Non, nos grands-mères ne portaient pas de voile.. par Anne Dunan

Interrogé sur la portée sexiste du voile islamique, Christophe Castaner, le patron de LREM, a affirmé ce lundi 16 avril dans “RTL Matin” qu'”il y a quelques années”, “toutes les femmes catholiques” étaient voilées en France.

[VIDEO]  “Quand nos mamans portaient le voile catholique” : l’histoire fantasmée de Castaner

Et ça, ça a énervé grave notre amie, Anne Dunan.

Anne, à Toi la parole !

Non, nos grands-mères ne portaient pas de voile. Ni la vôtre Monsieur Castaner, ni la vôtre Monsieur Juppé, ni la mienne. Tout au plus mettaient-elles un fichu les jours de temps pluvieux pour ne pas froisser leur mise en plis mais en aucun cas pour se soustraire au regard des hommes ni pour se soumettre à un diktat religi.

Nous sommes nées et avons grandi dans un monde où les femmes ne se cachent pas.

Certaines d’entre nous sont venues en France ou ailleurs pour pouvoir jouir des droits dont elles sont privées dans leur pays d’origine, d’autres ont profité de la chance que leur offrait la France pour vivre libres, s’émancipant des traditions familiales.

Nous sommes dans un pays où les femmes, après des siècles de luttes au péril de leur vie pour être libres et égales, ont obtenu, par la force de leur courage, un grand nombre de droits.

Les femmes n’étaient pas les dernières lors des révolutions, elles n’étaient pas les dernières à tenir un pays pendant que les hommes allaient se battre sur les fronts de guerre. Les femmes n’ont pas été les dernières à prendre les armes pour leur pays. Et en sus des combats concernant la Nation dans son ensemble, elles devaient mener pieds à pieds la lutte pour leur quotidien, pour leur liberté, pour leur égalité.

Cette lutte n’est pas terminée, pire, les acquis « sociaux » régressent chaque jour, dans les « territoire perdus de la République » mais aussi ailleurs. Notamment à cause de vous, politiques, car vous nous trahissez et vous trahissez vos grands-mères.

Il faut croire que maintenir la femme et notamment la femme musulmane dans la soumission vous convient ! Il faut croire que l’émancipation des femmes, de toutes les femmes vous déplaît. Serait-ce votre machisme qui parle sous couvert de tolérance ?

Mais nous ne sommes pas dupes : votre prétendue tolérance n’est qu’un prétexte.

NOS GRAND-MÈRES BRÛLAIENT LEURS CORSETS

Nos grands-mères ne se voilaient pas, elles brûlaient leurs corsets, nos grands-mères ne se voilaient pas, elles négociaient un meilleur avenir pour leurs filles : liberté sexuelle, liberté de choisir le moment d’être mère, liberté d’avorter, liberté de participer aux choix de la Nation, liberté de gagner leur vie et d’avoir un compte bancaire, liberté de ne pas être mariées par volonté familiale plutôt que par amour. Nos grands-mères étaient des combattantes, des résistantes, des femmes courageuses qui s’opposaient à leurs pères, à leurs frères, à leurs maris et à leurs enfants et parfois à leurs propres mères, celles qui avaient capitulé.

Nos grands-mères s’appellent George Sand, Simone de Beauvoir, Marie Curie, Olympe de Gouge, Emily Davidson, elles sont les 343 salopes, elles sont les iraniennes mises en prison pour avoir ôté ce tissu symbole d’oppression, ce sont les milliards de femmes à travers le monde et à travers les siècles, ce sont toutes celles, connues ou moins connues, riches ou pauvres, anonymes ou célèbres, qui se sont levées seules ou en nombre contre l’oppression masculine sous prétexte de religion ou de tradition !

Et vous osez nous dire que nos grands-mères étaient des femmes soumises qui portaient le voile ! Mensonges Messieurs, je vous renvoie à vos classiques et à votre histoire de France et du Monde, où depuis des siècles, nos grands-mères, nos mères, et la foule de nos aïeules ont lutté pour nos droits.

Alors, oui, vous êtes gênés aux entournures avec l’épineux problème du voile islamique. Cela pourrait vous obliger à devoir sortir de votre zone de confort, où de crainte d’être traités de racistes, vous vous retranchez derrière la tradition. Ça vous obligerait à prendre le risque de vous opposer à un électorat, à vous opposer aux indigénistes, à vous opposer aux nouvelles pseudo-néo-féministes, faux-nez de l’oppression machiste religio-traditionnelle. Pour cela il faut du courage.

Peu importe de quoi l’on pourra me traiter, je m’en contre fiche. Si Elisabeth Badinter n’a pas peur des accusations d’«islamophobie » ou de racisme, nous femmes libres et hommes libres ne devons pas avoir peur. Je sais qui je suis et je sais en quoi je crois. Je crois en la République Une et Indivisible, en la Laïcité (celle qui se suffit à elle-même sans qu’on l’affuble d’un adjectif), en la Liberté, en l’Egalité et en la Fraternité.

Les femmes qui luttent contre l’oppression patriarcale, quelle soit religieuse ou traditionnelle, sont mes sœurs.

Aujourd’hui on tente de banaliser ce voile comme un simple accessoire, au même titre qu’un serre-tête ou une barrette, ce qui est faux. Des opportunistes mercantiles vont même jusqu’à les faire défiler sur les podiums de mode ! Oserait-on faire défiler des mannequins avec un boulet d’esclave au pied ?

