Remettre les choses à leur juste place.
Voici l’idée qui s’impose à moi ces derniers jours face au chaos que connait notre monde.
Tout juste sorti de plus de deux mois de confinement, de plus de dizaines de milliers de morts que nous enterrons à peine, notre pays plonge dans une crise qui n’est pas la sienne.
Il n’y a donc rien eu de plus aisé en ces temps aussi troublés que de surfer sur ce malaise et de récupérer ainsi toute l’émotion née de cette période de pandémie, inédite pour l’Humanité.
Car enfin quel événement récent en France justifierait que notre Ministre de l’intérieur s’agenouille pour un crime commis à l’autre bout de la planète, et abandonne au passage à la vindicte et à l’opprobre toutes nos forces de l’ordre ?
Comment expliquer ses déclarations maladroites qui clouent au pilori ceux qui assurent de nuit comme de jour la sécurité de notre Nation ?
Que s’est-il passé de si grave sur notre sol national pour que notre Garde des Sceaux rompe publiquement le principe de la séparation des pouvoirs sans que personne ne le lui ai officiellement demandé ?
Au nom de quoi et pour qui sommes-nous en train de sacrifier notre unité nationale ?
Remettons donc les choses à leur juste place :
Georges Floyd est mort lors d’une interpellation sauvage et raciste, mais il n’est pas mort en France, et l’indignation du peuple américain ne peut être la nôtre.
Nous pouvons compatir, nous pouvons être tristes, mais nous ne pouvons endosser toute leur peine et toute leur responsabilité.
Leur Histoire n’est pas la nôtre, et leur Société fonctionne différemment de la nôtre.
Il est aisé de surfer sur la misère des autres, et de s’approprier et leur peine, et leur cause quand les nôtres ne suffisent pas.
Car c’est cela l’Affaire TRAORE ADAMA et rien d’autre.
L’affaire TRAORE ADAMA n’est pas l’affaire GEORGES FLOYD.
Lenteur de la justice, fragilité des expertises médico légales, rôle du juge d’instruction, rôle de la police, méthode d’interpellation, places de l’avocat et du procureur inégales dès le début de l’enquête : il existe dans l’affaire TRAORE quantité de points sur lesquels nous devons et pouvons progresser, et sur lesquels nombre des avocats que nous sommes travaille au quotidien.
Utiliser habilement les médias pour faire avancer un dossier au point mort fait désormais partie intégrante de la stratégie pénale développée par n’importe quel avocat avec plus ou moins de talent.
Mais que le gouvernement se fourvoie à ce jeu est risqué : la paix sociale ne s’achète jamais en avouant sa faiblesse, bien au contraire, en s’abaissant à terre, le gouvernement prend le risque de ne jamais se relever et d’entraîner dans sa chute tout le peuple de France.
Muriel Ouaknine Melki
Avocat
Présidente de l’OJE