La Pologne s’est dotée d’une loi qui interdirait de la mettre sur le même plan que l’ Allemagne des nazis.
Il est vrai que les camps de la mort, usines à tuer , étaient situés en Pologne dans leur quasi totalité et qu’il était donc facile d’attribuer aux polonais une part dans la responsabilité des crimes .

L’antisémitisme des polonais à l’égard des communautés juives de leur territoire n’est plus à démontrer mais ont- ils eu un rôle actif dans cette tache indélébile de l’humanité que fut la Shoah ?
Plus de 70 ans après, il apparaît que la Pologne voudrait tourner la page, souhaite qu’on oublie de parler d’elle en évoquant cette période.
Nous avons reçu de l’un de nos lecteurs un texte que nous publions par respect des opinions de chacun et dont nous ne savons pas s’il est fondé ou non et s’il mérite d’être retenu. Que chacun juge en conscience.
Tribune juive
Pologne : Une pétition révisionniste?
La semaine dernière une pétition de 350 universitaires et artistes francophones dénonçait une « loi liberticide ». Cette pétition, publiée sur le site de Médiapart, appelle « le législateur polonais à reculer » sur le vote de sa loi mémorielle punissant toute personne attribuant à la Nation ou à l’Etat polonais la responsabilité des crimes nazis. En théorie l’objectif est noble : s’opposer à une loi liberticide et à « une insulte à la mémoire des rescapés du génocide ». Par contre on ne peut que s’interroger sur une pétition dont les recommandations permettraient, en s’affranchissant des faits, d’attribuer à la Pologne une responsabilité dans les crimes nazis alors qu’elle en fut une victime.
La loi polonaise mise cause dans cette pétition requiert trois conditions cumulatives pour être appliquée et deux exceptions. Ainsi il faudra tout d’abord qu’une personne attribue la responsabilité ou la coresponsabilité des crimes nazis perpétrés par le IIIe Reich allemand à la Nation ou l’Etat polonais. De surcroît cette attribution devra être publique. Enfin et surtout elle devra être à l’encontre des faits. Ainsi une personne qui dénoncera la perpétration de crimes nazis contre un ou des Polonais ne pourra être punie. Sauf à ce qu’elle déclare publiquement et contre les faits responsable des crimes nazis ; de manière collective, tous les Polonais. Or la déclaration se défend elle-même d’ « ignorer ou sous-estimer les souffrances des Polonais non-juifs sous l’occupation nazie, ni minimiser le courage et l’héroïsme des milliers de Justes polonais qui aidèrent et sauvèrent des Juifs. ». Aussi pourquoi cette pétition ?
Ce qui inquiète les signataires c’est selon eux que : «Contrairement à ce qu’affirment les autorités polonaises, la loi n’épargne ni les chercheurs ni les artistes. Mais là aussi l’argument n’est pas recevable. En effet la loi exclut de son champ d’application la recherche et l’art. En fait ce sont les arguments de l’avant dernier paragraphe de la pétition qui posent les plus graves problèmes.
Premier argument des signataires : « Au pénal, un article publié dans une revue scientifique ne sera pas mis en cause, mais le même article paraissant dans la presse sous une forme vulgarisée le sera. ». Il est exact que ce cas de figure n’est pas à exclure. Mais pour qu’il se réalise il faudrait cumuler les trois conditions d’application de la loi. A savoir publier dans la presse grand public un article qui, contre les faits, attribuera les crimes nazis du IIIème Reich à l’Etat ou la Nation polonaise. Or depuis toujours la Pologne est considérée comme une victime de la seconde guerre mondiale. L’Etat polonais n’a pas collaboré avec l’occupant, au contraire. La Pologne a été en partie annexée ou mis sous contrôle administratif allemand. Jusqu’à présent tous les historiens s’accordaient sur le fait que l’Etat polonais n’a pas collaboré avec les nazis qui estimaient les Polonais comme une sous-race et dont ils éliminèrent 17% de sa population. Donc un article qui attribuerait des crimes nazis à l’Etat polonais serait forcément une révision importante de l’histoire de la seconde guerre mondiale. Si ce cas n’est pas envisageable peut-on alors attribuer à la Nation polonaise une partie de la responsabilité des crimes nazis ? Ce serait affirmer que collectivement les Polonais sont responsables. Ce serait alors aussi une révision importante de l’histoire de la seconde guerre mondiale. Rappelons que, notamment, la Pologne est le pays qui compte le plus de justes parmi les nations et que nombre de Polonais ont essayé avant tout de survivre pendant cette période. A priori donc les inquiétudes des pétitionnaires sont infondées. Sauf à ce que certains tombent déjà sous le coup de cette loi.
