Par Shmuel Vasquez Bronfman et Johann Habib
Après la déferlante, ce texte a été rédigé à quatre mains, juives, israéliennes, profondément attachées à Israël.
Nous faisons corps avec notre terre, car elle est inséparable du triptyque Torat Israël, Am Israël et Eretz Israël.
Ce n’est même pas un choix : cet amour tridimensionnel s’est imposé à nous — parfois dès la naissance, parfois plus tard.
Nous aimons profondément notre peuple, notre terre, et la Torah qui nous a été donnée au mont Sinaï il y a plus de 3 330 ans. Et nous sommes profondément reconnaissants envers nos sages qui, durant plus de trois millénaires, ont transmis, clarifié et organisé notre loi orale à travers des dizaines de milliers de textes.
Nous nous sommes promis de défendre cet héritage, face à l’adversité — qu’elle provienne de l’extérieur ou, hélas, de l’intérieur, de ceux qui, se réclamant du judaïsme, en oublient l’essence : la vérité. Parce que cette terre est Emet (vérité),elle révèle la véritable personnalité de chacun.
La Torah orale : une obligation fondée dans la Torah écrite
Contrairement à une opinion répandue, la Torah orale n’est pas une construction rabbinique tardive : elle est inscrite dans la Torah écrite elle-même.
« Tu viendras aux prêtres-lévites, au juge en fonction… tu te conformeras à leur décision ».
(Deutéronome 17:8-11)
Ce verset consacre l’autorité des Sages de chaque génération, donnant à leurs décisions force obligatoire — c’est le fondement même de la Halakha.
« Observe-les afin de les mettre en pratique, les lois et les règles que je vous enseigne aujourd’hui ».
(Deutéronome 5:1)
De nombreuses mitsvot sont énoncées dans la Torah écrite sans explication détaillée, comme les téfilines : leur forme, leur couleur, leur position… Tout cela relève de la tradition orale transmise à Moise au mont Sinai et qui nous a été transmise de maitre en élèves sur les bancs de la Yeshiva.
« Monte vers Moi sur la montagne… Je te donnerai les tables de pierre, la Torah et le commandement que J’ai écrits pour les enseigner ».
(Exode 24:12)
Judaïsme libéral : ouverture séduisante, transmission impossible
Aussi attirant soit-il dans son habillage moral ou intellectuel, le judaïsme libéral ne permet pas la continuité du peuple juif.
Dans une société libre, l’assimilation est une force naturelle. Seul un cadre Halakhique clair permet une véritable transmission.
Posez-vous la question : combien d’enfants et de petits-enfants de Juifs pratiquant un judaïsme libéral sont encore juifs au sens de la Halakha (nés d’une mère juive) ?
Le constat est clair. Et il est tragique.
Nos lois étant d’origine divine, nous n’avons pas à en justifier la modernité.
Elles sont, par essence, intemporelles.
Les adapter sans fin aux évolutions sociétales, c’est les condamner à devenir caduques au rythme des modes.
« Tu aimeras ton prochain » : un verset que vous affichez sans le comprendre?
Certains affirment que « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » serait le verset « le plus mal compris de la Torah ».
Ce n’est pas faux. Ce qui l’est, en revanche, c’est de continuer à le citer sans s’intéresser à ce que nos sages en ont réellement dit.
Nos sages ont exploré ce verset dans des centaines de livres. En découlent des milliers de règles de vie, codifiées et précises, tels :
- L’interdiction de surenchérir sur une transaction déjà engagée ( Shoul’han Aroukh, Choshen Mishpat 237:1)
- L’obligation d’aimer son prochain juif (Rambam, Livre des Mitsvot, Mitsva positive 206)
- La conduite à adopter quand deux personnes se trouvent dans le désert avec une seule gourde d’eau pouvant sauver un seul d’entre eux (Talmud Bavli, Baba Metzia 62a ; enseignement de Rabbi Akiva)
Cette dernière Piska — loin des discours abstraits — affirme que c’est celui qui possède la gourde qui doit la conserver, même si l’autre meurt, car « ta vie prime sur celle de ton prochain ».
C’est cela, la Torah. Ce sont des lois contraignantes, pas des incantations.
Et nos sages vont encore plus loin. Ils nous enseignent que si l’on n’est pas au niveau spirituel de celui que l’on prétend réprimander, ou si l’on n’est pas certain que ses critiques seront entendues, alors on doit se taire. (Yebamot 65b)
Et aimer. D’un amour pur, inconditionnel, non médiatisé. Un amour qui n’humilie pas. Qui ne se donne pas en spectacle.
