Avi Barry, clandestin guinéen devenu officier israélien

Son histoire est particulière ! Ibrahima Barry, c’est le nom de ce jeune d’origine guinéenne qui a réussi l’exploit d’être incorporé dans l’armée israélienne. En séjour dans son pays natal, ce sous-officier de 25 ans a bien voulu se confier à notre rédaction. De son départ de la Guinée à son incorporation dans l’armée israélienne, le sous-Lieutenant Avi Barry dit tout sur sa vie.

Le sous-lieutenant Avi Barry - Photo-Africaguinee.com
Le sous-lieutenant Avi Barry – Photo-Africaguinee.com

– Je suis Ibrahima Barry, je suis guinéen d’origine et Israélien d’adoption. Je suis né à Labé ici il y a 25 ans et quelques mois. J’ai vu le jour au quartier Madina à l’époque Thyndel. Pour ceux qui connaissent Labé, c’est un quartier du centre urbain de Labé. Mes parents viennent de Koin dans la préfecture de Tougué. Ils se sont s’installés à Labé.

Quelles sont les raisons de votre présence en Guinée ?

L’une des raisons d’être en Guinée, je vous informe que ma douce-moitié est là. Je me suis marié l’année dernière, mais je n’ai pas d’enfant pour le moment. Donc ma femme est là, je viens de temps en temps voir Madame et les parents. L’an passé j’étais venu aussi.

Depuis quand êtes-vous installé en Israël et quelles étaient les raisons de votre départ de la Guinée ?

Depuis 10 ans je suis en Israël. C’est en 2005 que j’ai franchi clandestinement les portes d’entrée de ce pays.  J’ai été considéré  comme un  refugié au début, finalement le statut de refugié m’a été refusé avec l’argument que la Guinée d’où je viens n’est pas en guerre.

Mais comme en ce moment j’étais mineur, ils m’ont dit que je ne mérite pas d’être abandonné. Donc, ils m’ont envoyé dans un centre pour enfance pour que j’étudie au moins ; parce que le travail des enfants est sévèrement condamné dans ce pays. Avec mon consentement, on m’a intégré dans un centre pour étudier. C’est comme ça que j’ai pu entrer dans ce pays, ensuite j’ai engagé ma procédure en vue d’être en situation régulière.

Quel genre d’études avez-vous eu à faire là-bas ?

On m’a d’abord formé en langue pendant 7 mois, j’ai appris l’hébreu. Ensuite, j’ai suivi les cours d’enseignement général, j’ai repris en 11eme Année. J’ai commencé à préparer mon bac en 11ème année. J’ai été admis pour la 12ème, c’est à cette étape que j’ai mis fin à mes études après avoir reçu un diplôme qui marque mon niveau d’étude, c’est-à-dire quelqu’un a étudié jusqu’en 12ème année. C’est très signifiant en Israël la classe de 12ème parce que ce n’est pas donné à tout le monde d’y arriver.

Quel était votre niveau d’étude en Guinée avant de rejoindre l’Israël ?

Ici j’étais loin de finir. Après le certificat d’étude primaire presque j’avais arrêté, c’est en Israël que j’ai pu aller loin.

Votre objectif c’était d’aller dans un autre pays en passant par l’Israël où c’était là votre destination ?

Au fait, mon souhait c’était de m’y installer définitivement avec l’objectif de faire des études et chercher à travailler. C’est le cas de tous nos compatriotes  qui sortent. Aller chercher de l’argent, une fois cela acquis, ils reviennent au pays pour investir. C’est dans ce sens que j’étais allé aussi.

Mais vous avez fait un autre choix, au lieu de revenir vous êtes restés. Finalement vous avez intégré l’armée israélienne, loin de votre pays. Expliquez comment c’est arrivé ?

En toute chose c’est le destin. Je suis allé pour une chose, Dieu m’a conduit sur un autre chemin. Tout est parti de mon incarcération après mes études pour motif que j’étais sans papier finalement après les études.

Comme je vous ai dis c’est le destin, c’est en  prison que la porte du bonheur s’est ouverte pour moi. Une famille juive israélienne m’a aidé à sortir de la prison en me prenant comme leur enfant, c’est dans ces circonstances que j’ai eu des papiers qui m’ont naturalisé israélien. Ce qui m’a permis d’intégrer l’armée, le principe dans ce pays, si vous êtes israélien de naissance ou naturalisé, c’est une obligation de faire la formation militaire. C’est comme ça c’est parti.

La première raison de mon intégration dans l’armée, c’est parce que c’est une obligation, de l’autre côté, j’avais un devoir à l’endroit de l’Israël, un pays qui a accepté de m’adopter, une famille s’est engagée à me soutenir sans savoir qui je suis réellement. Tout ça m’a poussé à être patriote pour ce pays. En retour je me suis engagé à défendre le pays en continuant l’aventure dans l’armée. Continuer dans l’armée dans ce pays est hautement symbolique, ça prouve à suffisance que vous avez servi la nation. J’ai honoré ma famille adoptive.

En quelle année avez-vous intégré l’armée israélienne ?

