Tribune Juive

Sarah Cattan. Affaire Halimi: Interroger le Parquet Général de Paris, ça n’est pas une injure à la justice.

Dans l’Affaire Sarah Halimi, concernant l’Arrêt rendu par la Chambre de l’Instruction, reviennent, obsédants, les qualificatifs surréaliste, hallucinant, indécent, et, concernant l’Instruction elle-même, ceux de baroque, fantaisiste, inédite.

Les réactions…

3 types de réactions sont à noter :

– L’extrême prudence de ceux qui, lorsqu’ils ne sont pas lâches, trouvent excuse et même mérite à ne pas s’exprimer, lorsqu’ils se taisent, n’ayant pas suivi l’Affaire, le silence des media aidant mais ne les exonérant pas de leur désintérêt.

– Celles qui montent une après l’autre au créneau : je parle ici de ceux que d’aucuns appellent, avec une condescendance certaine, Les communautaristes, et que moi je vais m’obstiner, faisant abstraction des obsessions propres aux réseaux sociaux, à nommer les Français juifs. Ces réactions qui disent, maladroitement lorsque la chose se fait par le biais du CRIF ou du Rabbin Korsia, la consternation collective des Juifs de France. Comme si décidément il fallait être Juif pour être, par cette décision incompréhensible, consternés. Comme s’il fallait être Juif encore pour être révulsés par ce qu’on nous sert ici en termes de philosophie : celle de l’Irresponsabilité.

Et puis, the last but non the least, les réactions, indignées, colorées d’un zeste de mépris, un peu à la mode Askolovitch lorsqu’il évoqua[1] cette vieille dame assassinée qui paniquait la communauté juive, de Ceux du métier : Pénalistes qui, à l’instar d’un Régis de Castelnau ou d’un  Christian Saint-Palais qui vous demandent de passer votre chemin, ignorants du Droit, ce Droit que vous seriez en train de molester, piétiner, par vos commentaires injurieux et absurdes, parce que vous avez osé discuter une décision et l’interroger, voire la critiquer, ce qui pour eux revient à discréditer et injurier les juges.

Rejoints parfois par leurs amis, qui se trouvent ici être une journaliste respectée[2], laquelle se perd en vous adjurant de vous calmer, Vous, Vous qui, parce que Juifs, seriez, de facto, suspects de communautarisme. Juif de surcroît.

Que le Parquet général de Paris daigne répondre…

Nous ne nous arrêterons pas. Nous ne nous tairons pas. Nous revendiquons le droit de commenter une décision rendue, et, surtout, de fustiger ce qui ici ressemble fort à une anomalie, ce qui éveille en nous une douteuse et nauséabonde suspicion : Chacun sait que cette affaire est scandaleuse, et si d’aucuns en appellent à la Ministre et d’autres au Président, Nous posons cette question au Parquet général de Paris[3] : Qu’il nous explique ce qui a bien pu le conduire à prendre des réquisitions totalement opposées à celles qu’avait prises le Parquet de Paris à l’issue de l’instruction.

Qu’il nous soit expliqué Pourquoi la Bouffée Délirante Aigüe de notre individu, conséquence de sa consommation consciente et volontaire de substances, doit ici l’exonérer de toute responsabilité pénale.

Pourquoi, in fine, la Cour a-t-elle ici pris le contrepied de décisions jusqu’alors adoptées par le plus élémentaire bon sens.

Pourquoi l’avis du Procureur de la République de Paris, celui du Docteur Zagury  et des Avocats des Parties civiles ont-ils été rejetés au profit de l’expertise d’un Diafoirus qui a écrit et dit ensuite tout et son contraire, concluant dans son expertise à une schizophrénie du meurtrier avant que d’aller se dédire[4]il s’était trompé– et de nous servir en guise d’arguments des clichés aberrants : tout cela était aujourd’hui fort banal, nous allions d’ailleurs légaliser tout ça, et puis, concernant notre nouvelle victime – car nous en sommes là- Il ne savait pas.

Pourquoi donc, face à des expertises contradictoires et de surcroît, pour deux d’entre elles, rocambolesques, décider de s’en tenir malgré tout au strict diagnostic médical, et d’ici nous servir la culture de l’irresponsabilité.

Pourquoi enfin, lorsqu’en l’affaire, il y a irréfutablement, matière à discussion, n’en réfère-t-on pas à une Cour d’assises : Regardez ici, l’exemple-type qui nécessitait d’en référer à un débat devant la Cour d’assises :

– Un Procureur de la République qui opte pour la responsabilité pénale face à un Procureur général qui dit le contraire.  

– Des experts dont les conclusions s’opposent.

Pourquoi avoir fait ce choix scandaleux de l’irresponsabilité pénale, sans autre forme de procès, par un Arrêt qui ressemble à une forme de capitulation, voire d’aveuglement, faisant quasiment du bourreau la nouvelle victime qui ne saurait, quel que fût son forfait, être tenue pour entièrement responsable, au vu de toutes les souffrances qui furent les siennes, et que Nous, renonçant à tout humanisme, et peut-être à cause de ce putain de communautarisme, voudrions ignorer.

