Tribune Juive

Les leçons de la Shoah, les leçons du 7 Octobre. Par Dr. Isaac Attia

Dr. Isaac Attia (Historien, Sémiologue)

Au vu de l’agitation diplomatique de ces derniers jours et de la grand-messe qui se prépare à l’ONU, la veille de Rosh Hashana, le 22 septembre prochain, il semble évident que les leçons de la Shoah et les leçons du 7 octobre n’ont pas été tirées. Or, pour tirer les leçons d’un événement, il faut d’abord le comprendre, sinon, on passe à côté, et l’on risque, évidemment, de revivre exactement une réactualisation du même événement, tout en se disant : « tu vois, ça n’a servi à rien, ça recommence, personne n’a tiré la leçon ». Mais si personne n’a tiré la leçon, c’est que personne n’a véritablement compris la dimension de l’événement en question. D’autant plus que l’innommable de la Shoah fut remplacé par une formulation ambigüe : le « Ça » du « plus jamais ÇA ». 

Si le « ÇA » existe bien en psychanalyse, dans la langue courante, il ne renvoie à rien. Autant dire que pour les jeunes qui ne savent pas grand chose de la Shoah, « plus jamais ça » ne veut rien dire. Quant aux plus âgés, ce n’est guère mieux. En effet, ils ont cru que l’événement « Shoah » se résumait à : « Des sales types (les nazis et leurs collaborateurs) ont voulu tuer des Juifs, et des types bien (les Justes parmi les Nations) ont protégé des Juifs ». Ainsi, chacun a pu recycler la leçon, sur toute la gamme, en remplaçant Juif par Arméniens, Tutsis, et pourquoi pas Palestiniens. Ils se sont ensuite distribués des médailles, en se congratulant et en se félicitant qu’il y ait, quand même, des « types bien » sur la terre. Or, la Bible nous prévient déjà : un « type bien » comme Noé n’empêchera jamais l’Humanité entière de périr dans un déluge de violence (en hébreu le mot violence se dit « Hamas »). 

La véritable dimension de la Shoah n’a rien à voir avec ce message ridicule propagé par tous ceux qui se disent spécialistes de la question. Tous les programmes éducatifs planétaires mobilisant des fonds et des énergies colossaux, non seulement n’empêcheront pas la prochaine Shoah, mais, comble de l’ironie, éduquent les jeunes à refaire exactement ce qui a conduit à la Shoah. Le véritable événement de la Shoah n’est pas dans la sphère individuelle des bons sentiments, il est d’ordre géopolitique, planétaire et civilisationnel, et il se décline ainsi  : « La quasi-totalité des nations du monde a participé, de près ou de loin, à la mise en œuvre d’une tentative d’extermination du peuple juif, entre 1933 et 1945, et a provoqué la disparition de 6 millions de Juifs, la moitié d’un peuple minuscule d’environ 12 millions d’individus sur la terre, mais dont l’Histoire remonte à 3500 ans, dont le narratif national (qui inclus la Création du Monde) constitue le livre le plus vendu sur terre (la Bible) et dont les valeurs ont servi à la fabrication de religions qui englobent environ 4 milliards d’individus sur terre (le christianisme, l’islam, et de nombreux cultes ésotériques) ». Voilà de quoi il s’agit. 

Quant à la leçon de cet événement, c’est la suivante : « Aucune nation ne s’est levée pour dire « stop », aucune « Nation Juste » (à l’exception du Danemark) n’a refusé le déluge de haine, de mensonge et de violence qui s’est déchaîné contre le peuple Juif, entre 1933 et 1945. Et même après la guerre, aucun tribunal international n’a mis en accusation les coupables et rendu la justice, puisque le Procès de Nuremberg de 1945-1946 évoque à peine la Shoah, et le seul témoin d’Auschwitz appelé à la barre est Marie-Claude Vaillant-Couturier, une Résistante non-juive envoyée, « par erreur », dans ce camp, avec le convoi du 24 janvier 1943». 

Et lorsque l’Etat d’Israël, en 1962, à Jérusalem, fait enfin le procès de la Shoah et condamne à mort Adolph Eichmann, l’ensemble des nations condamnent Israël : « Comment ! Le Mossad a osé enlever « illégalement » ce Monsieur Eichmann, alors que l’Argentine l’avait généreusement accueilli ? », « Comment ! Des Juges qui sont Juifs, prétendraient-ils juger impartialement ce Monsieur Eichmann, responsable de la mort de six millions d’entre eux ? ». Car les non-Juifs ne savent pas que les Juifs « ne mangent pas de ce pain-là ». Ils ne savent pas que la haine leur est interdite. Ils ne savent pas que la vengeance, qui est un sentiment si naturel dans les crimes de sang, est encadrée par des dispositions particulières dans le droit hébraïque. Ils ne savent pas qu’Eichmann fut incarcéré dans une aile de la prison où aucun gardien Ashkénaze et aucun gardien ayant un lien quelconque avec la Shoah, ne fut autorisé à approcher le détenu, ou avoir accès à sa nourriture. Ils ne savent pas qu’une cage de verre blindée entourait le box de l’accusé pendant le procès de Jérusalem.     

