Tribune Juive

Le Feuilleton de l’été. « Poucette Crampon. Voix de crécelle, Poing levé, Conscience tendue ». Par Paul Germon

Petite. Menue jusqu’à l’insolence.

Un mètre cinquante-deux de conviction pure, de colère froide, de dogme chanté sur l’air des tracts.

Ses jambes arquées lui donnent cette allure de jouet militant mal articulé, un peu désaxé — on la croirait échappée d’un stand pédagogique sur le capitalisme toxique.

Son ennemie intime, Callypige Panarrière, la désigne (en son absence, toujours) par le surnom de “Fa dièse”, avec ce commentaire précieux : “C’est la note la plus proche du sol.”

Poucette, de son côté, appelle Callypige “Béru”, en référence au célèbre personnage des romans de San-Antonio — évocation directe de son arrière-train majestueux qu’elle juge politiquement incompatible avec la dignité révolutionnaire.

Mais ce qui marque, au-delà du comique involontaire de ses postures et de ses coudes toujours en alerte, c’est le bruit.

Une voix haut perchée, aiguë, métallique, qui vrille l’air comme une alarme de chantier.

Elle ne parle pas. Elle crie pour couvrir.

Son débit, précipité, ininterrompu, étouffe la contradiction par saturation sonore.

On ne l’interrompt pas : elle écrase.

Par fatigue, par volume, par logique épuisée.

Sa coiffure noire, frisée, compacte, figée comme un casque SS, évoque des souvenirs capillaires que même les plus tolérants ont du mal à traiter sereinement.

Et puis il y a l’obsession.

Chez elle, l’antisionisme est une pulsion pavlovienne.

Israël ? Elle en parle avant même qu’on en parle.

Une conversation sur le prix du quinoa peut, en deux phrases, se transformer en réquisitoire contre le Mossad et la colonisation de l’esprit européen par les lobbies pro-israéliens.

Chaque événement mondial, chaque injustice, chaque variation climatique devient l’occasion d’un soupçon contre Tel Aviv.

Même le prix de l’électricité. Même la grève des éboueurs.

Même la disparition des abeilles, qu’elle a un jour reliée à une “stratégie territoriale d’annexion des pollinisateurs” — personne n’a compris, mais tout le monde a hoché la tête. Par peur. Ou par lassitude.

Elle ne distingue plus l’État d’Israël d’un principe cosmique du Mal.

Et plus l’événement lui est étranger, plus elle le rattache au sionisme.

C’est sa boussole, son mot-valise, sa clef de lecture.

Elle ne lit pas l’histoire, elle la recrie, au marqueur rouge.

Dans les réunions du Parti, on la laisse parler, parfois pendant vingt minutes, sans l’interrompre.

Parce que l’interrompre, c’est l’allumer.

Et personne ne veut ça.

Poucette Crampon

(voix de crécelle, poing levé, conscience tendue)

Petite. Menue jusqu’à l’insolence.

Un mètre cinquante-deux de conviction pure, de colère froide, de dogme chanté sur l’air des tracts.

Ses jambes arquées lui donnent cette allure de jouet militant mal articulé, un peu désaxé — on la croirait échappée d’un stand pédagogique sur le capitalisme toxique.

Son ennemie intime, Callypige Panarrière, la désigne (en son absence, toujours) par le surnom de “Fa dièse”, avec ce commentaire précieux : “C’est la note la plus proche du sol.”

Poucette, de son côté, appelle Callypige “Béru”, en référence au célèbre personnage des romans de San-Antonio — évocation directe de son arrière-train majestueux qu’elle juge politiquement incompatible avec la dignité révolutionnaire.

Mais ce qui marque, au-delà du comique involontaire de ses postures et de ses coudes toujours en alerte, c’est le bruit.

Une voix haut perchée, aiguë, métallique, qui vrille l’air comme une alarme de chantier.

Elle ne parle pas. Elle crie pour couvrir.

Son débit, précipité, ininterrompu, étouffe la contradiction par saturation sonore.

On ne l’interrompt pas : elle écrase.

Par fatigue, par volume, par logique épuisée.

Sa coiffure noire, frisée, compacte, figée comme un casque SS, évoque des souvenirs capillaires que même les plus tolérants ont du mal à traiter sereinement.

Et puis il y a l’obsession.

Chez elle, l’antisionisme est une pulsion pavlovienne.

Israël ? Elle en parle avant même qu’on en parle.

Une conversation sur le prix du quinoa peut, en deux phrases, se transformer en réquisitoire contre le Mossad et la colonisation de l’esprit européen par les lobbies pro-israéliens.

Chaque événement mondial, chaque injustice, chaque variation climatique devient l’occasion d’un soupçon contre Tel Aviv.

Même le prix de l’électricité. Même la grève des éboueurs.

Même la disparition des abeilles, qu’elle a un jour reliée à une “stratégie territoriale d’annexion des pollinisateurs” — personne n’a compris, mais tout le monde a hoché la tête. Par peur. Ou par lassitude.

Elle ne distingue plus l’État d’Israël d’un principe cosmique du Mal.

Et plus l’événement lui est étranger, plus elle le rattache au sionisme.

C’est sa boussole, son mot-valise, sa clef de lecture.

Elle ne lit pas l’histoire, elle la recrie, au marqueur rouge.

Dans les réunions du Parti, on la laisse parler, parfois pendant vingt minutes, sans l’interrompre.

Parce que l’interrompre, c’est l’allumer.

Et personne ne veut ça.

© Paul Germon

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