Elisabeth Lévy et l’étrange obsession du communautarisme

Et si je me permets ce qualificatif de fort mauvais goût, c’est pour avoir, éberluée, entendu Elisabeth Lévy nous crier, au micro de Benjamin Petrover, qu’il suffisait, ce communautarisme ! Quoi ! Il faut, osa-t-elle dire, arrêter de monter au rideau en hurlant a l’antisémitisme dès que quelque chose nous déplaît, cette levée de boucliers juive est inquiétante, sinon dangereuse. Il n’y a pas de justice antisémite. Dans quel monde vit-on, finit-elle, exaspérée comme elle sait l’être souvent pour de justes causes, allant jusqu’à parler … d’aberration : C’est, au mot près, ce qu’a dit le 23 décembre cette journaliste que je respectais, se prétendant ahurie par notre méconnaissance des règles du droit, des règles de la justice.

A quoi nous lui suggérerions, un peu comme le fit Francis Szpiner s’adressant à Régis de Castelnau en évoquant le danger de parler des dossiers qu’on ne connaît pas, de s’abstenir, avant de mieux se renseigner. Ce qui lui éviterait de nous servir, comme argument numéro 1, qu’il fallait se plier aux conclusions des expertises, et en argument 2, que des experts juifs, juifs entendez-vous, n’allaient tout de même pas être suspectés … de mauvaise foi, voire pire, concernant Sarah Halimi.

Exactement la thèse de Maître Cohen qui s’obstinait, tout en reconnaissant qu’il ignorait le dossier, à nous rappeler[5] qu’une société éclairée ne jugeait pas … ses fous.

Faut-il vraiment rappeler à Elisabeth Lévy et ses amis que lorsque les français juifs ont parlé, ils ont parlé de l’arrêt rendu. Et donc, obligatoirement, ont dû, s’interrogeant sur tout ce qui rend le traitement judiciaire de cette tragédie inédit, questionner la gêne évidente de parler de l’antisémitisme islamiste.

Elisabeth Lévy le sait comme chacun de vous : L’Affaire Sarah Halimi justifie pleinement un procès. Tant la décision rendue est injuste et nocive pour toutes les parties. Et exiger un procès en Cour d’Assises, ça n’est pas, dans un État de droit, faire un procès d’intention aux juges : La société a droit à la vérité. L’assassinat de Sarah Halimi, tuée en tant que femme juive, par un islamiste antisémite s’inscrit dans une série de crimes de même nature. S’il est juste que la responsabilité individuelle de l’auteur du crime soit reconnue, il est juste aussi que soit établie et reconnue publiquement la responsabilité de l’islamisme dans ces crimes antisémites, d’autant que cette menace islamiste qui concerne toute la société française doit être établie dans les règles du droit[6] : c’est ce que rappelle André Senik dans Causeur, ce 26 décembre.

Il faut prendre connaissance de l’imposture inédite du rapport d’expertise qui a pourtant fait pencher la balance, concernant ce schizophrène de circonstance dont Bensussan veut bien reconnaître qu’il est une graine d’Islamiste, doublé d’un brin d’antisémitisme, et au sujet duquel l’expert reconnaît, à la barre, s’être trompé, (Traoré n’est pas schizophrène), sans pour autant … revenir sur ses conclusions.

Est-on disqualifiés parce que Juifs: non

Joann Sfar a le tort d’être Juif. Disqualifié pour parler de la chose. Franz-Olivier Giesbert ? Trop philosémite pour être crédible lorsqu’il évoque[7] La honte du 19 décembre.

Le silence médiatique assourdissant qui accompagna l’assassinat de Sarah Halimi, le revoilà, en pire : sont accusés les Juifs qui portent la voix. Réflexes communautaires, leur rétorque-t-on. Hystérie collective. Lamentations de cette Frange excitée de la communauté juive.

Il faudrait se taire. Ne surtout pas dire que l’antisémitisme islamiste a tué, car Eux ils entendent : La France est antisémite. ET Sa justice aussi.

Ô l’indicible défaite

Ils sont décidément atteints de cécité face à l’islamisme. Ils ont peur. Ou alors ils ont capitulé. Ou les deux. Ô l’indicible défaite.

A laquelle nous ne participerons pas. Continuant, sans en rien céder à l’émotion,  à dénoncer, à l’instar d’un Francis Szpiner, ce débat escamoté, mené sur la base de trois expertises sujettes à caution, présentant des divergences manifestes et, pour l’une d’elles au moins, des erreurs grossières, et attendant que la Cour d’assises se prononce, elle, à l’issue d’un débat public fouillé, dans lequel seraient entendus les policiers, les voisins, les personnes séquestrées avant le meurtre de Mme Halimi, d’autres experts, M. Traoré lui-même, statue. Les français juifs se plieront à la décision prise, quelle qu’elle soit.


[1] Slate. 7 avril 2017.

[2] Elisabeth Lévy.

[3] Le « Parquet » est, dans la langue du Palais, la dénomination par laquelle il est d’usage de désigner les services que dirige le Procureur de la République, alors que « Parquet général » est le nom donné aux services que dirige le Procureur général soit dans une Cour d’appel soit auprès la Cour de Cassation.

[4] La Croix.

[5] Radio Kol Aviv. Dimanche 22 décembre. 11 heures.

[6] André Senik

[7] Le Point. 24 décembre.

https://omny.fm/shows/kan

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