Si l’on regarde de plus près cette pétition, on peut s’interroger sur sa volonté de protéger un certain courant. Celui de Jan T. Gross (cité en exemple dans la pétition) et ses disciples qui ambitionnent de révolutionner l’historiographie polonaise. Jan T. Gross, à l’origine sociologue, est l’auteur du livre « Les voisins :10 juillet 1941, un massacre de Juifs en Pologne ». Ce livre est controversé par nombre de spécialistes de l’histoire polonaise. Ce dernier revient sur le massacre atroce de Juifs par des Polonais à Jedwabne . Il est intéressant de noter que ce massacre est souvent cité dans la presse française qui ne modère pas la version de Gross et notamment les critiques d’historiens Américains, Français et Polonais. On rappelle très rarement que dans ce petit village non seulement les Allemands étaient présents mais, qui plus est, filmaient et photographiaient le massacre. On ne sait toujours pas s’ils ont organisé ce massacre, l’ont incité ou encadré. Mais de fait leur présence avérée avec des cameramen peut laisser soupçonner une préméditation. Dans tous les cas le massacre de Jebwane a été perpétré par certains Polonais, on ne peut dignement l’attribuer à la Nation ou l’Etat Polonais. Notons également que M. GROSS a fait scandale en déclarant en Allemagne « Les Polonais n’étaient pas sans raison fiers de la résistance qu’ils ont faite aux occupants nazis, mais en fait, pendant la guerre, ils ont tué plus de Juifs que d’Allemands ».
Les autres historiens de cette « école de pensée » ne sont pas en reste et sont quasiment les seuls à intervenir dans la presse grand public française. Ainsi dans Libération, Mme Engelking déclare : « Les Polonais sont en partie responsables de l’Holocauste ». Lorsque l’on dit les Polonais, cela ne signifie-t-il pas tous les Polonais dans leur ensemble ? Sans être historien mais en faisant œuvre d’un d’esprit critique tout en se rappelant nos cours d’histoire, n’est-ce pas une révision de l’histoire que l’on nous a apprise à l’école ?
M. Potel (un des auteurs de la pétition) dans une interview à BFMTV se scandalise que dans les nouveaux programmes scolaires polonais « La Pologne sera présentée comme une victime innocente des Allemands, oubliant les Polonais complices. » La Pologne est une victime innocente ? Cela veut-il dire qu’elle est une victime qui mériterait son sort ou alors que la Pologne (et non certains polonais) serait complice? Dans ce dernier cas ne peut-on se demander si n’est pas encore une révision de l’histoire admise ?
La loi votée par le parlement polonais pourrait effectivement poursuivre ses propos s’ils ne sont pas étayés par des faits et s’ils sont tenus publiquement. Par contre ces historiens ont tout le loisir de d’essayer de démontrer leurs dires dans le cadre de leurs recherches. En quoi est-il choquant de leur demander de prouver leurs affirmations? Surtout lorsque ces dernières, si elles sont inexactes, calomnient un pays ou une nation ? Si des historiens démontrer demain que l’Etat ou la Nation polonaise sont responsables ou coresponsables des crimes nazis ce serait une révolution. Par contre l’affirmer publiquement sans se baser sur des faits, n’est-ce pas de la calomnie? Cette interrogation est certes choquante mais nous ne doutons pas que les auteurs et signataires de la pétition réclamant le droit de s’affranchir des faits pour attribuer publiquement la responsabilité ou la coresponsabilité des crimes nazis à la Pologne, ne s’offusqueront pas de ce questionnement.
Patrick Edery