On tente de renvoyer les femmes musulmanes à leur statut de soumises à l’homme ! On leur dit : « la liberté des femmes d’Ocident ne vous concerne pas, vous, restez sur le côté. Votre émancipation n’est pas notre problème. » Et nous, femmes libres, n’irions pas soutenir nos sœurs ? Toutes celles qui luttent pour ne pas porter ce voile, toutes celles qui voudraient bien s’émanciper et ont peur, toutes celles qui n’ont même pas eu le choix, toutes celles qui s’interdisent d’y penser, toutes celles qui, résignées, ont choisi de capituler ?

LE VOILE C’EST UN CARCAN

Le voile, pensez-y, c’est un carcan que l’on met dès qu’un homme est dans les parages, c’est cacher ses cheveux, c’est ne pas sentir le vent qui soulève nos mèches, c’est la pluie que l’on ne sent pas couler sur sa tête, c’est penser tout le temps à ce qu’il soit bien mis pour qu’aucun cheveu ne sorte. Et derrière le voile, c’est ne pas être libre de sortir quand on le souhaite, c’est se marier avec le premier venu pour sortir de la tutelle d’un père ou d’un frère pour tomber sous la tutelle d’un mari, c’est le poids des traditions, ne pas faire honte à sa famille, s’interdire d’aimer un Autre. C’est demander l’autorisation pour tout ce qui n’est pas de l’intendance d’un foyer. Puis c’est le voile intégral qui descend aux chevilles, le mari qui empêche de tout. L’air qu’on respire derrière un tissu, le grillage sur les yeux, l’entrave.

Le voile c’est le premier anneau posé au pied de l’esclave dans le navire qui l’emmène vers les champs de coton.

Nos grands-mères n’étaient pas voilées, nos grands-mères ont brisé les fers à leurs pieds pour nous permettre d’être aujourd’hui libres, égales et fraternelles.

Je ne vous laisserai pas dire des inepties pareilles car vous condamnez toutes celles qui aujourd’hui encore luttent pour le minimum de droits. Mais ça ne vous concerne pas, ce ne sont pas vos cheveux, ce ne sont pas vos corps, ce ne sont pas vos libertés.

Mais il va bien falloir vous y faire, il est hors de question pour nous d’entrer dans les ténèbres sans combattre. Ce sera avec vous ou contre vous.

Anne Dunan

 

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4 Comments

  1. Le voile ne fait pas partie de notre civilité.

    C’est pas moi qui le dis, c’est le Président de la république dimanche soir dernier.

    Le débat est donc tranché.

  2. Il a du confondre avec le foulard qui était porté effectivement par beaucoup de femmes à une époque, et qui n’étaient pas forcément catholiques. Ces femmes mettaient un foulard notamment pour protéger leur chevelure de la poussière, pendant le ménage, ou en voiture décapotables, pour protéger les cheveux du vent et éviter les douloureux démêlages…

  3. Ma grand mère maternelle fut expulsée de Metz en novembre 1940, frappée comme 100000 mosellans par le fascisme que l’on voit resurgir sous de nouvelles formes. Elle est morte quand j’avais 6 ans et je n’ai aucun souvenir, ou photo, de sa tête voilée. Les jeunes mosellanes restées sous la tyrannie nazie furent embrigadées, comme las alsaciennes, dans la ligue des jeunes filles allemandes où on parlait de la tenue modeste des femmes. Quand tout le monde portait un couvre chef, les femmes portaient, ou non, un fichu ou un chapeau, suivant le climat, le travail et la condition sociale.

    Tout cela disparaissait dans les années 50 et M. Castaner doit être bien vieux pour son mouvement de jeunesse macronienne. L’indignation d’Anne Dunan est justifiée mais il faut rappeler que les droits civiques des femmes auraient pu être établis sous le front populaire si le Sénat n’avait pas fait son travail habituel de force anti-républicaine. La lutte des femmes a toujours fait partie des luttes républicaines et Georges Sand n’a pas sa place dans l’histoire du féminisme.

    M. Castaner et M. Ferrand ont montré la nature de leur politique, ni de droite ni de gauche. Les pleurnicheries menaçantes de M. Macron, contre les gens qui osent contester le programme sur lequel il aurait été élu, accompagnent des mesures et une idéologie antiparlementaire. Je ne suis pas un admirateur d’ Ian Bremmer mais son analyse de l’idéologie de M. Orban, TIME du 22 avril 2018 p.17, mérite d’être méditée: “Judges and journalists are expected to promote and protect THE RIGHTS AND CHOICES OF THOSE WHO wIN ELECTIONS. To criticize or block the agenda of elected officials is to UNDERMINE THE WILL OF THE PEOPLE.” L’anarchie destructrice de la pensée macronienne n’évoque pas une pensée totalitaire mais le confusionisme menaçant de M. Castaner et les propos de M. Ferrand, qui réinvente le mandat impératif, inquiètent vraiment.

  4. Mettre sur le même plan le carré Hermès et le hijeb pour clore le débat avec ce genre de saillie démontre la morgue du personnage, le dédain pour ceux auxquels ils s’adresse et la désinvolture avec laquelle il exerce sa fonction.

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