Voilà pourquoi, ignorant tout de la dimension réelle de la Shoah, et ignorant tout du dénie de justice qui a suivi la Shoah, les nations n’ont jamais tiré les leçons de l’événement d’ordre géopolitique, planétaire et civilisationnel que l’on appelle la Shoah. Ils ont, comme d’habitude, concernant le destin juif, opéré une théologie de la substitution : ils ont vidé la Shoah de sa judéité, ils ont détourné l’événement de sa portée politique, ils en ont fait un rituel universel et consensuel, à nouveau dirigé contre les Juifs : « Vive les Juifs morts, morts aux Juifs vivants ! » comme le dénonçait Alain Finkielkraut en son temps. 

Et nous voilà le 7 Octobre 2023. Voilà aux yeux du monde entier, filmé en direct par les caméras des assassins, un massacre de plus de 1200 personnes, pendant de longues heures, d’une sauvagerie insoutenable, une prise d’otage de plus de 250 personnes, des femmes, des enfants, des vieillards, trainés de force, enfermés dans des conditions inhumaines, voilà le pogrom-génocidaire du 7 Octobre 2023 qui réalise la volonté clairement énoncée depuis longtemps de supprimer toute vie juive, du Jourdain à la Méditerranée, et de détruire l’Etat d’Israël. Pendant 18 siècles, tous les empires se sont arraché la terre d’Israël pour en faire un lieu de passage, une lointaine province, un terrain vague à l’abandon. Et lorsque les Juifs, rescapés de la Shoah, ont à nouveau crée leur Etat, l’Etat d’Israël, sur la terre d’Israël, voilà que les nations se réunissent à nouveau dans un consensus douteux et malsain, et annoncent : « Détruisons l’Etat d’Israël ».

Si la Shoah ne fut pas un événement individuel mettant en cause les bons sentiments des uns et des autres, mais un crime des nations contre Israël, le 7 Octobre 2023 ne fut pas, non plus, la lutte légitime d’un vrai peuple qui se bat pour sa liberté. Le pogrom-génocidaire du 7 Octobre 2023 ainsi que le déferlement de haine planétaire contre les Juifs depuis le 8 Octobre 2023, c’est à nouveau le crime de la Shoah, contre le peuple juif, encore et toujours recommencé, avec, pour arme du crime, cette fois, l’idéologie mortifère du « palestinisme », et son corolaire, le « pro-palestinisme ».  Le « palestinisme » n’est pas une cause nationale, c’est un crime. Le « pro-palestinisme » n’est pas une opinion, c’est la complicité d’un crime. Et ce crime là ne sera pas escamoté par le Droit international, une fois le forfait accompli, comme il le fut en 1945. Ce crime verra se lever une justice, qui mettra fin à la haine des Juifs et à la volonté de détruire l’Etat d’Israël. La leçon de la Shoah, c’est qu’un jour, les nations du monde cesseront de vouloir exterminer le peuple juif. La leçon du 7 Octobre 2023, c’est que ce jour approche.

© Dr. Isaac Attia


A paraitre en octobre: « Le livre noir du palestinisme »

Isaac Attia (Historien) est le co-éditeur avec André Darmon (Journaliste) d’un ouvrage collectif préfacé par Amichaï Chikli (Ministre de la Diaspora et de la Lutte contre l’Antisémitisme), et co-écrit par Michel Onfray (Philosophe), Bat Yé’or (Essayiste), Shmuel Trigano (Sociologue), Pierre-André Taguieff (Historien), Ephraïm Herrera (Orientaliste), Yana Grinshpun (Linguiste), Georges-Elia Sarfati (Linguiste), Richard Darmon  (Journaliste), Yves Mamou (Journaliste), Catherine Stora (Essayiste), Yeochoua Sultan (Essayiste),  Léon Rozenbaum (Juriste), qui se nomme « Le livre noir du palestinisme ».

L’Ouvrage, qui sortira en octobre, est disponible en prévente sur le lien :  https://israelmagazine.co.il/commande-du-livre-le-livre-noir-du-palestinisme/

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