Les Lettres qui dansent. Charles Baccouche

Jacob Mezrahi

Regardez-les danser les lettres de la Création, elles se croisent et tourbillonnent les unes avec les autres, elles se frôlent, s’évitent et se retrouvent suscitant toujours et depuis toujours de nouvelles figures, disons de nouveaux sens aux strictes commandements de la Loi du Sinaï.

Les lettre hébraïques descendent en volutes gracieuses de leurs hauteurs pour gratifier le monde de la bénédiction du Très haut.

Elles s’articulent les unes aux autres pour former d’autres lettres. La sagesse juive rapporte que les lettres de la Thora ont créé le Monde tel qu’il est, mais que si les lettres avaient d’autres dispositions, se lèveraient d’autres Mondes, différents et par extension des infinités de Mondes sont en gestation dans le respect et l’attente de la Volonté du Créateur.

Voyez comme il chante le monde sur leur musique, comme le ciel rit et donne les pluies de l’abondance et de la prospérité à la terre ensemencée par l’Homme.

22 lettres pour écrire la Thora, 22 lettres pour créer le Monde, 22 lettres qui ressuscitent la langue des Hébreux après 2 000 ans d’exil.

א – Aleph

Aleph descend, majestueux de ses racines célestes mais repose ses pieds sur le sol, pour nous dire que la Providence  n’est pas absente du Monde, qu’elle se masque parfois quant le Monde se pervertit, mais que sans trêve et sans répit, elle veille sur le peuple  sans pareil.

La première lettre de l’alphabet nous reste inaccessible puisque la création commence sans la Lettre ineffable inscrite dans le nom ineffable de l’Infinie Puissance.

Elle se manifeste dans des mots, cependant comme l’amour AHAVA ou l’unité du UN dont elle est le nombre, dans la Vérité EMET, qui sans le Aleph, signifie la mort.

Elle signifie aussi la mère EM, les quatre mères d’Israël Sarah, Rivka, Rahel et Lea, qui nous gardent et nous protègent.

L’Aleph s’abstrait du commencement pour faire place à la deuxième lettre de l’alphabet:

ב- Beth pour introduire la création du  Monde, ou la maison « Baït » dans le commencement, lui aussi inaccessible (B- Reshit), dans le « Reshit »  

(Reshit doit être complice du Aleph pour se cacher ainsi)

Le Beth signifie “maison” sa valeur numérique est 2. Il nous informe par sa forme fermée de tous cotés sauf à l’avant, que l’Histoire des Hommes peut commencer dans la dualité, par le binaire, le Pour se heurtant au contre, concept qui constitue le fil profond de l’Histoire du temps terrestre mais que le passé est sans retour, le ciel nous est masqué, le fond est clos et que seul l’avant l’avenir s’ouvre à notre action.

Mais jamais deux sans trois, selon la tradition voici donc le Guimel.

ג – Gimel, troisième lettre de l’alphabet hébreu, elle a la forme d’un bouclier , elle constitue d’ailleurs le centre du bouclier d’Abraham (Magen Abraham) et bien sur, de David le Grand Roi d’Israël dont on sait qu’il est encore vivant (Od David Hou Haï)

Le Guimel  dont la valeur numérique est le nombre trois est d’une importance particulière tant le nombre trois se retrouve pour compter nos patriarches (Sur eux la paix dit la tradition)

Il signifie le chameau, locomotion traditionnelle des tribus nomades, mais aussi gomel, pour guérison, guéoula pour rédemption ou fin de l’exil du peuple juif  mais comme le Beth domine le temps de l’Histoire, il est certes, la lettre de « galout », de l’exil, mais aussi le symbole de la (gvourah) puissance et de l’héroïsme juif fasse aux terribles épreuves de son Histoire, et de « Guéoula » signe du salut pour Israël. C’est pourquoi le Guimel a deux pieds et une tête.

.Nous allons rapidement nous raffermir grâce à Dalet:

ד – Dalet. La quatrième lettre de l’alphabet, il est la porte « Délet » de l’étude (Limoud) de l’espace en quatre dimensions, il est le centre du nom de Yéouda, le fils de Jacob qui portera le sceptre et la couronne royale d’Israël (Jamais le sceptre ne disparaitra de la Maison de Judas)

Rappelons que Le nom Yéouda (Judas) sans le Dalet est le nom du Dieu de l’Histoire, le Dieu de la Brith et de la bonté (Youd Hé Vav Hé), Judas ou Yéouda s’inscrit dans le nom du  D d’Israël. Le Dalet, au cœur du nom de Yéouda est une porte vers le ciel.

