EXCLUSIF – Le chef de l’État a évoqué cette hypothèse dans une visioconférence face au premier cercle des donateurs de Londres.

Comment reprendre politiquement la main? C’est la question qu’Emmanuel Macron se pose depuis le début de la crise du Covid-19. Plusieurs possibilités institutionnelles s’offrent à lui: un changement de premier ministre, une dissolution de l’Assemblée nationale, un recours au référendum, une démission.
Écartée d’emblée par le milieu politique, parce que tellement improbable, cette dernière hypothèse ne semble pas totalement exclue par le président de la République.
«Dans les semaines ou les mois à venir»
C’est en tout cas ce qu’il a dit, voici une quinzaine de jours, devant un cénacle très restreint. Lors d’une réunion du premier cercle des donateurs de 2017 à Londres, les participants ont eu la surprise de voir Emmanuel Macron débarquer au milieu de leur conversation, en visioconférence. S’il n’a pris la parole que cinq minutes, les propos qu’il a tenus ont clairement montré qu’il était prêt, selon son expression favorite, à «prendre son risque».
Selon un des participants, Emmanuel Macron a expliqué qu’il envisageait la possibilité de présenter sa démission pour provoquer, «dans les semaines ou les mois à venir», une élection présidentielle anticipée. L’objectif du chef de l’État est clair: reprendre politiquement la main dans une période troublée, persuadé de prendre de court ses adversaires. Il l’a d’ailleurs confirmé à ses interlocuteurs, sollicités pour lui apporter des fonds: «Je suis sûr de gagner car il n’y a personne en face.» De fait, si la gauche s’est refait une santé aux municipales, elle aura du mal à s’entendre sur un seul nom pour une élection présidentielle. Quant à la droite, elle est elle-même divisée entre un Xavier Bertrand décidé et un François Baroin hésitant, qui a repoussé sa décision à l’automne.
«Par principe, nous n’écartons aucune hypothèse»
Sans dire s’il avait pris sa décision, Emmanuel Macron a quand même osé évoquer ce scénario devant plusieurs personnes, sans mentionner les autres possibilités institutionnelles comme le changement de premier ministre dont bruisse tout Paris. Contacté, l’Élysée explique que «par principe, nous n’écartons aucune hypothèse», avant d’ajouter: «L’hypothèse de la démission n’a jamais été à l’ordre du jour ni même évoquée dans une réunion à l’Élysée.»
Rien ne dit qu’il optera pour cette solution radicale qui présente de nombreux risques. Depuis 1958, les Français ont dû voter à deux reprises de manière anticipée à une présidentielle. En 1974, à la mort de Georges Pompidou et en 1969, après la démission du général de Gaulle. Mais jamais un président en exercice n’a démissionné pour se représenter dans la foulée. Comment les Français réagiront-ils? Emmanuel Macron, s’il choisissait cette hypothèse, devrait trouver des arguments percutants pour convaincre les électeurs. La situation économique et sociale pourrait lui permettre de justifier son choix pour se relégitimer. D’autant que la campagne électorale serait très courte: l’article 7 de la Constitution précise qu’«en cas de vacance, le scrutin pour l’élection du nouveau président a lieu […] vingt jours au moins et trente-cinq jours au plus après l’ouverture de la vacance». «On entre dans un cycle de réflexion et de consultations, prévient l’Élysée. Dans ce contexte, tout est regardé.» La décision d’Emmanuel Macron sera connue «dans les semaines ou les mois à venir».
Source: Le Figaro. 11 juin 2020