Nous sommes partiellement juifs par Susan Katz Miller

Nous reproduisons ici une lettre significative qui fut publiée dans le New York Times quelques jours après la publication du PEW Research Center sur l’identité des Juifs américains, qui mettait l’accent sur l’accroissement considérable des mariages exogamiques dans la communauté juive.

“ Nous Sommes Partiellement Juifs ”

par Susan Katz Miller

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Hanoukkah à New York

New York Times, 1er novembre 2013
Ma famille célèbre Rosh Hashanah, Yom Kippour, Souccoth, Simhat Torah, Hanoukkah, Pessah’ et le Shabbat assez régulièrement. Nous célébrons également le jour de la Toussaint, la fête de Noël, la période du Carême et la Pâque chrétienne. Nous faisons partie d’un groupe grandissant de parents qui élèvent leurs enfants dans le respect des différentes traditions religieuses de leurs parents.
Bien que les responsables de la communauté juive considèrent que ce mode d’éducation pourrait semer la confusion dans l’esprit des enfants, je tiens à formuler mon objection à ce jugement erroné. En tant qu’enfant issu d’un mariage mixte et inter-confessionnel et d’un père dont la mère n’était pas juive, je refuse d’accepter cette conclusion par trop pessimiste. Mon expérience personnelle et ma recherche dans ce domaine, m’ont convaincu qu’on peut rester fortement attachés au Judaïsme, non pas en raison de la contrainte que les parents exercent sur leurs enfants, mais en raison d’une volonté et d’un choix personnels.
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Noël à New York

J’ai été amenée à réfléchir sur cette question quand j’ai lu le rapport du Pew Research Center qui vient d’être publié. Ce rapport a suscité toute une controverse aux Etats-Unis au sujet du nombre croissant des Juifs qui ne sont pas affiliés avec une institution religieuse et dont l’aliénation est souvent attribuée au taux élevé des mariages mixtes.
Cependant, peu de critiques ont pris note du fait que 25% des Juifs élèvent leurs enfants ” en partie dans la religion juive et en partie dans une autre confession. ” Etant donné que près de 1,8 millions d’enfants sont élevés dans des familles où un parent n’est pas juif, il en résulte que quelques 300.000 enfants sont élevés à la fois dans la religion juive et une autre religion. A New York , Chicago, Washington et ailleurs, un nombre de centres communautaires juifs et d’autres institutions offrent aujourd’hui un programme d’éducation juive et chrétienne aux enfants qui ont une double religion et les encouragent à participer à la fois aux offices religieux de la synagogue et à ceux de l’église. L’objectif de ces programmes n’est pas d’essayer d’intégrer les deux religions, mais d’aider les enfants à comprendre que les deux traditions sont distinctes et qu’il existe des différences importantes entre les deux.
Considérez ma situation, par exemple. Mon mari a été élevé dans une famille épiscopalienne. Il est l’arrière petit-fils d’un évêque. J’ai été élevé dans le Judaïsme libéral par ma mère qui était elle aussi épiscopalienne et seul mon père était juif. Je suis l’arrière petite-fille d’un rabbin de la Nouvelle-Orléans. Tout au cours de mon enfance, j’ai bénéficié des avantages et connu les inconvénients d’appartenir à l’une et l’autre de ces religions. Je me suis souvent sentie en marge de la majorité en tant qu’enfant d’un couple mixte et j’ai dû faire preuve de courage pour défendre mon adhérence au Judaïsme. Mon mari et moi avons voulu que notre fils et notre fille, grandissent au sein d’une communauté ‘inter-religieuse’, entourés d’autres enfants issus de mariages mixtes, plutôt que d’essayer de les intégrer dans une seule religion, où ils auraient pu ne pas être acceptés. Nous voulions qu’ils conservent des rapports avec les communautés religieuses de leurs parents.
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Mariage
de Chelsea Clinton avec Marc Mezvinsky

Pourquoi avons-nous choisi cette solution si controversée par la majorité des rabbins, pasteurs et prêtres qui préfèrent que les familles inter-confessionelles choisissent l’une ou l’autre religion ? C’est parce que nous voulions que nos enfants soient en quelque sorte “ bilingues ” dans les deux langues et traditions religieuses de leurs parents, afin qu’ils n’éprouvent aucune gène d’appartenir à une famille inter-confessionnelle. J’ai interviewé plus de 250 familles inter- confessionnelles afin d’écrire un livre sur ce sujet, et la majorité de celles-ci m’ont fait part des mêmes sentiments. Elles ne voulaient pas qu’un membre de leur famille se sente exclu dès le moment où il déciderait de participer à un office religieux à l’eglise ou à la synagogue; et cela indépendamment du fait que certaines institutions religieuses sont plus accueillantes que d’autres.
Les enfants qui grandissent dans ces communautés inter-confessionnelles et qui sont initiés aux traditions des deux religions, peuvent ainsi conserver un lien avec le Judaïsme. Mes enfants n’ont qu’un seul grand-parent juif, et sont à vrai dire, aux “ trois quarts ” chrétiens, car seul mon père était juif. Si nous avions suivi la règle de la majorité, il eût été logique de les élever dans la religion chrétienne, mais au lieu de cela, nous leur avons enseigné les prières essentielles, les chants et rituels du Judaisme et du Christianisme. Il est maintenant possible qu’après leur avoir communiqué un certain amour pour le Judaïsme et leur avoir enseigné des éléments d’hébreu et d’histoire dès leur enfance, ils choisissent plus tard de pratiquer le Judaïsme. Ce serait un avantage pour la communauté juive. Par ailleurs, il est possible qu’ils choisissent d’être chrétiens ou bouddhistes ou humanistes laïques, mais avec une connaissance et une affinité pariculières pour le Judaïsme. Je pense que même un tel choix devrait être un avantage pour la communauté juive.
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Au cours de mon enquête, j’ai aussi questionné plus de 50 adolescents et jeunes adultes qui avaient été élevés dans des communautés ‘inter-confessionnelles’. La plupart d’entre eux m’ont fait part du fait qu’ils se sentaient plus à l’aise dans une synagogue que dans une église. Parmi ceux qui avaient choisi de suivre une religion, la majorité avait choisi le Judaïsme plutôt que le Christianisme. Et parmi ceux qui avaient decidé de garder une identité ‘inter-religieuse’, beaucoup m’ont déclaré qu’ils avaient une plus grande inclination envers le Judaisme qu’envers le Christianisme.
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Synagogue à New York

J’appartiens personnellement au Groupe des Familles Inter-Confessionnelles de la région de Washington qui est dirigé à la fois par le Révérend Julia Jarvis et le Rabbin Harold White. Mme Jarvis m’a declaré : “ Je pense réellement que le Judaïsme a un attrait particulier pour ces jeunes, bien que nous n’exercions aucune pression pour qu’ils choisissent l’une ou l’autre religion. C’est l’expression d’un libre choix de leur part. ” Le Rabbin White alla même jusqu’à déclarer que ces communautés ‘inter-confessionnelles’ devraient contribuer à un accroissement de la communauté juive ”.
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Eglise à New York

L’auteur en conclut que “ Cette approche nouvelle qui consiste à donner à nos enfants des connaissances approfondies des religions de leurs parents, a le mérite d’apporter satisfaction aux parents et aux enfants, et de donner un avantage au Judaïsme. ”
Susan Katz Miller est l’auteur de “Being Both: Embracing Two Religions in One Interfaith Family” (Les Deux à la Fois: Appartenir à deux religions dans une famille inter-confessionnelle).
 texte transmis par Léo Abrami

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