Le Dalet est terrestre, il enracine la Royauté divine dans la Royauté terrestre de David et Salomon.

Nous allons nous élever vers des hauteurs aériennes avec le hé qui, déjà nous murmure que le Monde a un Maitre:

ה – Hé Cinquième lettre de l’alphabet est aérien déjà par sa forme : un dalet ouvert d’où s’envole l’Esprit  et s’affirme la liberté humaine:

Abraham ne devient un homme libre et donc responsable, que lorsque l’Eternel introduit le Hé dans son nom, Sarah ne devient un être humain complet que lorsque de Saraï (ma princesse) elle se voit intégrer un hé qui lui révèle son véritable nom de Sarah. Sarah libérée de la tutelle masculine ne dépend plus que de sa liberté,

Le hé se trouve dans l’article défini mais surtout compose la moitié du tétragramme, accompagnant le Youd et le Vav, dont il est temps de se préoccuper, lui la sixième lettre.

ו – Vav, sixième lettre de l’alphabet est tout droit et intègre, il est par excellence la conjonction de coordination, il relie les mots et les concepts, il permet aux éléments de la création en six jours, de tenir ensemble,

Le vav ou waw pour les Sépharades, compose aussi le quart du nom du Dieu de l’Alliance, il se retrouve encore dans le vocable « l’Ancien » «Vatic) un autre nom du Très Haut  (l’ANCIEN des Temps dit la Kabale) il est la première lettre de Vidouï confession publique de Kippour.

Mais que vaut la piété sans la force de l’exercer, le Zaïn nous y invite

ז- Zayin septième lettre de l’alphabet a la forme d’une épée, d’un sabre, il est la dague qui permet à la mémoire de se souvenir « Zakhor, Zikarone » pour qu’elle soit en mesure de transmettre aux nouvelles générations ses traditions et la Loi des Hébreux, qui est la Loi d’Achem, donnée au Sinaï à Moshé Rabinou. Le Zaïn a d’autres sens qu’il serait utile d’évoquer ici.

En revanche, il amène tout naturellement vers les HET.

 ח – Het, Huitème lettre de l’Alphabet, le ח est fermé de toute part sauf le haut, ce qui nous interdit de voir ailleurs que la racine des choses, le Het constitue la lettre de la renaissance d’un départ nouveau plein d’espoir, huit renouvelle la création après le septième jour qui est Shabat,

Le Het débute le mot Haïa, la vie, de Eve la mère des vivants « Haïa », il est aussi celui de la responsabilité humaine « Hova » qui a reçu du Maitre de l’Univers la mission d’embellir son Monde, Il est aussi le nom du fiancé le « Hatan ». Cette responsabilité de terminer l’œuvre divine est un Bien en soi, que nous enseigne la lettre suivante le TET

ט – Tet est la neuvième lettre de l’alphabet, c’est un cercle entre-ouvert qui s’échappe par le haut. La résonnance la plus douce du TET s’entend dans les termes de Bien de Bon, TOV.

Eloïm vit que c’était bien ! Quoi ? Réponse : Bien et bonne la séparation entre les eaux d’en haut et les eaux d’en bas, Bonne la création de la lumière émergeant des ténèbres, Bien la création des animaux, et au sixième jour c’est même très Bien : «TOV MEOD ». Il est bon de laisser les autres sens du Tet pour l’instant et de rester dans ce Bon qui est un bonheur.

Le Yod la plus petite lettre de l’alphabet n’est pour autant, pas la moindre.

י – Youd, un point, est la dixième lettre de l’alphabet, la tradition rapporte que c’est à partir du Yod que les lettres carrées tirent leur origine. Le Yod est une « singularité » comme le Big Bang est une «singularité » pour dire qu’on ne comprend pas comment de l’infiniment petit d’un point, les Hébreux et les Physiciens découvrent que tout l’univers connu en procède.

Cette lettre stupéfiante constitue la 1re lettre du nom imprononçable YHVH.

La dixième lettre Yod c’est l’Unité démultipliée de Dieu qui se révèle à chacun selon sa capacité de l’approcher, ce qui n’enlève rien à la découverte du KAF.

