Une controverse agite ces jours derniers les français Juifs. Ne voilà-t-il pas qu’il nous est revenu que, consulté sur la question de savoir si on pouvait admettre un Juif libéral dans un minian – le quorum de 10 personnes requis pour un office à la synagogue –, un docte de la loi, professant sur Torah Box, a répondu par la négative en invoquant des raisons … fort discutables…

Le principe même de la question en a remué plus d’un : Outre qu’ il y a 80 ans, les nazis accueillaient les Juifs sans discrimination aucune dans les wagons qui devaient les conduire dans les chambres de la mort, qu’Esther Grimbert a rétorqué que si un juif, qu’il soit athée, communiste, religieux ou libéral, pouvait compléter un wagon en 1942 , Thora Box or not Thora Box, il pouvait donc, quelle que fût sa tendance ou sa non tendance, compléter largement un minian, pour ma part, je ne sache pas avoir vu que, avant de procéder à un office, on demandât à tous les fidèles présents à quel courant communautaire ils appartenaient. Pour faire le tri et éventuellement exclure les importuns. Les mauvais Juifs.
Par ailleurs, le corollaire d’une telle affirmation est que si on n’accepte pas un Juif libéral dans un minian, on ne doit pas non plus accepter de Juifs non religieux. Or, dans une synagogue, lorsqu’ on demande un Cohen ou un Lévi pour monter à la Torah, si une personne se présente comme tel, on n’est pas supposé mettre sa parole en doute. De même, lorsque le kaddish est dit, nul gage de judéité n’est exigé… Comme j’en sais, des rabbins non libéraux, empreints de tolérance et vous accueillant sous leur talith.
Ces rabbins, nombreux, majoritaires, ont choisi, au lieu que de d’offusquer, d’approcher avec bienveillance tous les Juifs, fussent-ils Juifs dits « de kippour ».
N’est-il pas temps aujourd’hui de réagit à ces honteuses et répétées publications-excommunications diffusées par un organisme extrémiste qui prétend répandre son influence sur le judaïsme mondial, faisant allégeance à leurs maîtres lituaniens, radicaux qu’ils veulent imposer comme référence du judaïsme, alors même qu’ils ne respectent pas les lois du pays et s’opposent au service militaire.
Alors même qu’ils bannissent toute présence féminine dans leurs communication, se demandent comment soigner l’homosexualité, cette maladie dont il s’agit de se défaire, se rapprochant ainsi des plus grands extrémistes islamistes lorsqu’ils exhortent la gent féminine à se conformer aux règles par eux édictées de la « tsnioute », terme désignant la pudeur de la personne mais que eux ont volontairement réduit à la longueur des vêtements féminins, ils interdisent à leurs enfants l’accès à Internet, si le site n’est pas estampillé … casher.
Sachez enfin que cette association est à assimiler aux Haredim et qu’elle est allée jusqu’à affirmer qu’il était interdit de répondre « Amen » aux bénédictions de Juifs libéraux au sein d’une syna.
Haïm Dynovisz, qui œuvre pour une communauté juive plus diversifiée, a affirmé suite à cette affaire de minian que les rabbanims de Thora Box n’étaient rien moins que des falsificateurs et des bandits qui se faisaient passer pour des rabbins.
Parallèlement, Daniel Farhi, Juif libéral, s’est offusqué du fait qu’un « Juif libéral » ne pût compter dans une prière en Minian, excluant ainsi une grande partie du peuple juif : Heureusement, a-t-il répondu, d’autres s’emploient à accueillir les très nombreux Juifs sur lesquels vous prononcez vos excommunication. Votre lecture rigoriste de la Halakha entraîne loin des synagogues et des maisons d’étude. Je déplore votre attitude et vous engage à peser vos paroles.
Evidemment, à tout ça, Thora Box tenta de répondre, et le fit mal, confiant sa défense au Rav Garcia :
Lequel expliqua que le fait même qu’un non-religieux vînt à la synagogue prouvait un effort (parfois grand) de sa part : il y a toujours eu dans notre peuple des religieux et des moins religieux, mais ce qui est important, c’est que les non-religieux aient toujours conscience de leur statut, et chacun à son niveau comprend et sait où se trouve le « vrai » judaïsme…
Mais il crut bon ajouter : Malheureusement, notre histoire a dû faire face à des nouveaux mouvements (dont vous faites partie) qui ont voulu métamorphoser notre religion de l’intérieur et nous faire croire que ce sont eux qui détenaient la vérité… L’histoire nous montre bien que ses idées ont très vite mené le peuple juif à mettre de côté la loi juive et à préférer la belle philosophie qui a ouvert la porte à une assimilation grandissante et aux mariages mixtes. […] On peut donc s’appeler rabbin, mais si on innove des idées autodestructrices, et si on s’efforce de faire croire à notre peuple que la vérité est celle des réformistes et des libéraux, on est aussitôt catalogué par nos Sages comme étant « Hoté Ouma’hti Ete Harabim », fautant et entraînant les autres à fauter. […] Les mouvements libéraux ont totalement changé et modifié toutes les règles.
Et de citer à l’appui de son plaidoyer des chiffres :
25% n’avaient pas circoncis leurs fils
68% n’allumaient pas les bougies de Chabbath
60% célèbraient le nouvel an chrétien avec l’installation du sapin et l’achat de cadeaux
70% pensaient que les enfants devaient prendre part aux chorales où étaient entonnés des chants chrétiens
50% célébraient la Pâques chrétienne
59% travaillaient le jour de Yom Kippour
80% mangeaient du ‘Hamets à Pessa’h
50% ne célébraient pas ‘Hanouka
35% affirmaient que le judaïsme ne comblait pas leurs besoins religieux
Toujours est-il que Torah-Box a retiré son poste polémique et injurieux sur les Juifs libéraux, déplorant qu’un simple débat eût été ainsi compris comme une volonté de de désunion et de scission de leur part.
Toujours est-il que nous continuerons à nous élever, aujourd’hui plus que jamais, face à ce qui s’apparente à un intégrisme farouche, à une intolérance flagrante. Et que nous rendrons grâce à ceux, nombreux, croyants, pratiquants ou non, qui privilégient la laïcité bien comprise.