Tribune Juive

Quand une nation se prive de ses Juifs, elle se prive de son avenir. Par Dr Bernard Saal

Alors que l’Europe traverse une période de crispation identitaire, de confusion idéologique et de résurgence de l’antisémitisme, une vérité historique devrait nous interpeller : lorsqu’un pays expulse, marginalise ou diabolise ses Juifs, il finit toujours par s’appauvrir — moralement, intellectuellement, économiquement. Ce n’est pas une opinion, c’est un constat historique. Et les campagnes actuelles de boycott d’Israël menacent de rejouer ce scénario à l’échelle continentale.

     Dr Bernard Saal, 

L’Histoire en témoigne

L’Espagne des Rois Catholiques était, avant 1492, un creuset de savoirs, de traductions, de débats philosophiques et scientifiques. Les Juifs y occupaient une place modeste, mais essentielle, dans les domaines du commerce, de la médecine, de la pensée.

Le décret d’expulsion signé par Isabelle la Catholique a provoqué une hémorragie silencieuse. Les meilleurs esprits ont fui. L’or du Nouveau Monde a masqué un temps la décadence, mais la perte était irrémédiable. Le Portugal suivra. Et avec eux, c’est une part de leur avenir que ces nations ont jetée hors d’elles-mêmes.

Au XXe siècle, les pays arabes ont commis la même erreur. Des communautés juives présentes depuis des siècles — parfois depuis l’Antiquité — ont été poussées au départ, souvent brutalement, après la création de l’État d’Israël.

En 1950, ils étaient près d’un million à vivre en Égypte, en Irak, au Maroc, en Tunisie, au Liban, en Syrie, au Yémen. Aujourd’hui, ils ne sont plus que quelques centaines.

Et ce n’est pas seulement un peuple qui est parti : ce sont des commerçants, des pharmaciens, des professeurs, des passeurs de culture. Les conséquences sont visibles. L’appauvrissement intellectuel et culturel a souvent précédé le déclin économique.

Israël, cible ou levier de progrès ?

L’histoire semble prête à se répéter, sous d’autres formes.

En Europe, le climat s’alourdit. Le mot « Juif » revient dans les conversations publiques avec une légèreté dangereuse. Le boycott d’Israël — promu au nom de la justice — agit comme une arme idéologique. On prétend viser un gouvernement, mais c’est un pays, une culture, un tissu de relations, qu’on cherche à isoler.

Or Israël n’est pas seulement un État : c’est un acteur scientifique, médical, technologique de premier plan.

Ses chercheurs publient dans The Lancet, dans Nature, collaborent avec les plus grandes universités du monde. Ses start-ups transforment la médecine, la cybersécurité, l’agriculture en zone aride, la transition énergétique.

Mettre Israël à l’index, c’est appauvrir le monde.

Il ne s’agit pas d’immuniser Israël contre toute critique. Il s’agit de ne pas jeter avec l’eau du bain une source vivante d’intelligence, de créativité et de coopération. La paix ne se construit jamais en ostracisant les bâtisseurs.

L’Europe à la croisée des chemins

L’Europe, si fière de son passé des Lumières, devrait s’en souvenir : sa grandeur fut aussi celle de ses Juifs. Spinoza, Freud, Einstein, Primo Levi, Stefan Zweig, Mendelssohn, Heine, Chagall, Derrida… Que serait notre culture sans eux ? Que serait-elle demain, si la peur, le soupçon ou la haine les chassaient à nouveau, cette fois par les marges ?

Ceux qui pensent se purifier en excluant finissent toujours par se dissoudre.

L’Histoire l’a démontré, encore et encore.

Alors non, préserver le lien avec les communautés juives, préserver les ponts avec Israël, ce n’est pas un « choix politique ». C’est un devoir civilisationnel. Et un impératif stratégique, si l’Europe veut rester un pôle de progrès, de culture et d’humanité.

© Dr Bernard Saal, fondateur du laboratoire Oligosanté

 

 

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