C’est en 2009 que j’ai intégré la grande muette comme on le dit souvent. La procédure voudrait que tu fasses trois ans de service militaire. Après c’est à toi décider de continuer ou de désister pour faire autre chose. Moi j’ai décidé de continuer mais je me suis reposé un moment.

De la formation à l’intégration définitive jusqu’à la vie militaire, cela a-t-il été aisé pour vous ?

(Rire) ! Bon ça dépend de l’état de santé de chacun dans la formation, et c’est propre à chaque pays. Il y a de ces choses qu’on ne divulgue pas dans cette corporation, compte tenu surtout de certaines situations de mon pays d’adoption.

Lorsqu’on vous a annoncé que le service militaire était une obligation dans ce pays, aviez-vous eu des craintes ?

Au contraire, j’étais très joyeux et engagé. Parce que depuis que j’ai eu mes papiers, je me sentais comme un enfant du pays. J’étais pressé d’intégrer l’armée. D’un autre côté, je voulais laver ma curiosité de savoir, c’est quoi être soldat parce que je ne connaissais rien dedans. Donc j’étais à la fois joyeux et curieux. Et une fois là-dedans, j’ai connu la discipline militaire, les règles.

Des regrets n’avaient-ils pas hantés votre cœur ?

C’est vrai, c’est difficile au début pour toute formation, mais j’ai gardé mon courage sans regretter quoique ce soit. Parce que j’ai pu avoir beaucoup de notions, je suis resté serein sachant que je pourrais mener tranquillement ma vie jusqu’à la fin de mes jours. Donc pas de regret.

Vous vivez dans quelle ville d’Israël ?

Je réside à  Tel-a-Aviv, une grande ville que certains considèrent comme la capitale du pays mais  c’est Jérusalem la capitale. Tel-à-Aviv, c’est peut-être le centre économique le plus important du pays, c’est le centre de business.

La xénophobie ou le racisme est-il perceptible en Israël ?

Dans chaque pays, on trouve des bonnes personnes tout comme des mauvaises personnes aussi. Certaines acceptent la différence de peau comme d’autres le refusent. Ça persiste un peu cette affaire de racisme même si tu es en règle, tu trouveras une certaine réticence surtout si on est noir. Il faut savoir qu’il y a des limites. C’est pourquoi, il faut que chacun se batte pour travailler chez soi, nous savons bien que dans ton pays natal, tu peux résister à beaucoup de choses, mais là où nous sommes bien que nous avons été naturalisés, il y a des choses inadmissibles autour desquelles tu es obligé de fermer les yeux, surtout quand il s’agit du racisme qui se passe à travers le monde.

Quelle a été la réaction de votre famille en Guinée quand elle a appris que vous avez intégré l’armée israélienne ?

Dans ma famille, personne n’a fait objection, c’était plutôt une joie pour elle d’apprendre que je suis devenu soldat, l’état d’âme de la famille m’a beaucoup encouragé. Mais au début, j’avais des inquiétudes avant d’informer la famille ce que suis devenu. Même des guinéens ont marqué et continuent de marquer leur satisfaction par rapport à mon état. Ceux de Labé disent souvent le simple fait de savoir que suis de Labé aussi suffit à leur bonheur, ma famille ne pouvait être en marge de ce bonheur collectif. Cette joie croisée m’a réconforté davantage à persévérer. Ce que je vois dans ça, c’est du fait que c’est rare que des guinéens ou des africains intègrent l’armée israélienne. D’ailleurs les gens y vont rarement en aventure.

Est-ce qu’on rencontre beaucoup de noirs dans l’armée israélienne ?

La particularité, c’est que  je suis le seul guinéen à entrer clandestinement en Israël. D’ailleurs je suis le seul africain noir qui a pu avoir la nationalité et intégrer l’armée. Ceux qui sont proches de l’Afrique dans l’armée israélienne, c’est les juifs éthiopiens-israéliens, c’est-à-dire des originaires de l’Ethiopie mais qui sont nés en Israël. Mais un soldat venu fraichement de l’Afrique noire, je suis le seul dans l’armée pour le moment.

Quel est votre garde actuel ?

Je suis officier de mon état. J’ai le grade de sous-lieutenant et bientôt lieutenant plein.

Comment on vous appelle là-bas ?

Bon ici on m’appelle Ibrahima, là-bas c’est Avraham (en hébreu), c’est la même chose je n’ai pas changé. Mais on m’appelle réellement Avi. Ils ont associé Abraham et mon nom de famille pour sortir AVI BARRY. Lieutenant Avi Barry. Je suis heureux dans ce pays, ma vie marche paisiblement bien, je suis libre et j’en suis fier.

Est-ce quelquefois vos obligations dans l’armée ne vous amènent pas à perdre le contact avec votre famille en Guinée ?

Le contact reste maintenu avec la famille, comme le monde est devenu un village planétaire à travers les réseaux sociaux : facebook, viber, Imo etc. Aujourd’hui c’est facile de communiquer avec toute la famille.

Source : http://www.africaguinee.com/articles/2016/03/14/grande-interview-avi-barry-de-la-vie-de-clandestin-guineen-celle-de-soldat

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