Tribune Juive

« C dans l’air » ou l’air du soupçon permanent : quand le service public dérape. Par Paul Germon

Cela commence toujours de la même manière : une affiche sobre, une musique grave, et une promesse d’éclairage. C dans l’air, l’émission vedette de France 5, prétend nous « expliquer l’actualité » à travers des débats d’experts. Mais lorsqu’il s’agit d’Israël, l’explication cède la place à la mise en accusation.

Depuis plusieurs mois — en réalité, depuis plusieurs années —, le traitement du conflit israélo-palestinien par cette émission n’est plus un simple déséquilibre passager. C’est une ligne éditoriale. Le plateau est presque systématiquement occupé par des voix critiques, souvent exclusivement, parfois radicalement, sans aucune contrepartie réelle. Israël y est présenté comme un État d’exception — exception morale, juridique, stratégique — dont les actions, quelles qu’elles soient, semblent toujours suspectes, toujours excessives, toujours condamnables.

Un antisionisme qui n’ose pas dire son nom

La critique d’un gouvernement est légitime. La critique récurrente, univoque, saturée, devient un message. Celui que reçoit une partie du public, consciemment ou non, est que l’État juif est par nature illégitime, brutal, nuisible.

Car c’est bien de cela qu’il s’agit : non d’analyse, mais de narration. C dans l’air ne cherche pas à comprendre, mais à faire comprendre dans un seul sens. Les crimes du Hamas ? Relégués au rôle de contexte. Les otages israéliens ? Évoqués comme variables diplomatiques. La haine antijuive qui se diffuse sur nos murs et dans nos écoles ? Rarement nommée clairement, traitée comme un sujet central ou dénoncée avec force.

La fabrique d’un climat

Dans un pays où les actes antisémites explosent, cette narration publique — offerte chaque semaine sur le service public — devient plus qu’un simple biais : elle alimente un climat. Celui où l’on trouve des « bonnes raisons » de haïr Israël, et parfois, de ne plus faire la distinction entre les Juifs d’ici et l’État là-bas.

Que « C dans l’air » se fasse ainsi le relais d’une vision systématiquement à charge, sans contradicteurs solides ni experts réellement attachés à la complexité des faits, relève d’une faute professionnelle. Et dans le climat actuel, d’une faute morale.

Nous n’avons plus le luxe du silence

Il ne s’agit pas de demander un traitement favorable d’Israël. Il s’agit de demander le droit à l’équilibre, à la nuance, à la parole minoritaire mais éclairée. Il s’agit de rappeler que la diabolisation répétée d’un peuple ou d’un État, fût-ce par des experts “raisonnables”, finit toujours par rejoindre les passions les plus sombres.

Ce que nous demandons à France Télévisions, c’est du pluralisme, de la vigilance, et de la responsabilité. Car à force de glisser, de simplifier, de frapper sur les mêmes cibles, certains médias finissent par rejoindre ce qu’ils prétendent combattre.

© Paul Germon

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