Guerre des Six-Jours: une victoire écrasante qui a stupéfié les armées arabes

Israël célèbre ces jours-ci le cinquantième anniversaire de ce conflit dans la liesse et la fierté.
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“Le temple est entre nos mains.» Il est environ 10 heures, mercredi 7 juin 1967, lorsque le colonel Mordechaï Gour transmet ce message et entre dans l’histoire. Les parachutistes de la 55e brigade, placés sous son autorité, ont reçu l’ordre un peu plus tôt de pénétrer dans la Vieille Ville de Jérusalem. Entrés par la porte des Lions, ils se sont emparés sans heurts de l’immense esplanade où s’élève le Dôme du rocher. L’un des soldats, ivre de joie, a escaladé l’édifice pour planter un drapeau israélien au sommet de sa coupole dorée. Puis on s’est précipité dans une ruelle qui descend vers le mur des Lamentations. Le photographe David Rubinger, qui s’est éteint le 2 mars dernier à l’âge de 92 ans, capture alors une image qui va faire le tour du monde. Près de deux mille ans après la destruction du Temple par les légions de Titus, un groupe de soldats israélien pose devant les pierres colossales vers lesquelles les juifs du monde entier tournaient depuis lors leurs prières. Le regard de ces jeunes hommes, noyé de fatigue, exprime aussi une émotion grave.

La guerre des Six-Jours, dont Israël célèbre ces jours-ci le cinquantième anniversaire dans la liesse et la fierté, a pris tout le monde par surprise. Les dirigeants du jeune État n’imaginaient pas, même dans leurs rêves les plus fous, qu’ils pourraient un jour s’emparer si facilement de Jérusalem-Est et tripler la superficie des territoires sous leur contrôle. Des arguments géopolitiques, plus encore que militaires, semblaient s’opposer à ce qu’ils tentent d’accroître les gains substantiels enregistrés à l’issue de la première guerre israélo-arabe (1948-1949). Mais l’attitude menaçante de l’Égypte et de la Syrie leur fournit le prétexte qui permit à l’armée d’engager cette campagne éclair.

Une période de doutes

La tension latente entre Israël et ses voisins, qui n’ont pas renoncé à reconquérir l’intégralité de la Palestine historique, s’accroît progressivement à l’automne 1966. Les incidents frontaliers, nourris par des désaccords persistants sur le tracé de la ligne de cessez-le-feu et le partage des eaux du Jourdain, se multiplient avec la Syrie. La mort de trois soldats israéliens lors de l’explosion d’une mine posée par l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) provoque un coup de chaud avec la Jordanie. Mais c’est sur le front égyptien que la situation s’envenime vraiment lorsque le président Nasser, mis en garde par les Soviétiques contre un prétendu déploiement israélien, hausse le ton. En mai 1967, il masse ses troupes dans la péninsule du Sinaï et annonce l’expulsion des Casques bleus déployés pour surveiller le cessez-le-feu après la crise de Suez. Puis va plus loin encore, le 22, en annonçant la fermeture du détroit de Tiran aux embarcations israéliennes. Comme en 1956, les navires basés dans le port d’Eilat, à l’extrême sud du pays, se voient du jour au lendemain privés d’accès à la mer Rouge.

Ce coup de force, dénoncé par le premier ministre Levi Eshkol comme un casus belli, excite les esprits. Les autorités israéliennes demandent aux États-Unis de dénouer la crise, tandis que le président Johnson les somme en retour de ne pas intervenir militairement. Un début de panique s’empare de la population, qui se met à redouter un nouvel Holocauste. Dix-neuf ans après la création de l’État et l’euphorie des premiers succès, la société israélienne traverse alors une période de doutes. La récession freine l’économie, l’intégration des diverses communautés qui la composent marque le pas et les critiques se multiplient contre l’élite travailliste qui domine le pays. Face au bellicisme affiché par les pays voisins, l’irrésolution de Levi Eshkol ne contribue guère à rassurer les foules. Certains de ses ministres affirment qu’Israël peut fort bien vivre sans accès à la mer Rouge et l’encouragent à temporiser.

Les généraux et leur chef d’état-major, Yitzhak Rabin, le pressent au contraire d’agir vite. «Je sens qu’un nœud militaire et diplomatique est en train de se resserrer sur nous (…) et que nous allons nous trouver dans une situation militaire qui risque de constituer un sérieux danger pour l’existence même d’Israël», met-il en garde, le 3 juin, lors d’une réunion du cabinet. Un gouvernement d’union nationale intégrant le Herout (droite) de Menahem Begin vient d’être constitué en urgence. Le général Moshe Dayan, héros de la première guerre israélo-arabe, est rappelé de sa retraite pour prendre la tête du ministère de la Défense. Le feu vert à une attaque préventive, qu’on prendra soin de justifier a posteriori par une prétendue provocation égyptienne, peut désormais être donné.

