
Je sais qu’en France il fait froid, que les rues sont vides sauf de tristesse et d’une dictature imposée par un gouvernement cynique, mais je veux encore partager avec vous la bonté de Rome, sa vitalité et son énergie, sa joie !
Une liesse populaire qui depuis hier s’est décuplée, a mis les familles dans les rues et sur les places, emmitouflées malgré la douceur du temps qui éclaboussait d’or les palais comme les murs lépreux du vieux Trastevere, les vicoli et les berges du Tevere qui traverse l’antique cité, assuré de sa beauté, et qui, représentant parfait du machisme à l’italienne, entre chevalerie et fanfaronnade, roule ses méandres entre spots, lasers, et lumière divine c’est sûr, sinon comment pourrions-nous être dans cette incapacité à le quitter des yeux, sous emprise à le regarder changer au rythme des heures, sans jamais rien perdre de sa sensualité ?
Un truc de dieux ou de diables, enfin une « combinazione », mais pour le meilleur !
A Rome la circulation est interdite dans une grande partie de la cité en ces périodes de fêtes particulièrement, et si les contraintes sanitaires suggèrent de garder le masque au dehors, ce dont tout le monde se fiche, y compris les carabinieri (à un point que je comprends mieux ici mon goût pour la liberté et ma résistance à la tyrannie), l’antique cité ne fait de place qu’à la musique, au théâtre, aux chanteurs de blues, d’opéra et de folklore italien qui mélangent leurs croches sans complexe devant une population rieuse, les applaudissements et les rires stridents des enfants dans les rues.
Il y a à Rome comme à Paris des problèmes économiques, des peurs du terrorisme et de la montée des extrêmes, d’un fascisme pas si lointain et de cette épidémie dont on ne sait pas quand elle finira, à laquelle l’Italie a payé un lourd tribu dans l’indifférence des autres pays européens, mais ce que Rome a, et que Paris n’a plus, la France n’a plus ou plus trop, c’est la stabilité et la sérénité qu’apportent les familles italiennes, où la « nonna » et les anciens, respectés et aimés peuvent transmettre leurs savoirs et leurs expériences, leurs traditions.
Des plus vieux aux plus jeunes, une ligne de force généreuse et solide qui unit l’Italie et les Italiens, surfe sur le fleuve et dans les rues, sur les places et dans les églises, comme un bonheur, une mélodie, une cantate, cette chanteuse en robe de lamé rouge qui hier chantait « Nessun dorma » dans un petit resto d’une ruelle de Rome.
© Louise Gaggini
Ecrivain, journaliste, mais aussi sculpteur et peintre, pianiste, bref une « artiste plurielle ». Diplômée de lettres, d’Histoire de l’Art et de Conservatoire de musique. Auteur de nombreux dossiers pour la presse et la télévision, dont certains ont été traduits par l’Unesco, des organismes humanitaires et des institutions étrangères à des fins d’éducation et de prévention et d’autres furent diffusés par l’EN, Louise Gaggini est l’auteure d’essais et de romans dont La résultante ou Claire d’Algérie et d’un livre d’art pour l’UNICEF: Les enfants sont la mémoire des hommes. Elle est aussi l’auteure d’essais de société, et expose régulièrement, récemment à New York.
elle a publié son premier roman pour littérature jeunesse en 2001, et son premier roman pour adultes en 2004.
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