
Pour avoir suivi dès le premier jour et via un entrefilet du « Parisien » ce qu’on appelle aujourd’hui « l’Affaire Sarah Halimi », je fais partie de ceux encore plus estomaqués par la suite judiciaire qui lui fut donnée que par l’assassinat lui-même: Sarah, Pardonnez-moi.
Jamais je ne pardonnerai l’absence lâche de nos dirigeants communautaires qui prétendront s’être « battus comme des lions » mais desquels j’ai pu voir la piètre figure et les silences couards devant ce qui se passa, jamais je ne pardonnerai cette satisfaction lorsque fut enfin accordée telle une aumône la circonstance aggravante pour antisémitisme.
Nul n’oubliera ce qu’a rappelé la Commission parlementaire menée par Meyer Habib: les dysfonctionnements extravagants à tous les niveaux, de l’omnipotence d’une juge qui, au sein de son bureau, refusa de recevoir les avocats, de procéder à une reconstitution, à la rocambolesque séquence des expertises psychiatriques, en passant par les débats « masturbation intellectuelle », la solitude de la famille qui oeuvra, solitaire, pour tenter de faire avancer les choses, le côté surréaliste des auditions de ces policiers et autres témoins sur site qui « n’avaient pas entendu les hurlements de Sarah » ou qui, pire encore, « avaient tout oublié », incapables qu’ils furent d’expliquer pourquoi, munis de la clé qui aurait permis d’empêcher le massacre, se décrivirent comme « tétanisés », « oublieux qu’ils avaient en main ladite clé », nul n’oubliera les photos postées sur les réseaux sociaux par l’assassin, nul n’oubliera enfin, apothéose, « L’Invisible de la rue Vaucouleurs », livre qu’on appelle aujourd’hui « le livre du rabbin », lequel demanda à « 250 personnalités » choisies par lui un texte, -même le Pape s’en mêla »- , et évinça tous ceux qui eurent le malheur de lui déplaire.
Aujourd’hui, seulement aujourd’hui, l’appartement où s’est déroulé le drame a été vidé par Yonathan, le fils de la victime, et S., celle qui, anonyme, fut là concrètement chaque jour aux côtés de la famille: « Sarah avait commencé son ménage de Pessah; on pouvait voir l’aluminium dans la cuisine et elle se préparait pour les fêtes. Elle avait préparé ses habits pour le lendemain sans imaginer l’horreur qu’elle allait vivre », nous raconte-t-elle, éprouvée mais en rien vaincue.
C’est Elle que nous voulons aujourd’hui honorer et remercier, mais encore l’intègre Maître Alex Buchinger, ainsi que les initiatives de Schibboleth et quelques autres.
Voilà bien une bataille que nous avons perdue à force de nous vouloir Républicains et confiants en la justice française.
Sarah Cattan