Tribune Juive

Nusrat Jahan Rafi. Est-ce ainsi que les hommes vivent… Sarah Cattan

Elle a 19 ans. Elle s’appelle Nusrat Jahan Rafi.

Le 27 mars 2019, la jeune fille, soutenue par sa famille, se rend au commissariat pour expliquer que le directeur de la madrassa où elle étudie l’a agressée sexuellement dans son bureau, et qu’elle n’a dû son salut qu’à la fuite.

C’est le début de l’enfer, là où elle aurait dû trouver écoute et réconfort : la voilà en effet confrontée au comportement irrespectueux des policiers, l’un d’entre eux la filmant avec son téléphone, qualifiant de pas grand-chose les attouchements dont elle a été victime. Cette vidéo fuitera…

Le directeur de l’école coranique est cependant arrêté, mais ne voilà-t-il pas que des manifestations sont organisées par des étudiants pour réclamer la libération du saint homme.

Le 6 avril, Nusrat, malgré les menaces et le harcèlement dont elle est victime, retourne à l’école pour passer ses examens. Un piège lui est tendu : la jeune fille est attirée vers le toit, où, lui dit-on, une de ses amies est en train de se faire battre. La voilà cernée par des ombres en burqas. Aspergée de kérosène. Brûlée vive.

Ses meurtriers prennent la fuite : ils espèrent faire croire à un suicide.

Nusrat, secourue et conduite aux urgences, mourra de ses blessures le 10 avril.

Elle a eu le courage et la force morale d’enregistrer dans l’ambulance un message sur le portable de son frère : Le directeur m’a touchée, je me battrai contre ce crime jusqu’à mon dernier souffle. Elle précise que ses agresseurs sont élèves de son école.

Des milliers de personnes se sont réunies à Feni pour ses funérailles, des étudiants ont formé une chaîne humaine afin de demander justice, et de nombreuses manifestations ont lieu à Dacca pour dénoncer le traitement réservé aux femmes au Bangladesh.

15 personnes sont arrêtées.

L’agresseur est en garde à vue.

Le policier qui a filmé son dépôt de plainte a été relevé de ses fonctions.

La Première ministre Sheikh Hasina a promis qu’aucun des coupables ne sera épargné des poursuites judiciaires. Si en 2009, la Cour suprême du pays avait adopté une ordonnance portant la création de cellules de harcèlement sexuel dans tous les établissements, permettant à quiconque de déposer plainte, peu d’écoles appliquèrent la dite ordonnance.

Salma Ali, avocate et ancienne directrice de la Women Lawyers’ Association, a déclaré que lorsqu’une femme essayait d’obtenir justice pour des faits de harcèlement sexuel, elle devait de nouveau faire face au harcèlement : C’est le cas depuis des années, nous vivons dans une société qui intimide et humilie, et la police n’a pas la volonté d’enquêter correctement sur ces allégations, a-t-elle dénoncé au micro de la BBC.

Sources :

Dhaka Tribune. BBC

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