Affaire William Saurin : Monique Piffaut avait toujours triché

La dirigeante à la poigne de fer n’en était sans doute pas à son coup d’essai : la fraude durait depuis des décennies. Peut-être depuis toujours.

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À chaque fin d’exercice, durant quelques jours, Monique Piffaut s’enfermait dans un bureau avec son ancienne secrétaire, Arlette. Les deux femmes, armées de bordereaux vierges, fabriquaient en travestissant leur écriture des centaines de fausses factures au nom de divers clients. Une fois l’opération terminée, la PDG fraudeuse appelait son chef comptable, qui enregistrait alors ces factures subrepticement apparues. Un autre comptable était ensuite chargé d’établir les liasses fiscales au chiffre d’affaires artificiellement gonflé et de les faire valider au commissaire aux comptes du groupe.

Top management dans le secret

Jusqu’au bout, lorsqu’il lui rendait visite à l’hôpital américain, le directeur général adjoint Denis Michault aurait tenté de convaincre sa patronne d’assumer son escroquerie. Jusqu’au bout Monique Piffaut s’est murée dans un silence buté, et a fait mine de ne pas comprendre de quoi il lui parlait… Même affaiblie, à 78 ans, elle n’était pas le genre de femme à qui l’on dicte ce qu’elle doit faire.

« Tapie en jupons »

Parfois qualifiée en « Tapie en jupons », en raison de son franc-parler et de son appétence pour le rachat d’entreprises en difficulté, cette femme au style plus Montreuil que Neuilly avait commencé sa carrière à Bagnolet. C’est en effet en Seine-Saint-Denis qu’étaient basés les Comptoirs du chocolat et des alcools (CCA, les mêmes initiales qu’un de ses futurs holdings), l’entreprise de son père, au sein de laquelle elle s’essaie à la vente puis à la finance. Plus tard, elle découvre les techniques de la restructuration financière sous la houlette du comptable Claude Colombani, ancien dépeceur d’entreprises en difficulté dans la bande de Bernard Tapie. C’est en 1992, à 53 ans, qu’elle se « met à son compte » et commence à édifier son empire à partir de sociétés agroalimentaires rachetées à la casse. Grâce à la revente de biens immobiliers qu’elle a accumulés au fil des années, les acquisitions s’enchaînent, dans la conserverie, le foie gras, le jambon ou encore la biscuiterie.

Seule certitude alors qu’elle laisse derrière elle un trou dans les comptes de quelque 25 millions d’euros, la patronne de la Financière Turenne Lafayette n’a pas fraudé pour s’enrichir personnellement. Un sac Hermès et un ouvrage dédicacé par Malraux et Dali sont les deux seuls biens estimés « de valeur » par le commissaire priseur, qui, quelques jours après son décès, a fait l’inventaire de son appartement du 20e arrondissement. Au total, la patronne n’aurait laissé derrière elle que l’équivalent de 32 000 euros d’objets et bijoux en plus de ses lourds secrets…

Melanie Delattre

Source : http://www.lepoint.fr

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