
Sous les raisonnements fumeux, on entend claquer les genoux
Contrairement à ce que racontent le Kremlin et ses petits télégraphistes, ce n’est pas l’Ukraine qui a déclenché la guerre contre la Russie en agressant (prétendument) les minorités russophones du Donbass, mais c’est la Russie qui a annexé illégalement la Crimée, téléguidé des soulèvements « spontanés » et inventé le massacre de russophones par Kiev afin d’envahir son voisin le 24 février 2022.
Contrairement à ce que racontent le Hamas et ses affidés, ce n’est pas Israël qui a décidé, out of the blue, d’envahir et de bombarder Gaza en y faisant quantité de victimes civiles, mais c’est d’abord le Hamas qui a envahi Israël le 7 octobre 2023 pour y semer délibérément la terreur et la mort parmi les populations civiles, et kidnapper des innocents dans le but de monnayer chacun d’eux contre des dizaines de tueurs.
Contrairement à ce qu’ânonne Moscou, l’Ukraine n’est pas un régime « néonazi » dirigé par un dictateur, au contraire : c’est une démocratie dirigée par un Juif parfaitement démocrate, où l’extrême droite plafonne à 2 %. Contrairement à ce que braillent les étudiants en keffieh, Israël n’est pas un régime d’« apartheid », au contraire : c’est la seule démocratie du Proche-Orient et le seul État de la région où (même quand il est gouverné par l’extrême droite) les Arabes eux-mêmes peuvent afficher leur orientation sexuelle ou critiquer leur gouvernement sans risquer la prison.
Enfin, il n’y a jamais eu de « génocide des minorités russophones dans le Donbass» comme le prétend la Russie. S’il y a bien eu des violations des droits de l’homme de part et d’autre, parler de « génocide » est un abus de langage uniquement destiné à justifier l’invasion de l’Ukraine. Et, de la même manière, il n’y a pas et il n’y a jamais eu de « génocide à Gaza », comme le racontent tant de gens. Tsahal a peut-être commis des crimes de guerre (qui seront tous documentés), mais la fable grossière d’un « génocide » commis par Israël n’a qu’une fonction : mettre au ban des nations le pays qu’on n’arrive pas à détruire, et justifier toute violence à son égard.
Dans les deux cas de l’Ukraine et d’Israël, les dénis se ressemblent. Quand ils ne sont pas les mêmes, les partisans de la Russie ou du Hamas raisonnent exactement de la même manière, usent des mêmes sophismes et pratiquent les mêmes procès d’intention. C’est le même travestissement de l’Histoire, le même goût de maquiller la victime en bourreau, le même souci d’inverser la cause et l’effet, la même volonté de démoniser l’adversaire pour justifier les pires exactions contre lui, la même défense du plus fort (l’empire russe ou bien le monde arabe) grimée en pacifisme et mâtinée de bons sentiments. D’où viennent tant de ressemblances ?
D’une vieille peur commune, dont la première expression remonte peut-être à 1938, quand Hitler envahit les Sudètes pour protéger (prétendument) les germanophones opprimés, et que de belles âmes, souscrivant à cette fable, justifièrent, à Munich, qu’on donnât, au nom de la paix, satisfaction au tyran. On trouvait fou, quand on apprenait cette histoire à l’école, que des gens pussent faire un si mauvais calcul. Maintenant que l’Histoire bégaye et que le danger ressuscite sous la double forme de l’islamisme et de la Russie, la vieille peur, si mauvaise conseillère, reprend du service et dispense ses sophismes.
Mais sous les raisonnements fumeux, on entend claquer les genoux.
Source: Franc-Tireur