L’opération Moked, qui mobilise la quasi-totalité de l’aviation israélienne, débute le 5 juin à 7 h 45. Ses appareils, après avoir survolé la Méditerranée à très basse altitude, mettent soudain le cap au sud et bombardent les aérodromes où sont basés quelque 340 avions militaires égyptiens. L’immense majorité de l’aviation ennemie est détruite et une centaine de pilotes sont tués. Dix-neuf appareils israéliens ont également été abattus mais l’opération est un triomphe. L’Égypte, qui constituait jusqu’alors la principale menace pour l’État hébreu, est neutralisée. Aucun pays de la région n’est désormais en mesure de contester sa supériorité aérienne et la suite des événements s’enchaîne à grande vitesse. Quelques minutes seulement après le début de l’opération aérienne, les 70.000 hommes et 700 blindés israéliens amassés à la frontière sud sont entrés en action dans la bande de Gaza puis se sont enfoncés dans la péninsule du Sinaï. L’armée égyptienne, qui tente d’abord de s’opposer à leur progression, est contrainte de se replier. Un très grand nombre de ses soldats succombent aux assauts de l’ennemi ainsi qu’aux morsures du soleil et de la soif, tandis que les commandos de Tsahal prennent pied en surplomb du canal de Suez.

Stupeur et fascination

La Jordanie, qui n’avait à l’origine apparemment pas l’intention de croiser le fer avec Israël, se trouve aspirée dans le conflit dès le 5 juin. Malgré les premiers revers subis par son armée, Nasser parvient en effet à convaincre le roi Hussein qu’il s’apprête à remporter une victoire écrasante. Ne voulant pas rater pareille occasion d’étendre son territoire à peu de frais, celui-ci ordonne à ses troupes de bombarder Israël et de se lancer à l’assaut d’un no man’s land situé au sud de Jérusalem. L’État hébreu riposte par des tirs à l’arme légère pendant que Levi Eshkol, peu enthousiaste à l’idée de lancer la guerre sur tous les fronts, fait savoir au souverain qu’il est encore temps d’arrêter les frais. Mais les armées arabes, sourdes à ces appels, intensifient leur offensive. Moshe Dayan ordonne alors de contre-attaquer à Jérusalem-Est, tout en hésitant longuement à pénétrer dans la Vieille Ville. Le spectre des condamnations internationales que ne manquera pas d’attirer la capture des lieux saints par Israël l’engage à la retenue. Jusqu’à ce qu’une rumeur indiquant que l’ONU s’apprête à réclamer un cessez-le-feu, à l’aube du 7 juin, ne le fasse brusquement changer d’avis.

La chute de Jérusalem, immédiatement suivie par la conquête de Bethléem, de Hébron, de Naplouse et du plateau du Golan, précipite la fin des hostilités. Un cessez-le-feu est signé le 11 juin. Cette victoire totale provoque la stupeur et la fascination du monde entier. Les Israéliens enregistrent un brusque regain de confiance dans leur pays tandis que de nombreux Juifs américains et français décident de venir s’y installer. «Ce jour, nous l’avons tous vécu comme un miracle attendu par notre peuple depuis près de deux mille ans», glisse le maire de Jérusalem, Nir Barkat. Moshe Dayan, sitôt le calme revenu, a pour sa part ordonné de décrocher le drapeau à l’étoile de David qui venait d’être planté sur le Dôme du rocher. Ce lieu saint aussi important pour les juifs que pour les musulmans, annonce-t-il, sera dorénavant administré par la Jordanie. Reste maintenant à déterminer le sort des territoires conquis durant ces six folles journées. La ville de Jérusalem sera annexée quelques jours après la fin de la guerre, tout comme le plateau du Golan le sera treize années plus tard. La péninsule du Sinaï fut pour sa part restituée à l’Égypte en 1982 et la bande de Gaza évacuée en 2005. Le sort de la Cisjordanie, seule, n’a jamais été tranché. Il demeure, un demi-siècle plus tard, en suspens.

Source lefigaro

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2 Comments

  1. “Moshe Dayan, sitôt le calme revenu, a pour sa part ordonné de décrocher le drapeau à l’étoile de David qui venait d’être planté sur le Dôme du rocher. Ce lieu saint aussi important pour les juifs que pour les musulmans, annonce-t-il, sera dorénavant administré par la Jordanie.”

    Raison pour laquelle les arabes ne se sont pas déclaré vaincus ni accepté la défaite. Ils pourraient même remercier Dayan en fleurissant sa tombe…

  2. J’ai vécu en direct cette matinée du 5 juin grâce au vieux transistor familial, bientôt relayé par la télévision (une ou deux chaînes à l’époque). Aussitôt des manifestations de soutien à Israel ont commencé à se dérouler dans les villes de France.

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