Tribune Juive

Jérôme Cordelier. EXCLUSIF. Communautarisme : la feuille de route du gouvernement

« Le Point » s’est procuré le document interministériel qui sert de base au grand plan de lutte qui sera bientôt annoncé par Emmanuel Macron.

Emmanuel Macron prend son temps avant de présenter son plan contre le communautarisme. Il devrait commencer par un déplacement à Mulhouse le 18 février, sur le thème du financement des mosquées. © YOAN VALAT

C’est un document confidentiel de 31 pages, daté de janvier, dont Le Point a obtenu un exemplaire.

« Stratégie de lutte contre l’islamisme et contre les atteintes aux principes républicains« 

Un document interne au gouvernement, piloté par Matignon et qui rassemble les contributions des différents cabinets ministériels en vue d’accentuer la lutte contre le communautarisme, et plus précisément, c’est son titre, d’échafauder une « stratégie de lutte contre l’islamisme et contre les atteintes aux principes républicains ».

C’est le plan de travail qu’Emmanuel Macron a sur sa table, pour décider des mesures à mettre en œuvre sur des préoccupations majeures pour les Français et l’avenir du pays.

Sur ce sujet explosif, charriant criminalité, peurs et fantasmes, le président de la République a voulu se donner le temps pour consulter et réfléchir, avant de passer à l’action. Une séquence qui commencera par un déplacement mardi 18 février, vraisemblablement à Mulhouse, sur la question du financement des mosquées.

Emmanuel Macron souhaite aller plus loin…

Ce document est un rapport de travail qui ne constitue donc pas le projet et qui, jusqu’à la dernière minute, est susceptible d’évoluer – l’annonce du plan qui devait avoir lieu il y a quelques jours a été reportée, Emmanuel Macron souhaitant aller plus loin sur certains points, selon nos informations. 

Mais il donne les grands axes et les principales mesures au fondement de la politique gouvernementale. Porté par le Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR), c’est un rapport riche, qui se déploie dans tous les domaines, engage la plupart des ministères régaliens, propose un catalogue de mesures à la fois hautement symboliques et très pragmatiques, renforce les dispositifs répressifs, affermit un contrôle serré des influences étrangères mais mise aussi, et fortement, sur l’éducation, la culture et, point majeur évidemment, la promotion de la laïcité. Sans déboucher sur une loi spécifique, il permettra – à le lire – des aménagements législatifs dans plusieurs domaines et surtout sert déjà de feuille de route pour les différentes administrations.

Un état des lieux alarmant

Au départ, les auteurs ciblent « des groupes d’inspiration religieuse rigoriste, prosélyte, porteurs pour certains d’un projet politique de sécession » à l’œuvre dans certains quartiers déjà soumis à des facteurs de fragilité (pauvreté, délinquance).

À partir des diagnostics des préfets dans le cadre des « plans de lutte contre la radicalisation » mis en place dans 15 quartiers, ils soulignent : « la présence de lieux de culte représentant une mouvance islamiste ; le développement, par ces mêmes groupes religieux, d’une offre associative dans les champs para-éducatif, scolaire, sportif qui tend à devenir dominante dans certains quartiers et à faire émerger un écosystème parallèle ; une emprise qui s’étend également aux commerces de proximité ».

Ils notent la forte hausse, à l’échelle nationale, du nombre d’élèves du 1er degré scolarisés dans des écoles hors contrat – 46 000 en 2018, soit 17 % de plus par rapport à 2017. Précision : « Si l’on se concentre sur les établissements à caractère confessionnel musulmans, la hausse est même de 60 % entre 2016 et 2018, selon des chiffres du ministère de l’Éducation nationale

Plus préoccupant encore, « le nombre d’enfants « instruits en famille » s’élevait à 30 139 au cours de l’année scolaire 2016-2017, soit 21 000 de plus que lors de la dernière enquête, qui concernait l’année scolaire 2014-2015. Plus des trois quarts de l’augmentation se fait en dehors d’une inscription réglementée au Cned ». 

À cela s’ajoute, le phénomène des listes communautaires pour les élections, qui témoignent que « ces tendances centrifuges/sécessionnistes commencent à trouver une traduction politique ».

4 axes et 25 actions

Face à cet « état des lieux » alarmant, le document de travail du gouvernement propose 25 actions, réparties autour de 4 axes.

« L’emprise islamiste »

Réformes de fond

Frapper le communautarisme à ses racines, c’est évidemment une bonne manière de prendre le problème à la base et d’éviter qu’il s’enkyste. Si ce n’est déjà, malheureusement, le cas dans certains quartiers. Dans un contexte national et international de fortes tensions, l’urgence à agir devient pressante, et depuis longtemps…

Grand reporter au Point, Jérôme Cordelier a publié plusieurs ouvrages, notamment sur les questions religieuses.

Source: Le Point. 15 février 2020.

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