L’histoire d’Hillel : mal traduite, trop souvent récupérée
On aime citer l’histoire de celui qui, souhaitant se convertir, s’adresse à Shamaï puis à Hillel.
Le premier le renvoie. Le second l’accueille en lui disant :
« Ce que tu détestes, ne le fais pas à ton prochain. Le reste, va et étudie le ».
Il ne dit pas que l’amour est toute la Torah. Il dit que l’éthique élémentaire est une condition d’entrée à l’étude.
L’amour est un seuil, pas une dispense.
On étudie par amour de D.ieu, et automatiquement de son prochain juif, non pour briller aux yeux du monde.
Ce que vous appelez morale, d’autres y ont vu un levier.
Vos paroles ont été accueillies avec soulagement et empressement… par ceux qui cherchent à délégitimer Israël.
La parole d’une femme qui se dit rabbin, affirmant publiquement son désaveu d’Israël – la terre et le peuple- est l’illustration parfaite du rêve antisémite : le Juif qui se désolidarise de la Torah, de sa terre, de son peuple.
Vous incarnez, à leurs yeux, le fantasme de l’ »Israélite éclairé », rallié à la morale universelle, enfin affranchi de son particularisme, enfin compatible avec l’Occident.
Mais nous ne sommes pas là pour rassurer les plateaux de télévision.
Nous sommes là pour rappeler sans cesse : nous sommes Or la goyim. Pas l’inverse.
Et pendant ce temps-là, nous luttons
Moi, Shmuel, j’ai effectué près de 300 jours de Milouïm depuis le 7 octobre.
Trois cents jours de guerre. Pas d’écriture. Pas de déclarations. De l’action.
Et je sais une chose :
Le peuple d’Israël n’a pas été rassemblé sur sa terre pour tendre la main à ses ennemis, ni la joue.
mais pour vivre libre et souverain sur sa terre ancestrale.
Parce que D.ieu a dit :
« ובחרת בחיים » — Choisis la vie.
Une question qui, un jour, a surgi dans la bouche d’une enfant de 6 ans nommée Romi Suissa.
À Sderot, cette petite fille, ayant vu ses parents assassinés par des terroristes, un matin d’octobre 2023, a demandé aux policiers venus la sauver :
« Vous êtes d’Israël ? »
Aujourd’hui, cette question vous revient :
Quand vos paroles résonnent dans la bouche de ceux qui haïssent Israël,
Êtes-vous encore du camp d’Israël ?
Ce qu’est, réellement, l’amour d’Israël ce n’est pas un sentiment affiché sur les murs.
C’est :
- Soutenir les soldats et leurs familles, y compris ceux qui n’en peuvent plus ;
- Aimer chaque Juif, même celui qui s’éloigne, même vous ;
- Reconnaître que certaines menaces ne se contiennent pas — elles s’éliminent.
Même Pin’has n’est devenu Cohen qu’en agissant avec une radicalité assumée.
Et la suite ?
Vous écrivez :
« Mon amour de ce pays n’est pas celui d’une promesse messianique… »
Mais nos ancêtres, eux, n’ont jamais rêvé d’une démocratie comme les autres.
Ils ont rêvé d’un lieu où l’on prie trois fois par jour en sa direction sur toute la surface du globe.
D’une terre bâtie sur la promesse divine, et sur la Torah, et la Torah sort de Sion (Ésaïe 2:3)
La fidélité à Israël ne passe pas par un idéal abstrait de justice universelle, mais par la protection réelle de son peuple.
Un amour d’Avenir
Le prétendu soutien à Israël de ces “juifs de France” mediatiques n’est ni entendu, ni reçu, ni efficace.
Il n’incarne ni l’amour, ni la responsabilité, ni la tradition juive, ni la loi juive.
Il n’incarne que l’image fantasmée d’un judaïsme asservi au reste de l’humanité.
Et la prochaine génération juive — la nôtre, ici — ne survivra pas en s’excusant d’exister,
mais en détruisant, à la racine, ce qui cherche à l’anéantir cette terre sainte, cette terre qui a les yeux de D.ieu rivée vers elle du début de l’année a la fin de l’année (deutéronome 11:12)
© Shmuel Vasquez Bronfman et Johann Habib
