Tribune Juive

Dans mon pays de cocagne

Nous sommes confinés depuis samedi 14 mars : ça fait 18 jours …

J’ai la trouille pour mes enfants et mes petits enfants.

Et j’ai la trouille des hôpitaux de Paris avec trop peu de lits médicalisés, trop peu d’appareils de respiration, de masques, de matériel …

Rue de Seine, Paris 6ème

Des infirmières, des aides soignantes font tout le travail et on on devrait tomber à genoux devant elles.

Les médecins se démènent, se contredisent parce qu’ils ne savent pas et qu’ils ont peur de se tromper.

Être malade aujourd’hui c’est un cauchemar inimaginable.

Ils avaient essayé de combler le gouffre sans fond des dépenses de santé et ils se retrouvent en guerre ( ce fût répété six fois) sans l’avoir préparée. Ils font ce qu’ils peuvent maintenant. Ils passent à la télévision 2 fois par jour et ils envoient l’armée installer en 10 jours des tentes médicalisées pour accueillir 30 malades en tout.

Il déplacent des malades d’un coin de l’ Hexagone vers un autre pour pouvoir les soigner. Il faut 150 personnes pour déplacer 10 malades ! Les gens sont apeurés mais ils restent méfiants et réticents.

On voulait coupler une médecine libérale de ville avec carte Vitale plus mutuelle et des hôpitaux publics avec services d’urgence devenus dispensaires à tout faire pour toute la misère du monde. Aujourd’hui, il y a la moitié des lits de réanimation nécessaires pour faire face aux ravages du virus. En Allemagne, il y a tout ce qu’il faut.

Je ne suis pas en colère. Je ne suis pas révolté. Mais j’ai honte !

Je me croyais invincible dans mon pays de cocagne, du moins pour moi . Et je me retrouve balloté de mensonges en promesses et j’ai la trouille.
Ils n’ont pas les moyens matériels pour me soigner, pour me ventiler et m’offrir plus qu’une sédation. Ils vont se consacrer à sauver les plus jeunes et ne pas s’occuper de moi. Normal.

Jardin du Luxembourg

Quand j’avais 18 ans, pour moi, la France c’était Paris, c’était la rue Soufflot qui descend du Panthéon au Jardin du Luxembourg où les chaisières nous faisaient décamper, la Fac de Droit et la Sorbonne par la rue Saint Jacques ou le Boulevard Saint Michel. Heureux temps !

Ensuite ce furent les études et les 28 mois de service militaire pour faire comprendre que « Al-gé-rie fran-çaise » c’était fini.

On se rencontre et on se plaît. Beaucoup. On se marie. On reste un couple et on avance : le travail, les enfants, les conflits, les maisons, les impôts, les vacances…

Place Saint-Germain-des-Prés, Paris 6ème

Et les copains, les cafés de la rue Saint Guillaume à la rue de Seine, le long du Boulevard Saint Germain. Ciel gris, 18 degrés, le temps de Paris puis la déchirante douceur du printemps parisien et les terrasses qui débordent.
La politique et la gauche et la droite … . Un système économique efficace mais cruel ou une pseudo égalité, ils ont tous échoué.

Les années défilent. Très vite. Les plus belles sont celles qui te restent à vivre.

Un virus !

Ce pouvait être une maladie sordide avec des médecins, des spécialistes, des ordonnances et des soins pour que je reste attentif au lent cheminement de mes douleurs secrètes.

Non, un virus et dans mon pays de cocagne, il n’y a pas de place pour soigner ceux qui se sont tant battus.

André Simon Mamou

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