Tribune Juive

Julien Brünn. « Qui se soucie de la convention de l’ONU contre la prise d’otages ? » 

Donc, Emmanuel Macron veut faire de la prochaine assemblée générale de l’ONU, qui se tiendra comme chaque année à New York en septembre, une caisse de résonance mondiale pour sa dernière initiative diplomatique en date : la reconnaissance solennelle par la France, membre permanent du Conseil de Sécurité et du G7, d’un État de Palestine (après 147 autres États, certes membres de l’ONU mais pas du Conseil de sécurité). 

Cette même assemblée en a vu d’autres, des coups d’éclat. En particulier palestiniens. Si vous avez l’âge requis, vous vous souvenez peut-être de l’onde de choc publicitaire planétaire qu’avait provoquée la montée de Yasser Arafat, président de l’OLP, à cette tribune de cette même assemblée, celle de 1974, présidée par le ministre algérien des Affaires étrangères de l’époque, Abdelaziz Bouteflika. On a beaucoup dit, mais les photos ne sont pas claires, qu’Arafat avait été autorisé par le président de séance à conserver son pistolet à la ceinture… 

Et qu’avait dit Arafat du haut de cette tribune ? Qu’il offrait généreusement aux Israéliens ­ et aux Juifs en général ­ la possibilité de vivre en paix dans une Palestine unique. Une Palestine, pas deux : « …Nous leur offrons [aux Juifs] la solution la plus généreuse, qui nous permettrait de vivre ensemble, dans le cadre d’une paix juste, dans notre Palestine démocratique ».  Il faut se souvenir en effet que lorsque l’OLP est créée par Arafat en 1964, il n’y avait pas les territoires occupés en 1967 à libérer (pris à la Jordanie et à l’Égypte, soit dit en passant), il n’y avait que l’Israël d’après 1948 qu’il s’agissait donc de faire disparaître au profit de « notre », comme il disait, Palestine. Tel était le sens des mots « libération de la Palestine » du sigle OLP : un État arabe, un seul, « démocratique et laïque ». Autant dire une blague : aucun des États arabes voisins prétendument laïque n’a été démocratique, et tous ont finalement cessé d’être laïque. Exactement ce qu’il adviendra de ce deuxième État qu’Emmanuel Macron va appeler de ses vœux du haut de cette même tribune (mais sans revolver), si cet État sortait un jour des limbes onusiennes.

Il ferait mieux de rappeler au monde une convention apparemment un peu oubliée et pourtant adoptée par cette digne assemblée générale de l’ONU, en 1979, une convention qui sera peut-être, et même sans doute encore, hélas, d’actualité en septembre, la « convention internationale contre la prise d’otages ». Vous avez bien lu : la prise d’otages, c’est mal. C’est l’ONU qui le dit, qui considère « que la prise d’otages est un délit qui préoccupe gravement la communauté internationale », au point que « quiconque commet un acte de prise d’otages doit être poursuivi ou extradé ». 

Représentation de Camille sur une fresque de
Domenico Ghirlandaio ornant le Palazzo Vecchio,
Florence, entre 1482 et 1484.

Il serait bon que ce soit claironné haut et fort, par exemple par le président de la République française, du haut de la tribune de l’Assemblée générale de l’ONU. Il pourrait par exemple appeler le monde en général et les Palestiniens en particulier (très friands, et pas seulement le Hamas, de prises d’otages) à s’inspirer de ce général romain, Marcus Furius Camillus dit en Français Camille, qui au cours du siège d’une ville, refusa les otages qu’un traître lui offrait pour accélérer la reddition des assiégés : « On ne mange pas de ce pain-là », dit-il en gros au traître qu’il renvoya dans la ville assiégée. Il n’avait même pas eu besoin d’une convention de l’ONU pour prendre sa décision : elle coulait de source. Il est vrai que c’était il y a 25 siècles…

 © Julien Brünn

Journaliste. Ancien correspondant de TF1 en Israël. 


Dernier ouvrage paru  : 

L’origine démocratique des génocidesPeuples génocidaires, élites suicidaires. L’harmattan. 2024

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