Par Fadila Maaroufi

Belgique : une inquiétante montée de l’antisémitisme
Depuis les massacres du 7 octobre 2023 perpétrés par le Hamas, l’Europe connaît une vague d’actes antisémites sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale. La Belgique, loin d’être épargnée, est aujourd’hui gagnée par un climat de haine qui s’installe à une vitesse foudroyante, accéléré par les réseaux sociaux.
Une comparaison historique à manier avec précaution
Dans les années 1930, les discours antijuifs se diffusaient lentement par la presse ou la radio. Aujourd’hui, un slogan ou une rumeur circule en quelques secondes sur TikTok ou X, embrasant des foules entières. Le poison se répand plus vite qu’il ne se combat.
Universités : sanctuaires ou foyers idéologiques ?
À l’Université libre de Bruxelles (ULB), des étudiants juifs ont été agressés après l’occupation de locaux par des militants pro-palestiniens. Des conférences ont offert la tribune à des figures liées à des réseaux islamistes radicaux.
En mai-juin 2024, un bâtiment fut même rebaptisé au nom de Walid Daqqa, membre du FPLP condamné pour meurtre. Les dégâts matériels dépassèrent le demi-million d’euros. Plus récemment, un auditoire a été baptisé « Rima Hassan », du nom de la nouvelle députée européenne dont les prises de position pro-palestiniennes flirtent parfois avec la complaisance envers des régimes autoritaires.Face à cela, l’ULB a trouvé une cible plus commode : l’ancien sénateur Alain Destexhe, poursuivi pour avoir interrogé publiquement le choix de ces étudiants. Un paradoxe : l’université qui se veut temple de la liberté académique sanctionne la critique, mais tolère la propagande.
Dans la rue : slogans et menaces
Chaque vendredi, le Hall de la Gare du Midi devient théâtre de manifestations pro-palestiniennes. Les enseignes Carrefour et Starbucks sont prises à partie, accusées de « financer Israël ». Mais, dernièrement, un seuil a été franchi.
Une mère juive témoigne :
« Les cris fusaient : Intifada ! Intifada ! Mon fils de huit ans, effrayé, me tirait la manche : Maman, pourquoi y a-t-il une étoile juive barrée ? J’étais paralysée. Et soudain, je l’ai vue : une amie perdue depuis le 7 octobre. Nos regards se sont croisés. Le sien n’était plus que mépris. Elle m’a désignée du doigt et la foule a repris : Mort aux sionistes ! Une vieille femme s’est approchée, photo d’enfant squelettique à la main : Tu vois ce que les sionistes font aux enfants comme toi ? »
Le récit s’interrompt sur la peur glaciale d’une mère et l’innocence meurtrie d’un enfant, pris pour cible non pour ce qu’ils ont fait, mais pour ce qu’ils sont.
Médias complaisants, justice hésitante
La RTBF évoque « les activités de solidarité de Samidoun », sans rappeler ses liens documentés avec le FPLP.
Dans l’hebdomadaire flamand Humo, l’écrivain Herman Brusselmans écrivit :
« Je veux enfoncer un couteau dans la gorge de chaque Juif que je rencontre. »
Acquitté en mars 2025, il fut jugé « satirique ». La satire, en Belgique, se porte bien : c’est la sécurité des Juifs qui chancelle.Une politique de protection défaillante
Le retrait du statut de réfugié à Mohammed Khatib, figure centrale de Samidoun en Europe, est un signe encourageant mais isolé. Aucune stratégie globale n’a été adoptée pour enrayer la montée de l’antisémitisme.
Pendant ce temps, des médecins juifs voient leur judaïté notée dans des dossiers médicaux, d’autres sont poussés à quitter leur cabinet, et des étudiants se taisent pour éviter l’isolement ou les insultes.
Un signal d’alarme
La Belgique est à la croisée des chemins. Elle peut protéger ses citoyens juifs, ou continuer de fermer les yeux. Mais l’histoire ne pardonne pas la complaisance.
Aujourd’hui, des familles juives se demande s’il faut partir ? Je ne puis plus, la main sur le cœur, dire aux Juifs de rester. L’État, censé protéger, s’est endormi comme un portier ivre devant la porte grande ouverte. Qu’on ne se trompe pas : ce n’est pas seulement une faiblesse, c’est une trahison par omission. Alors, pour ceux qui tiennent à la vie plus qu’aux promesses vides, il reste une vérité brutale : mieux vaut quitter ce Royaume avant qu’il ne se persuade que vos tombes sont la preuve de sa tolérance.
© Fadila Maaroufi
Prix international de la laïcité 2024, Prix féministe Anne-Marie Lizin Théroigne de Méricourt 2022,
Master en Anthropologie de l’Université Catholique de Louvain la Neuve, Belgique, Fadila Maaroufi est Co-fondatrice et Directrice de l' »Observatoire Européen des Fondamentalismes » et du « Café laïque Bruxelles / Paris »