Tribune Juive

Des victimes sans bourreau ça n’existe pas, par Sarah Cattan et Yves Sokol

Si la République ne sait que pleurer les victimes sans dénoncer et nommer leurs assassins,  cette même République est malade. Elle encourt un grave danger.

A notre tour, citons l’auteur de L’étranger qui, dans l’étude intitulée Sur une philosophie de l’expression, publiée en 1944, rendait hommage à son ami Brice Parain duquel il nous expliquait que l’idée profonde était une idée d’honnêteté: la critique du langage ne peut éluder ce fait que nos paroles nous engagent et que nous devons leur être fidèles. Mal nommer un objet, c’est ajouter au malheur de ce monde. Idée à laquelle Camus adhéra si bien qu’il la reprit en 1951 dans L’Homme révolté : La logique du révolté est de s’efforcer au langage clair pour ne pas épaissir le mensonge universel. Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde.

Or notre République ment. Elle ment, par omission, à l’Histoire et à ses enfants. Ses dirigeants, en ne cessant, dans un ballet morbide, de se recueillir devant les  plaques commémoratives actuelles, se prosternent face à un mensonge, un de plus : aucune plaque dédiée aux victimes des attentats terroristes islamistes ne nomme ce terrorisme. Le terrorisme islamiste.

Ce faisant, aucune plaque dédiée aux victimes des attentats terroristes islamistes ne respecte les victimes, leur famille, et la Vérité historique : Il en est des plaques commémoratives comme des hommes : leurs textes et leurs paroles sont à géométrie variable, dénonçait récemment l’édito de Serge Hajdenberg sur Radio J[1].  

Quel sens auront-elles, ces plaques prétendant témoigner, lorsque nos enfants les liront sans savoir. Sans comprendre. Ces dédicaces au langage trouble qui viendront épaissir le mensonge universel.

Il fut un temps, pas si éloigné, où la France l’eut, ce courage qui lui fait cruellement défaut aujourd’hui. Un temps où elle nomma sur ses plaques l’assassin, précisant que celui-là était nazi et avait, en France, bénéficié de la complicité du Gouvernement de Vichy.

Allez les voir, les plaques apposées devant le Bataclan. A Nice. A Montauban ou Toulouse. Devant Charlie. Ou encore l’Hypercasher. Regardez-les. Vous qui savez que les attentats ont des auteurs, que le terrorisme a une  signature : les djihadistes, l’islamisme radical. N’êtes-vous pas troublés ?

Ne pas signaler clairement sur les plaques commémoratives la qualité des assassins relève du négationnisme : tant nazisme et djihadisme se ressemblent dans l’esprit de vengeance qui les anime mais aussi dans la stratégie d’élimination mise à l’œuvre.

Ainsi, à l’heure du réveil de la bête immonde, nommer l’ennemi est notre devoir.  Nous le devons à la mémoire des victimes. Nous le devons à nos enfants. Nous le devons à l’Histoire.

Faut-il dire que cette omission ne doit rien au hasard ou à une quelconque erreur. Albert Chennouf Meyer nous a raconté le combat qu’il mena pour que fût écrit le mot terroriste sur la plaque commémorative dédiée à son fils. Il raconta comment il dut se contenter de la mention Terroriste. Terroriste islamiste : c’était trop : il n’obtint pas raison. Il ajouta que certes c’était mieux que la légende de la photo qui illustra l’enterrement de son fils, décrit par le journaliste de l’ AFP News Agency comme abattu par Mohamed Merah.

Se contenter de pleurer ses victimes sans dénoncer et nommer leur assassin et dire qu’ici il est  islamiste serait la signature d’une République qui s’effondre. En effet, en n’inscrivant pas la mention  terrorisme islamiste, les dirigeants de France montreront qu’après avoir laissé le djihadisme ceinturer la petite et la grande couronne parisienne, étroitement associé qu’il est au crime organisé et au trafic de stupéfiants, ils ont de surcroît déjà intégré le remplacement de population[2] : accepterons-nous que l’Etat français se taise, mu par la hantise des émeutes maffieuses et djihadistes de 2005 et cette méfiance nouvelle envers des forces de police surmenées et mal payées dans lesquelles il a laissé s’infiltrer des éléments indésirables.

Faut-il enfin préciser que cette demande républicaine concernant les plaques commémoratives incomplètes est un souci français qui dépasse toutes les communautés. Si la République ne sait que pleurer les victimes sans dénoncer et nommer leurs assassins,  cette même République est malade. Elle encourt un grave danger, écrit chaque matin sur les réseaux sociaux Yves Sokol.

Monsieur le Président de la République Française, la réussite d’une telle demande serait une fierté retrouvée pour la France. 

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[1] 5 janvier 2018.

[2] Jean Taranto.

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