La marche des lemmings par Serge Federbusch

La France manipulée : retour sur la
manifestation du 11 janvier, ses causes et ses suites.

Il ne s’agit pas pour moi de nier l’ampleur de l’émotion populaire après les crimes commis par les frères Kouachi et Coulibaly, les 7, 8 et 9 janvier 2015. Mais le respect pour les victimes comme pour les manifestants commande de révéler et dénoncer la double manipulation qui a eu lieu. la_marche_des_lemmings_petitD’abord, j’explique dans mon livre comment les services de renseignements et de police ont été gravement défaillants alors qu’on savait, par la bouche même du Premier ministre Manuel Valls, que les risques terroristes étaient à leur maximum. Pour masquer sa responsabilité, le gouvernement a monté en toute hâte la manifestation du 11 janvier, en faisant en sorte que toutes les initiatives convergent, en déplaçant la date du défilé pour organiser un grotesque cortège des chefs d’états et de gouvernements avec des ennemis notoires des droits de l’homme, en manipulant les médias et en rendant gratuits les transports en commun. Tout cela a été décidé alors que les tueurs étaient encore en circulation et que Coulibaly n’avait pas assassiné à Montrouge et porte de Vincennes. Bref, on faisait courir à la population des risques élevés pour monter une opération de diversion.
On apprend depuis, chaque semaine ou presque, que la version officielle était truquée. Ainsi, la haute autorité indépendante chargée d’autoriser les interceptions de conversations téléphoniques a parlé de «manipulation» lorsque le pouvoir a tenté de lui faire porter le chapeau de l’arrêt de la surveillance des frères Kouachi.

Serge Federbusch
Serge Federbusch

Mais il y a beaucoup plus grave et c’est le coeur de mon livre. A cette première manipulation est venue se greffer une seconde. Par électoralisme principalement, le gouvernement a tout fait pour créer une distinction aussi étanche qu’artificielle entre islam modéré et islamisme criminel. La réalité est plus nuancée mais aussi plus inquiétante. Les musulmans en France, comme dans beaucoup d’autres pays du reste, se raidissent depuis des années dans une affirmation conservatrice et une pratique orthodoxe de leur foi. Cette dernière est loin d’être un exemple de tolérance, notamment vis-à-vis de ce qu’elle considère comme des blasphémateurs et que nous considérons comme des caricaturistes libres de leurs plumes, même si nous les désapprouvons.
J’explique l’origine de ce glissement réactionnaire, au sens propre, c’est à dire en réaction à l’esprit laïc. Il suffit du reste de se promener dans les rues de nos villes pour le constater par la multiplication du nombre de femmes voilées. L’influence croissante des salafistes dans les mosquées crée naturellement un terreau où quelques paumés vont passer concrètement à l’action en tuant ceux qui leur déplaisent. Les Kouachi viennent après Merah ou l’ assassin deBruxelles, ce ne sont pas des loups isolés comme on cherche à nous le faire croire.
La manifestation du 11 janvier a donc été le point de convergence, la résultante de cette double manipulation : disculper le gouvernement, occulter le problème des progrès du fondamentalisme musulman en France.
Car les slogans labellisés par l’Etat ont soigneusement évité de poser le problème au nom du «pas d’amalgame». Que signifie au juste le : «Je suis Charlie» ? Son ambiguïté explique en réalité son succès. Il évite de désigner les responsables et fait masse des victimes et de ceux qui veulent honorer leur mémoire. C’est une sorte de sublimation qui occulte les problèmes et maintient l’ambiguité, curieux rassemblement où on ne parle jamais des coupables.
Depuis, on peut même dire que les Kouachi ont gagné. Il y a eu en France pas moins de dix festivals, expositions ou rencontres culturelles écourtées, amputées de certains événements ou purement et simplement annulés par peur de déplaire aux islamistes.
La réalité est que la classe dirigeante française a peur d’affronter ce péril grandissant. Il faudrait une affirmation sans complexes des principes de la laïcité qui ne sont pas dirigés, rappelons-le, contre une ou plusieurs religions mais contre la tentation qu’auraient les fidèles de cette ou de ces religions d’imposer les règles de leur foi aux autres, y compris bien sûr aux autres croyants. Plus le raidissement communautaire est puissant, plus la laïcité est nécessaire. Le moins que l’on puisse dire, est que ce courage fait défaut à ceux qui nous gouvernent et qui nous préparent donc des lendemains qui déchantent.
L’esprit «Charlie» tel qu’ils l’ont fabriqué, c’est un peu un esprit munichois.
Serge Federbusch

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