Chronique : 7 janvier 2015, Le viol mémoriel

7 janvier 2017. Le cœur lourd. Un ami me rappelle ces mots de René Char[1], lus une première fois dans Une voix vient de l’autre rive, de l’ami Finkie[2]. Je veux n’oublier jamais que l’on m’a contraint – pour combien de temps ? – à devenir un monstre de justice et d’intolérance, un simplificateur claquemuré, un personnage arctique qui se désintéresse du sort de quiconque ne se ligue pas avec lui pour abattre les chiens de l’enfer. René Char écrivait cela contre les nazis et leurs complices, et François parle de nous tous qui désormais pensons cela, vivons cela, écrivons contre la terreur islamiste.

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7 janvier 2017. C’est un peu comme pour le 11 septembre : tous nous nous souvenons du moment précis. Guy Konopniki commence : Paris, quartier de Montparnasse. Premier jour d’une nouvelle session de formation à la Thérapie Sociale. Nous sommes au restaurant. Mon amie L. regarde son téléphone. Elle blêmit et m’informe. Sa collègue de bureau est la femme d’un journaliste de Charlie Hebdo (qui fera partie des victimes, mais elle ne le sait pas encore). Nous sortons dans la rue. Elle pour fumer une cigarette. Moi pour pleurer un bon coup. Charles mange à une table à côté. Je vais lui annoncer la nouvelle. Sa réaction me surprend : il s’y attendait. Il sait déjà depuis longtemps tout ce que j’apprendrai plus tard en m’informant par moi-même, sur l’islamisme, sur le wahhabisme, sur l’infiltration de cette idéologie dans les quartiers, sur ce totalitarisme qu’encore aujourd’hui trop d’entre nous ne voulons pas voir.

Nous et tant d’autres nous souvenons comment, envahis d’un sentiment d’urgence, nous vous avons saoulés à coup de prévisions sombres, cellules dormantes, djihad, vous redisant, alors que Noël approchait, que nous allions morfler. Ces réseaux islamistes tissant leurs toiles un peu partout, nous en entendions tous parler, et tous nous avons enfoui cela. Dans un coin de notre tête.

9 janvier 2015. Charlie n’était qu’un avertissement : l’attentat à l’Hypercasher a suivi. Après le carnage commis par Merah à Toulouse, la guerre se confirmait.

VIRTUOSE DE LA TAQYYA

Qui eût pu imaginer que deux ans après, ce soir 7 janvier 2017, le mentor des frères Kouachi, dit l’émir des Buttes-Chaumont, une fois purgés ses six ans de prison pour terrorisme, soit l’invité de Salut les terriens, escorté de l’usurpatrice Dounia Bouzar, présentée comme Docteur en anthropologie mais aussi qualifiée de Tariq Ramadan en jupon et virtuose de la taqyya[3] ( La dissimulation la ruse). Tous les deux en promo pour un bouquin que nous ne citerons pas. Supposés œuvrer pour la déradicalisation. Lui faisant son mea culpa. Nausées. Pensée pour les victimes de Merah, de Charlie et de l’Hypercasher. Elle, mauvaise actrice, fait montre d’une duplicité indicible et ose aller prétendre qu’aux USA, la CIA l’aurait appelé, notre djihad repenti, pour jouir de ses bons conseils ! Autant demander à une cigarette de mener la campagne anti tabac, avait déjà réagi Patrick Peloux. Etonnamment, la DGSI ne lui a pas proposé de rejoindre ses équipes, alors, un béret vissé sur la tête en lieu de keffieh, blouson de cuir et Rayban, le voyou repenti nous explique que son métier d’infirmier, il ne peut l’exercer aujourd’hui à cause de son casier judiciaire.

Alors il va et vient, donc, d’un plateau de télévision à l’autre, ce héros des temps modernes, et en attendant qu’un imbécile lui propose un film, il travaille comme formateur en déradicalisation au centre de prévention, de déradicalisation et de suivi individuel de Dounia Bouzar[4], la sociologue controversée, osant mettre son éloquence au service du désembrigadement.

Ardisson prétend avoir hésité, puis choisi d’écouter le dit repenti, histoire de se faire une opinion, dit-il. Moi j’ai vu dans le choix d’Ardisson un viol mémoriel. Le père d’Abel, un des soldats tués par Merah, nous exhorte à nous réveiller : J’en appelle au CSA pour faire respecter la loi et la mémoire de nos enfants.

Sarah Cattan

[1] Extraits des Billets à Francis CUREL, Recherche de la base et du sommet, NRF Poésie, Gallimard, 1965.

