Femmes de pouvoir en Israël, par Kathie Kriegel

Organisée par la très énergique chambre de commerce de Tel Aviv et sa fructueuse appétence d’entregents qui favorisent l’émulation, la conférence « Meet the leaders » entendez, rencontrez les leaders », a réuni un public majoritairement féminin et pour cause ; il s’agissait cette fois d’accueillir des femmes qui ont fait carrière en Israël. Etant parvenues à des postes à responsabilité et ayant su s’imposer comme dirigeant d’entreprise, elles sont venues partager leur expérience.

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Nava Ravid CEO de l’Oréal Israël

Une belle brochette de femmes d’exceptions garnissait la tribune ; Elisabeth Kogan, Vice-présidente R&D de Teva, (Teva, 20 milliards de comprimés pharmaceutiques produits/an en Israël) Nava Ravid, CEO de l’Oréal Israël, Inbal Arieli, vice-présidente de Start-up Nation Central, fondatrice de 82000 EISP. Elles étaient entourées de jeunes pousses ; Viktoria Kanar, (« Digitalizing the business and fashion ; Les métiers de la mode et les nouvelles technologies) Noémie Alliel, (directrice adjoint de l’incubateur de Gvahim accélérateur de start-up) Clara Haïat, co-fondatrice de la start-up Babyco. Un des mérites de ces évènements et non des moindres, est de donner la parole aux jeunes pousses venues promouvoir leur jeune entreprise.

La place des femmes

sur le marché de l’emploi israélien

« Les toilettes de chez l’Oréal, sont les seules où je n’ai jamais eu à faire la queue », lance avec humour Nava Ravid première femme manager à prendre la tête du CEO Israël. Etonnant pour une société phare de cosmétiques, qui emploie 60.000 personnes dans le monde. En Israël, 77% des femmes ont une vie professionnelle, mais 7% seulement parviennent à siéger dans un conseil d’administration, et 2% en prendront un jour la tête. Dans l’agro-alimentaire et les hydrocarbures elles représentent 24% des effectifs. Leur présence est donc indépendante du secteur d’activité.

Des postes à responsabilité,

mais à quel prix ?

« Tous les matins je me lève et prend mon fardeau sur le dos ; c’est mon sentiment culpabilité qui ne me quittera pas de la journée » a confié Nava Ravid. « Ma mère, ma belle-mère m’ont pas mal reproché de me consacrer à ce point à ma carrière au détriment, disaient-elles, de ma vie de famille, du moins comme on la conçoit en Israël », se souvient-elle. « Une mère de famille qui souhaite chercher son enfant à la crèche après 17h est une mère indigne et moi je ne rentre jamais du travail avant 19/20h », se souvient Inbal Arieli. Et Clara Haïat, de souligner la différence de culture entre les Etats-Unis et Israël ; « j’ai constaté qu’ici, avec la venue des enfants, s’il y a des sacrifices à faire point de vue carrière, il est encore tout naturel que ce soit les femmes qui les fassent ».

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Clara Haïat (au centre) co-fondatrice de la start-up Babyco

C’est d’ailleurs ce problème qui lui a donné l’idée de monter son entreprise. « C’est à l’occasion de la pause de quelques mois imposée lors de ma première grossesse que j’ai pu réfléchir à ce que je voulais vraiment faire de ma vie et que l’idée de cette entreprise est née ». Babico a l’ambition d’aider les femmes qui refusent de sacrifier leur carrière sur l’autel de la vie de famille, en proposant des solutions adaptées pour résoudre ce casse-tête de garde d’enfant, avec une souplesse horaire qui n’existe pas en Israël. « Réussir est une affaire de choix », est un leitmotiv majoritairement partagé par toutes ces femmes. « J’ai ma carrière, 3 filles, un chien et un mari », dira avec humour Inbal Arieli.

Par-delà les genres

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Elisabeth Kogan Vice-président de R&D, Teva

 Les femmes sont perçues par leurs homologues masculins comme « soft » (douces) ou hystériques, et il se dit qu’il est difficile pour un homme de diriger trop de femmes. Un autre préjugé qui a de la corne, les décrète dédiées avant tout à leurs enfants.
Infléchir le pouvoir de ces clichés est un challenge de taille. « C’est vrai que je prends tous les appels que je reçois de mes enfants, mais je ne leur réponds pas toujours calmement je l’avoue, je ne suis pas toujours un ange de douceur, je crie pas mal quand je suis énervée, mais bon, ils me le pardonnent », avoue Inbal Arieli. « L’essentiel c’est la qualité du temps passé avec les uns et les autres », précise Elisabeth Kogan. « Mon fils de cinq m’a dit l’autre jour, qu’est-ce que tu fais comme travail. Lui expliquer que maman travaille dans le domaine de la recherche pharmaceutique, mais c’est pas ça qui l’intéresse : je voudrais que tu viennes à mon école et que tu expliques à tout le monde ce que tu fais, m’a-t-il demandé. Ce qu’il veut, c’est que je participe à sa vie que je m’investisse », confie Elisabeth Kogan.