 כ  – Kaf, la onzième lettre de l’alphabet, il représente le nombre 20. Il s’étire à la fin d’un mot il signifie la main dont il épouse la forme, il donne « Keli » l’ustensile, mais il aime la fiancée dont il commence le nom « Kala », il indique aussi le tout « Kol », ou le rien « Kloum » il associe ce qui se ressemble … adverbe correspondant à Comme en français, sans lui, il nous manquerait des mots pour Dire, que le Lamed va nous enseigner

ל – Lamed 12ème lettre de l’alphabet a comme valeur numérique le nombre 30. Il s’élance vers le ciel et dépasse dans sa course toutes les autres lettres, c’est qu’il introduit l’étude, le Limoud, qui réunit l’élève le Talmid, à son Moré le Maitre, c’est-à-dire le « Lomed » au « Mélamed » soit celui qui apprend à celui qui LUI apprend. Moshé est notre Maitre et nous sommes ses élèves qui étudions le plus haut des enseignements, soit la Loi descendue dans ses bras pour que nous sortions de notre destin et entrions dans l’alliance de paix, la Brit Shalom.

Le Lamed a l’honneur de commencer tout les verbes infinitifs, ses qualités sont si nombreuses que nous nous limiterons ici, à son élan vers la Connaissance, pour rendre visite aux secrets du MEM

מ ou ם – Mem est la treizième lettre de l’alphabet hébreu, dont la valeur numérique est 40 et celle de ם final est 600. Mem est fermé avec une sortie minuscule sur le coté du fond, en fin de mot, il est carré et fermé.

Moshé est  le seul prophète qui a parlé avec ACHEM, face à face, ni dans un rêve ou dans un brouillard, le Mem est aussi le Maitre qui enseigne « le Moré » Il succède donc avec pertinence au Lamed qui est l’étude, le Mem a de nombreuses acceptions il commence le « MIMCHAL » (gouvernement)

Le Mem entretient un rapport étroit avec le נ Noun puisqu’ensemble ils forment le

Cadeau « Matana »

נ ou  – Nun est la quatorzième lettre de l’alphabet, sa valeur numérique est 50 et en fin de mot 700.

Le Noun est long et ouvert sur le monde, mais très ouvert il ne concurrence pas le Bet, la maison, mais il est généreux car compose le mot Nadiv, mais il faut respecter le « Nagha » qui est atteinte et blessure, mais il désigne aussi, une partie de la terre d’Israël par le Néguev, sur laquelle il est si bon de voyager « Nosseah » Le Noun marque les verbes au Passif « Niphal » pour sans transition nous mener au ס Le Sameh.   

ס – Sameh, la quinzième lettre de l’alphabet avec comme valeur numérique 60.

 Le Samekh est rond, il nous entraine dans une ronde perpétuelle en tournant avec le mot « Sovev », mais en ordre, grâce au « sivoug »: Classification. Le Sameh nous apprend la politesse avec « Sélikha » et l’indulgence avec « Slihout », on peut toujours apprendre avec le Samekh, lettre dont la ronde ne cesse pas, nous parvenons néanmoins, à nous approcher du ע Ayin

ע – Ayin est la seizième lettre de l’alphabet. Sa valeur numérique est 70.

Il a ses racines plantées au ciel et son pied enfoncé dans le sol tant il se souvient de sa naissance dans le Aleph dans le haut des cieux, et sa descente dans le monde de la matière.

La lumière « Or » (Aleph) s’est muée en peau « Or » (Ayin), le Ayin signifie l’œil et la source, il est à l’origine des eaux et de la vision, la deuxième lettre de la racine du verbe

(hapoal)

Il est lourd le Ayin qui porte le Travail et l’esclave « Avoda et Eved » Il est aussi le courage et la force (OZ) et aussi l’aide (Ezer) une force qui nous conduit sans crainte vers le פ, le Pé

פ ou ף – est la dix-septième lettre de l’alphabet dont la valeur numérique est 80 et 800 en fin de mot. Le Pé c’est la « bouche », il s’ouvre au bas de son visage comme la bouche pour un humain.

Pé signifie la bouche, qui peut dire le bien comme le mal, seul organe unique et non double, car de la bouche sort la bénédiction ou la malédiction, elle est seule, car libre de ses paroles qui sont chez nous, des actes et engagent la responsabilité morale de l’Être.

Voir le sens de Pharo = Pé ra

Le pé commence la rencontre « Pagach » le rendez vous « pégicha » mais aussi la fleur « perakh », pourim et pour qui signifie « le sort »  Israël ne dépend pas du sort des Nations mais des tsadikim dont le צ Tsadi est la lettre

צ  ou – Tsadi est la dix-huitième lettre de l’alphabet. Sa valeur numérique est 90 et en fin de mot 900. Il a deux racines qui montent sans fin vers le haut, car il cherche la justice

« Tsedek tsédek tirdof » « La Justice la Justice tu poursuivras »

Le Tsadi fait immanquablement penser à TSEDEK, la Justice au TSADIK, le Juste, à la Tsédaka, la Justice sociale. Il est l’armée du Très haut « Melekh atsébaot » à Tsava l’armée en général et celle d’Israël en particulier, il est aussi moins martial dans sa modestie. (Tsanoua), il donne son nom hébreu à la France « Tsarfat » et observe de loin l’espace et le temps « Tsofé » comme dans la Hatikva, avec toutes ces éloges sa modestie pourrait se rebeller, nous l’en dispenserons en allant rendre visite au ק Kof ou Kouf

ק – Qof ou Qoph est la dix-neuvième lettre de l’alphabet. Sa valeur numérique est 100.

