
« Je suis un écrivain tout français, un arbre de Judée dans la forêt française » (1973)
C’est autre chose que la cuvée 2022 au goût de la haine…
« Je suis un écrivain tout français, un arbre de Judée dans la forêt française » (1973)
En 1972, Joseph Kessel propose à l’Académie Nobel de décerner son prix de littérature à Albert Cohen.
Profondément touché, l’auteur de Solal lui adresse la lettre suivante :
« Cher Joseph Kessel,
J’ai beaucoup aimé l’interview que vous avez accordée à la radio suisse et j’ai demandé à ma femme de la transcrire. Cette interview est devant moi sur une feuille, une présence amicale, et j’éprouve le désir de vous dire ma gratitude. Merci d’aimer mes livres, d’aimer Solal, d’aimer Mangeclous et les Valeureux, d’aimer le Livre de ma mère, d’aimer Belle du Seigneur et de n’avoir pu vous endormir après en avoir terminé la lecture, au matin.
Lorsque j’ai appris votre initiative d’écrire en ma faveur à Stockholm, je vous ai envoyé, par absurde pudeur, une lettre conventionnelle, malgré moi conventionnelle. Mais aujourd’hui à cause de cette interview qui est sur ma table de travail, je veux laisser parler mon cœur et vous dire combien j’admire cette générosité qui vous a fait demander la plus haute distinction littéraire pour un écrivain que vous ne connaissez pas.
De tels nobles élans ne sont guère fréquents.
Bien sûr, je serais heureux d’obtenir le prix Nobel. Entre autres, parce qu’il me consolerait de n’être pas de l’Académie française, honneur qui m’est interdit car je ne suis pas un citoyen français, honneur que je mériterais car je suis un écrivain tout français, un arbre de Judée dans la forêt française.
Mais je sais bien que le Nobel ne me sera pas décerné. De telles chances ne peuvent m’arriver.
Mais ce qui m’importe, c’est que le grand Kessel m’ait tendu une main fraternelle, main que je serre de tout cœur.
Albert Cohen
C’est une grande bonne action d’avoir crée les Combats d’Israël. De cela aussi je vous remercie. Je ne retrouve pas votre adresse et je ne suis pas sûr de me la rappeler, de me la rappeler exactement. C’est pourquoi je recommanderai cette lettre ainsi que l’exemple de Ô vous, frères humains que je vous envoie aujourd’hui et auquel je vous prie de faire bon accueil. »
Merci Jacques Viallebesset
© Hubert Bouccara
Spécialiste de Kessel, Hubert Bouccara tient « La Rose de Java« , librairie hors-norme entièrement consacrée à l’œuvre de Gary et Kessel, et décrite par Denis Gombert comme « un lieu atypique, vrai petit coin de paradis parisien pour lecteurs passionnés ».
11 Rue Campagne Première
75014 Paris
