux, ils regardent ailleurs. Leur indignation est sélective. Leur courage, conditionnel. Leur parole, calibrée.
Ils ne défendent pas Israël. Ils défendent leur place. Leur accès aux studios. Leur confort. Leur image.
Un peu de courage, Delphine. Un peu de vérité, Haïm.
Si vous avez à cœur de défendre vos idées, faites-le. Mais ne prétendez pas être les seuls à incarner la parole juive. N’inventez pas un péril pour interdire l’expression. Et surtout, ne traitez pas de « radical » tout ce qui ne se couche pas devant vos vérités.
Et si vraiment vous cherchez un combat, alors levez-vous quand on profane les cimetières juifs, quand on arrache les mezouzot, quand on tape des enfants qui portent une kippa. Pas quand quelqu’un, dans un journal, vous dit : « Je ne pense pas comme vous ».
Le judaïsme n’est pas un entre-soi. C’est une histoire de vérité, de tension féconde, d’identité en dialogue
Le judaïsme n’est pas un entre-soi.
C’est une histoire de vérité, de tension féconde, d’identité en dialogue.
Et si ce dialogue vous effraie, peut-être est-ce que votre judaïsme est devenu trop confortable pour qu’il soit encore vivant
Alors à vous, Delphine, Haïm, Joann et les autres :
Nous n’avons pas besoin de vous aimer.
Nous avons besoin que vous nous écoutiez.
Ne déguisez pas votre peur du débat en défense du judaïsme
Et si vous ne le pouvez pas, si toute critique vous est insupportable, si le dialogue vous terrorise, alors ayez l’honnêteté de le dire.
Mais ne déguisez pas votre peur du débat en défense du judaïsme.
Car le judaïsme ne meurt pas de trop de voix.
Il meurt quand certains croient qu’une seule voix suffit.
Vous voilà désormais gardiens de clubs fermés sur les réseaux sociaux, où aucun commentaire n’est toléré, où la moindre contradiction est bannie. À votre place, je commencerais à m’inquiéter : quand on en est réduit à s’enfermer dans une tour d’ivoire prétendument élitiste, c’est qu’on n’a plus grand-chose à opposer à la critique — sinon le silence et le mépris. Triste privilège que celui de se parler entre soi, dans un monde qui brûle.
Alors installez-vous sur une île, rendez-la inaccessible, débattez entre vous, publiez-vous les uns les autres, aimez-vous d’un entre-soi brillantissime — mais de grâce, cessez de prétendre nous représenter. Vous n’êtes plus notre fierté. Vous êtes devenus notre gêne.
© L’Etoile de David
Texte publié en réponse à celui de Marc Knobel dans La Règle du Jeu: « Communauté juive : entre dispute et fracture »
Marc Knobel, Communauté juive : entre dispute et fracture https://t.co/DIpw8ISF3c
— Sarah Cattan (@SarahCattan) September 15, 2025