Il a la tête tournée vers l’arrière mais nous voyons dans ses lignes un lamed et un vav, les savants en tireront les sens cachés. Cependant sa forme nous dirige vers la Réception «Kabala,» qui nécessairement implique la transmission. Il nous invite à nous rassembler dans le « Kibboutz Galouyot » (Rassemblement des exilés), il est proche « Karov »

Le Kof nous appelle à lire « Koré, kéria » la Thora bien sur, et bien d’autres choses. Il s’élève à la moisson « Katsir » mais nous devons aussi rendre hommage au ר Rech.

ר Resh est la vingtième lettre de l’alphabet. Sa valeur numérique est 200 

Le Resh est largement ouvert vers l’avant, car il voit « roé »  il voit comme a vu Moshé Notre Maitre, un chevreau perdu et qui court le sauver, alors le Midrach nous dévoile que pour ce regard de bonté, Achem l’a choisi pour sauver son peuple, puisque ce berger avait été capable de tout abandonner pour sauver un chevreau. Roé signifie aussi le berger.

Resch est « Rosh » la tête lors de la création du Monde Reshit, il est le Rosh du Monde, le début connaissable par l’Homme, avant…. Reste un secret bien gardé par les séraphins aux épées de feu. Le Resh est colère « roguez » et bien être « Réhava ». Ne nous donnons pas de migraine avant notre entrée chez une reine, le ש Chin.

ש – Shin est la vingt-et-unième lettre de l’alphabet hébreu. Sa valeur numérique est 300.

Ses trois branches sont enracinées dans les hauteurs près du trône de Gloire, sa base vogue sur nos têtes. Elle est la première lettre de la « Shéhina » qui est la Providence et accompagne le peuple juif partout dans ses exils et reviendra avec lui au Pays de nos pères au temps de la Guéoula (rédemption)

Mais elle est aussi question « Shééla », quand  la rédemption ?  Shin est « Shiviim » 70 pour les 70 âmes qui descendirent en Egypte avec Jacob, pour les 70 Nations….. Le nombre trois « shaloch » qui se rapporte aux trois patriarches, le « shomer »  « Ne dort ni ne sommeille le gardien d’Israël»

Avec un point à sa gauche, il se gauchit avec le Satan, procureur de l’Eternel, qui dresse des obstacles sur la route d’Israël) mais se réjouit avec la liesse et la joie de nos fêtes « Saméah » « Vé aïta, az, saméah »

Le Shin et Sin a de si nombreuses significations que nous sommes incapables de les épuiser, en conséquence, nous garderons pour nous et nos communautés la joie de nos fêtes et notre proximité avec le Roi du Monde, avant de nous préparer avec précaution à dévoiler la dernière lettre le ת Tav.

ת –Tav est la vingt-deuxième lettre de l’alphabet hébreu. Sa valeur numérique est 400.

Il clôt l’alphabet hébreu, lui, la dernière lettre est d’une importance que ne doit échapper à personne.

Il apparait deux fois à la Création Et Hachamaïm vé Et Haarets, les maitres du Midrash nous rapportent que composé de la première lettre Aleph et la dernière lettre Tav, cette particule contient l’ensemble de tout ce qui a été crée et tout ce qui existe, Il termine le Monde comme le Aleph le suggère en laissant sa place au Bet

Il est le « Talmid » (l’Elève), il est « Tam » l’intègre, le « Tamid » Toujours,

Il signe le futur des verbes,

L’alphabet hébraïque est plein de sens, si plein, que nul à ce jour, n’a pu en épuiser les directions, les axes et leurs significations, les unes ouvrant de nouvelles voies de la pensée et de l’analyse, les autres s’enfonçant toujours plus, dans le mystère des origines.

L’alphabet Hébraïque est un miracle permanent  qui s’ouvre sous nos yeux, qui sont invités à le déchiffrer pour qu’il décode pour nous, les replis de notre temps.

Laissons-les danser les lettres de l’Alphabet des Hébreux, s’avançant et se retirant pour qu’avec elles, notre imagination apprenne aussi à danser et notre intelligence à chanter.

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