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Inbal Arieli Vice Presidant Start-Up Nation Central et Fondatrice de 8200 EISP

Mais de confiance, Inbal Arieli n’en manque assurément pas ; « Je mesure 1,53, j’ai quarante et un an, j’ai une carrière, j’ai deux enfants, je suis brune, j’ai les yeux marrons, je suis une femme ». Cette façon de se présenter n’est pas fortuite. « Je suis accessoirement une femme de la même façon que je suis brune. Pour moi, le fait d’être une femme n’est qu’un indice de plus, au même titre que « j’ai les yeux marrons ». Elles sont unanimes pour dire qu’il faut se situer dans un « par-delà des genres »

La confiance en soi,

clé de voûte de la baraka

On aurait tendance à croire que le service militaire en Israël, est la voie royale qui mène tout droit à l’ascenseur social, mais il n’en est rien. « Le plafond de verre ce sont les femmes elles-mêmes qui se le fabriquent », dénonce Elisabeth Kogan. « Il faut qu’elles se fassent confiance. A Teva nous sommes fiers d’avoir des effectifs mixtes à 50/50. Nous avons un système d’évaluation très élaboré et j’ai constaté que les femmes y réussissent moins bien, alors que sur le terrain elles se révèlent ensuite aussi compétentes que les hommes voire plus performantes et plus capables, contrairement à ce que leurs résultats laissaient accroire », fait-elle remarquer. Les femmes possèdent une grande qualité d’écoute, une capacité à progresser constamment, le sens du contact, elles ont à cœur le bien-être de leurs employés. Pour autant, elles manquent de confiance en elles, ont une tendance au doute systématique ou à être exagérément critiques surtout envers elles-mêmes, voilà le refrain repris en chœur par ces femmes aux parcours pourtant différen

Leurs « Tips »

(bons trucs) aux femmes

« Demandez systématiquement 30% de salaire en plus quand vous négociez un salaire, pour contrer la tendance à vous sous évaluer » conseille Inbal Arieli. C’est le Tip que lui a donné un ami il y a des années, qu’elle a elle-même mis en pratique et qui lui a réussi.
« Ne jouez pas aux hommes. Soyez vous-mêmes », recommande Noémie Alliel.

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Noémie Alliel Directrice adjoint de l’incubateur de Gvahim accélérateur de start-up

« Apprenez à compter sur vous-mêmes », conseille Inbar Arieli, « mais sachez aussi demander de l’aide quand il faut », suggère Clara Haïat.
Leur secret, bien s’entourer, bien s’entourer et encore bien s’entourer. Conseillers, mentors, mais aussi Baby sitter, femme de ménage, compagnon qui met la main à la pâte et surtout un sens de l’organisation pour gérer son temps, et les aides prodiguées par ce précieux entourage. Et pas de divorce occasionné par ce choix de vie soutenu par ce désir de faire carrière, veulent-elles rassurer.

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Viktoria Kanar, (« Digitalizing the business and fashion ;

Les métiers de la mode et les nouvelles technologies)

« Ne négligez pas le networking, c’est indispensable et c’est souvent par ce biais, par le bouche à oreille que l’on a vent des meilleurs offres d’emplois », conseille Nava Ravid. « Moi-même je suis très présente sur les réseaux sociaux, et je consacre 20% de mon temps aux politiques, et sinon je n’aurais pas pu survivre à ce poste », avoue-t-elle. « N’omettez jamais de congratuler les uns les autres en cas de bonnes nouvelles, manifestez-vous, les gens aiment à être flattés ».
Quand à Elisabeth Kogan elle s’est adressée à ces messieurs ; « éduquez vos filles en les encourageant à suivre les filières scientifiques et mathématiques si elles le souhaitent. Mon éducation y est pour beaucoup dans ma réussite. Encouragez-les à ne pas se limiter », a-t-elle martelé. « Mon père m’a donné confiance. Ma réussite n’était même pas un point d’interrogation c’était une évidence ». Le foyer porteur comme atout majeur, sésame de réussite, est aussi un message qu’elles ont majoritairement voulu faire passer.
Le chemin est encore long à parcourir. En Israël pas de quotas mais il est à espérer que dans un proche avenir, il ne soit plus besoin de débattre de la place des femmes dans le paysage entrepreneurial israélien.
Kathie Kriegel
K KRIEGEL
 
 

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