« L’antisémitisme change de visage pour survivre, mais il garde le même regard ». Simone Veil
L’histoire ne bégaie pas : elle radote avec précision. L’antisémitisme journalistique d’aujourd’hui n’a rien inventé. Il a simplement changé de costume. Jadis d’extrême droite, aujourd’hui d’extrême gauche ; hier dans « La Libre Parole » ou « Rivarol », aujourd’hui dans « Le Monde » ou « Libération ». Mais les ficelles sont les mêmes, grossières, répétitives, et terriblement efficaces.
Hier, le Juif était accusé de meurtre rituel, aujourd’hui on lui impute un génocide. Hier, on l’accusait de déicide, aujourd’hui encore de crimes contre l’humanité. Hier, il incarnait l’usurier, aujourd’hui il est le visage honni de la « finance internationale ». C’est toujours le même schéma : une mise en accusation morale, une essentialisation malveillante, un appel à la vindicte publique.
Ce glissement narratif n’est pas innocent. Il vise, de manière sournoise, à délégitimer la mémoire de la Shoah. En instillant l’idée que « les Juifs font aujourd’hui ce qu’ils ont subi hier », on inverse les rôles, on efface la victime et on blanchit le bourreau. C’est une tentative perverse de réécrire l’Histoire pour faire de la Shoah une forme de justice immanente. Une monstruosité intellectuelle, digne héritière des fantasmes antisémites d’hier.
Le vocabulaire change, les références se modernisent, mais le fond reste inchangé : la construction d’un bouc émissaire éternel. Ce n’est plus Drumont qui écrit, c’est « Mediapart ». Ce ne sont plus les ligues antisémites, ce sont les tribunes intersectionnelles. L’emballage est progressiste, le contenu est fétide.
Et que dire du silence complice ? De ceux qui, au nom de la « liberté d’expression », laissent prospérer cette propagande nauséabonde sous couvert de critique politique ? L’antisémitisme d’aujourd’hui est cultivé dans les serres idéologiques de la bien-pensance. Il se pare des atours de la justice sociale pour mieux masquer sa haine.
L’Histoire nous a appris que l’antisémitisme ne disparaît jamais vraiment. Il change de masque. Il se dissimule dans les discours moralisants, il s’insinue dans les analyses géopolitiques, il contamine les mots et les idées. Et la presse, une fois encore, devient le vecteur de sa diffusion.
Hier comme aujourd’hui, il revient toujours à la même conclusion : les Juifs seraient la cause cachée des malheurs du monde. Voilà pourquoi, hier comme aujourd’hui, il faut le combattre avec la même détermination.
© Richard Abitbol