[2] Une voix vient de l’autre rive, Alain Finkielkraut, Gallimard, 2003.

[3] Jours fériés pour les musulmans, Crèche Baby Loup, Prières dans les entreprises, Liberté de porter le voile partout et à tout âge, etc : autant de sujets où cette dame montra son accord avec les islamistes.

[4] Elle fonda en 2014 le Centre de prévention contre les dérives sectaires liées à l’islam » (CPDSI)

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8 Comments

  1. Plusieurs avocats saisissent le CSA : Suite aux propos tenus lors de l’émission de Thierry Ardisson Salut les terriens, nous étudions avec Béatrice Dubreuil et Jean Tamalet la possibilité de toutes voies de recours devant le Conseil supérieur de l’audiovisuel ainsi que toute autre juridiction appropriée, afin qu’il y soit apporté une réponse des plus fermes, écrit Frédéric Picard, qui obtint avec ses deux collègues la condamnation de l’Etat pour défaut de surveillance de Merah : Le CSA va adorer instruire notre demande! Nous déposerons plainte dès lundi au nom des victimes qui trouvent immorale que l’on puisse se moquer d’eux. Axel Metzker vient d’annoncer qu’il saisissait lui aussi le CSA.
    Albert Chennouf-Meyer, le père d’Abel, un des militaires assassinés par le terroriste, explique que pour commémorer les 2 ans des attentats, Ardisson avait le choix d’inviter, parmi des centaines de parties civiles victimes des attentats de janvier 2015, une veuve ou un orphelin. Il a préféré le buzz en invitant le mentor des frères Kouachi, un choix de très mauvais goût et étonnant de la part de celui qui s’était juré de ne plus inviter ni Dieudonné ni Soral : Inviter le jour anniversaire le symbole du terrorisme islamique, en l’occurrence Dounia Bouzar avec son médaillon sur la poitrine qui affiche la profession de foi de cette religion “de paix et d’amour”, (alors qu’on a fait un flanc à Valérie Boyer pour sa croix), ainsi que celui qui a été le mentor des nazislamistes qui ont assassiné ceux qu’on pleurait hier, est une aversion pour nos enfants disparus, une agression morale et mémorielle et une souffrance de plus pour les familles de victimes et les français en général, dit Albert Chennouf Meyer, qui dévoile une information décoiffante : il y 4 ans, l’émission Salut les terriens avait refusé d’inviter ce père à l’occasion de la sortie de son livre : Abel, mon fils ma bataille. On lui opposa : “Idées incompatibles avec le vivre ensemble”. La pression, d’après Albert Chennouf Meyer, venait de Karim Rissouli, lequel à l’époque était consultant sur Canal+. Laurent Ruquier et Frédéric Taddei lui opposèrent le même refus. J’ai lu Abel mon fils ma bataille. Je n’y ai rien trouvé d’incompatible avec le “vivre ensemble”.

  2. Ils dénoncent une “scène d’une rare indécence”: Les sénateurs André Reichardt (Les Républicains) et Nathalie Goulet (UDI) ont saisi le CSA après le passage polémique de Farid Benyettou, ancien mentor des frères Kouachi, sur le plateau de “Salut des Terriers” samedi 7 décembre.

    Diffusée à la date du deuxième anniversaire de l’attaque de Charlie Hebdo, cette séquence “ne pouvait pas être vue autrement que comme une provocation à l’égard des victimes du terrorisme islamiste”, estiment les deux parlementaires, par ailleurs co-présidents d’une enquête sur la lutte contre les réseaux jihadistes

  3. Oui Guiborat. 900000.
    Le “mentor”, devant l’accumulation de plaintes, a déclaré qu'”il se retirait de la vie médiatique”. Sic.
    Par ailleurs mohamed Sifaoui a lu pour nous le bouquin que le duo venait défendre. Il l’a assassiné , le bouquin du dit repentir. Je vous posterai sa critique.
    Après, chacun peut le lire. Étrangement , je vais m’épargner cela et faire résolument confiance à mohamed Sifaoui.

