Cannes: "Son of Saul" veut renouveler le regard sur la Shoah

Le Hongrois Laszlo Nemes, en lice pour la Palme d’Or avec son premier long métrage “Son of Saul”, cite Claude Lanzmann parmi ses références et revendique un regard cinématographique épuré sur la Shoah.

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Laszlo Nemes,

“C’est une approche sobre. Je me mets dans les pas d’un homme pendant une période brève et traumatisante”, explique à le réalisateur de 38 ans rencontré à Budapest et dont le film sera dévoilé à Cannes.
L’action simple et poignante de “Son of Saul” (Le fils de Saül) se déroule sur deux journées dans un camp d’extermination allemand en 1944. Saül est un détenu juif hongrois forcé de brûler les cadavres dans les crématoriums. Il pense avoir reconnu son fils parmi les corps, et entreprend de lui donner une sépulture digne.
Nemes, auteur de trois courts métrages acclamés dans les festivals internationaux, dit avoir voulu traiter l’Holocauste de manière “différente visuellement”. Le film a d’ailleurs été tourné sur une pellicule de 35 mm pour offrir au spectateur “une expérience plus +en immersion+ et émotionnelle”.
Il pointe un paradoxe des films sur la Shoah: celle-ci, selon lui, “a été beaucoup traitée au cinéma, souvent avec des stéréotypes, et en y mettant le plus possible d’émotion et de drame. Mais d’une certaine manière, les massacres y avaient lieu en silence. Leur dureté était étouffée.”
Laszlo Nemes cite parmi ses influences “Le prêteur sur gages” (The Pawnbroker, 1964) de l’Américain Sydney Lumet et “Requiem pour un massacre” (Idi i smotri, 1985) du Soviétique Elem Klimov, qui met en scène un enfant témoin d’une tuerie sur le front de l’Est.

UNE PLAIE TOUJOURS

A VIF EN HONGRIE


Le Français Claude Lanzmann et son monumental documentaire “Shoah” (1985) ont été une autre source décisive pour l’auteur hongrois, qui a vécu à Paris entre 12 et 26 ans: “Shoah”, dit-il, “a nourri le contexte émotionnel” de “Son of Saul”.
Il a fallu pas moins de cinq années à Laszlo Nemes pour financer son œuvre, faute d’être parvenu à convaincre des investisseurs étrangers.
Entièrement tourné en Hongrie, ce film à petit budget (1,5 million d’euros), dont le rôle principal est incarné par le New Yorkais d’origine hongroise Géza Röhrig, met en scène un panel d’acteurs peu connus mais polyglottes.
“Il était important de reproduire la +Babel+ qu’était Auschwitz”, où résonnaient notamment le hongrois, l’allemand, le polonais et le yiddish, souligne Nemes.
Si le film est donc entièrement hongrois, il reste à vérifier qu’il trouvera son public chez lui, dans un pays qui peine toujours à affronter cette page de son histoire.
Quelque 600.000 Juifs hongrois ont péri pendant la Seconde Guerre mondiale, dans leur grande majorité après l’invasion de la Hongrie par l’Allemagne nazie en mars 1944.
La commémoration, l’année dernière, du 70e anniversaire de ces déportations massives vers les camps de la mort a encore été émaillée de débats houleux sur l’étendue de la collaboration hongroise à leur organisation.
“Il y a un traumatisme sous-jacent ici”, juge le réalisateur. “On sent que l’assassinat de plus d’un demi-million de Hongrois il y a 70 ans n’est pas réglé. La Hongrie, et l’Europe centrale en général, ont encore bien du chemin à faire avant de pouvoir tourner cette page dérangeante, puis de construire, peut-être, un avenir plus porteur d’espoir”.
http://www.illustre.ch/people/International/fil-de-linfo/cannes-son-saul-veut-renouveler-le-regard-sur-la-shoah

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