  4. Ils sont très nombreux ceux qui ont réagi à cette invitation injurieuse et indécente.
    Après avoir immédiatement tweeté son regret de n’être pas parti, Baffie a remis une couche samedi 14/1.
    Il a reproché à l’animateur de ne pas avoir posé les bonnes questions à l’ancien mentor des frères Kouachi:
    “Ce qui m’a beaucoup choqué, c’est qu’avec ce genre de témoignage, en règle générale, tu viens, tu t’assoies et tu racontes. Là, le mec a fait comme les hommes politiques, il a fait un tour de table pour nous serrer la main à tous. Et moi qui ai d’habitude beaucoup de répartie, je n’ai pas eu le réflexe de lui dire ‘parle d’abord, et peut-être que je te serrerais la main après'”, a-t-il confié avant d’évoquer son tweet du 11 janvier dans lequel il se disait “très perturbé d’avoir serré la main du mec à l’origine de la tuerie de Charlie.
    Baffie en a profité pour faire quelques reproches à l’animateur du talk-show: “Pourquoi l’inviter pile le jour anniversaire? Ce n’était pas cool pour les familles de victimes, c’était perçu comme un affront”, a-t-il lancé à Thierry Ardisson qui s’est alors empressé de lui rétorquer que “rien n’était cool” pour les familles des victimes.
    “Y’a un autre truc que je voulais te demander”, a surenchéri Laurent Baffie. “Pourquoi tu ne lui as pas demandé à qui irait le fric des ventes de bouquins? Aux familles ou à lui? Tu as mal fait ton métier, je te mets un blâme.”
    Ardisson a admis “l’erreur”.
    Nausée.

  5. tout le monde en parle encore. aujourd’hui, c’est Charlie
    par Marika Bret (“Charlie Hebdo”). 15 janvier 2017

    Exhiber un badge « je suis Charlie » sur un plateau télé suffirait donc à démontrer son attachement aux valeurs de la République.

    Le mentor – pas “ex” comme annoncé partout – des frères Kouachi, Farid Benyettou et la très controversée anthropologue Dounia Bouzar auto-proclamée spécialiste es déradicalisation, nous ont proposé un show abject, obscène, en un mot dégueulasse [1]. Et, bien sûr, programmé au moment des commémorations de janvier 2017. Aujourd’hui, l’un comme l’autre voudraient nous faire croire que ce plan médiatique n’était nullement prémédité, et surtout pas pour faire vendre un livre, que je n’ai pas lu et que je ne lirai pas. Ils nous prennent franchement pour des cons mais ce n’est pas le plus grave.

    La bassesse de leurs démarches participe volontairement à l’enlisement sociétal qui nous guette depuis des mois. Après le « ils l’ont bien cherché », explication douteuse sur la pseudo responsabilité des victimes du 7 janvier, se distillent depuis déjà trop longtemps les mots de victimes innocentes et de victimes coupables : est-ce à dire que les frères Kouachi ont bien choisi leurs cibles et que Salah Abdeslam et consorts se sont trompés ? Le constat est sévère. Deux ans après ces assassinats politiques, nous en sommes à minima au même point. Charlie serait toujours, selon eux, viscéralement islamophobe, laïcard intégriste ou encore couché devant les intégristes puisqu’on n’y dessine plus Mahomet. Ingrat des millions de soutiens reçus, Charlie attiserait la haine en se moquant des victimes – les autres, pas les siennes – évidemment.

    Alors, ce qui me donne franchement la nausée, à l’heure où on se demande quand et où notre société sera prochainement atteinte et meurtrie, c’est de voir à qui est donnée la parole. Dounia Bouzar et Farid Benyettou se sont engouffrés sur la voie de la starisation médiatique. Il faut bien le dire, ils ne sont pas les seuls à répéter à l’envi les mots djihad, islam, Coran parce que désormais, ce vocabulaire fait vendre. J’ai cherché dans leurs propos liberté d’expression, égalité des droits, femmes hommes notamment, fraternité, laïcité, le tout prononcé en même temps. Je n’ai pas trouvé. J’ai un peu espéré entendre droit au blasphème. En vain.

    Je me suis demandé qui apportait quelles réponses, notamment à notre jeunesse, douloureusement réveillée à plusieurs reprises en 2015, avec des crimes politiques commis pour anéantir nos libertés de dessiner, d’écrire, de publier, liberté de conscience, liberté d’être.

    Parce que si la prise de conscience est nécessaire, elle ne suffit pas ; oui, elle est une étape décisive sur le chemin de la maturité et de l’émancipation. Mais si le sens critique est aiguisé par les charlatans promoteurs d’une Morale, les arnaqueurs dissimulés sous le masque du repentir et les escrocs de toutes religions, c’est la Haine qui est alimentée.

    D’où ma dernière question : nous inscrivons-nous encore dans tout ce sur quoi les générations précédentes se sont battues : un avenir avec des valeurs, des droits, des devoirs et des rêves et une démocratie qui doit sans cesse progresser pour ne pas devenir médiocre ?

    Entre l’inertie anesthésiante et la coupable lâcheté, face à la volonté d’anéantissement, j’en doute parfois.

    Marika Bret

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